Covid-19
Un bilan très contrasté pour les producteurs fermiers de l'Isère

A la demande de l'ANPLF, l'Association des producteurs fermiers de l'Isère a mené une enquête détaillée sur les conséquences de la crise sanitaire dans la filière. L'hétérogénéité des situations est généralement liée aux circuits de commercialisation.
Un bilan très contrasté pour les producteurs fermiers de l'Isère

Même si, aux dires des grands médias nationaux, les consommateurs se sont orientés vers des produits français et locaux pendant le confinement, tous les producteurs de fromages fermiers n'ont pas bénéficié de cet élan. C'est ce que révèle une enquête réalisée par l'Association nationale des producteurs laitiers fermiers. Afin de mieux appréhender les conséquences économiques des mesures en vigueur dans le cadre de la crise Covid-19 sur la filière, l'ANPLF et ses structures membres (dont l'APFI) ont interrogé directement leurs producteurs adhérents. En Isère, 40% des adhérents ont répondu, soit 50 producteurs (1).

L'APFI a relevé que les pertes du fait de la fermeture de certains circuits commerciaux ont été importantes pour un tiers des producteurs fermiers de l'Isère.

L'APFI a ainsi relevé que les pertes du fait de la fermeture de certains circuits commerciaux ont été importantes pour un tiers d'entre de ses membres. C'est moins qu'au niveau national (près de la moitié), mais cela n'en a pas moins fragilisé les structures impactées. Pour les autres, la limitation des pertes a été coûteuse en termes de travail et de charge mentale.

Limitation des pertes

Si les effets de la crise ont été un peu atténués en Isère, c'est sans doute en raison de la part importante de vente à la ferme et en points de vente collectifs (PVC). Rappelons que notre département est le premier en nombre de PVC avec 24 points de vente. A contrario, les circuits de vente via les GMS, la restauration collective et commerciale sont moins développés qu’au niveau national. La fermeture de la restauration hors foyers et des rayons traditionnels des grandes surfaces a donc proportionnellement concerné moins de fermes. La part de la clientèle liée au tourisme est également moins importante en Isère que dans d’autres régions et le confinement est intervenu à la fin de la saison de ski, dans une période de moindre affluence.

Marchés plébiscités

Autre enseignement : les marchés constituent le circuit le plus souvent cité par les producteurs fermiers isérois comme circuit en forte contraction. Là encore, la proportion de baisse est moins forte qu’au niveau national, mais elle reste très importante : 65% des producteurs vendant sur les marchés sont dans cette situation, du fait du refus de nombreuses communes de demander une dérogation. Quelques producteurs ont cependant déclaré une hausse de chiffre d’affaire sur ce créneau. On peut en déduire que les marchés qui sont restés ouverts ont été plébiscités par les consommateurs.

22% des producteurs fermiers de l'Isère ont dû jeter du lait, des produits finis ou réduire leur production pour faire face à la crise.

Enfin, la part des producteurs isérois n'ayant pas fait évoluer leurs pratiques avec la crise a été plus élevée qu’au niveau national (près de 30% des exploitations ayant répondu au questionnaire), sans doute du fait des moindres conséquences commerciales de la crise dans le département. Toutefois, 40% ont fabriqué plus de fromages à affinage plus long. 30 % ont développé de nouveaux modes de commercialisation (drive fermiers, tournées à domicile) avec des conséquences lourdes en termes de travail. Il faut également souligner que 22% ont dû jeter du lait, des produits finis ou réduire leur production pour faire face à la crise. Ces fortes pertes auraient pu être évitées, si les marchés étaient restés ouverts. Les producteurs fermiers espèrent d’ailleurs que, sur ce point particulier, le déconfinement ne sera pas trop lent. Les marchés sont structurellement moins risqués (atmosphère extérieure, pas de libre-service). D'autant que sur ceux qui sont restés ouverts, les mesures sanitaires mises en place ont bien souvent été plus rigoureuses que dans beaucoup de supermarchés.

Gilles Testanière - APFI

(1) Parmi les adhérents qui ont répondu à l'enquête, 46% sont en caprins, 36% en bovins, 2% en ovins et le reste en troupeau mixte, proportions qui sont à l'image du département. La représentativité de l'échantillon permet donc de tirer des conclusions significatives.