PPAM
Les plantes aromatiques et médicinales sont en quête de reconnaissance

Isabelle Brenguier
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Les producteurs de plantes aromatiques et médicinales qui veulent étendre leur activité à l'herboristerie souffrent d'incohérences et d'absence de cadre réglementaire adapté. Ils œuvrent pour évoluer.

Les plantes aromatiques et médicinales sont en quête de reconnaissance
A l'issue de la projection du documentaire « Mauvaise graine » à Saint-Laurent-du-Pont, des productrices de plantes médicinales et un médecin-phytothérapeute ont alimenté un débat sur le sujet de la production des PPAM et de l'absence de cadre réglementaire adapté.

C'est un sujet dont on parle peu. Et pourtant, c'est un sujet qui intéresse de plus en plus.
Les PPAM (plantes à parfum aromatiques et médicinales) ont le vent en poupe. Pour preuve, le nombre croissant de personnes qui s'installent dans cette production, qui suivent des formations en la matière ou qui consomment des produits issus de cette filière. 

Grâce à la projection jeudi 31 mars à Saint-Laurent-du-Pont du documentaire « Mauvaise graine », réalisé par Bérangère Hauet, la question de la production de ces plantes associée à celle de la reconnaissance du métier d'herboriste, a été mise en lumière.
Le débat a montré une filière qui pourrait être en devenir si elle était un peu plus structurée et si la législation qui encadre ses pratiques, revue.

Cadre réglementaire inadapté

Le portait de Fanny, productrice de plantes aromatiques et médicinales dans les Bauges, formée comme herboriste au Québec - puisque le diplôme n'est plus délivré en France depuis 1941 - a servi de toile de fond pour parler des différentes activités qui gravitent autour de cette filière.
Il a notamment montré une jeune femme engagée, passionnée, pleine d'envie pour apprendre et comprendre les propriétés des plantes et pour transmettre son savoir-faire. Mais il a aussi mis en exergue toutes les carences résultant du cadre réglementaire actuel complexe et inadapté. 

Dans les faits, Fanny a le droit de produire des plantes, de les cueillir, de les transformer, de commercialiser ses produits, de prodiguer des conseils, mais en aucun cas de faire de la prescription ou de se revendiquer comme herboriste. Elle le déplore. Et elle n'est pas la seule.
D'autant que de nombreux produits à base de plantes sont vendus hors officine. Et que de nombreux producteurs s'installent avec un statut d'auto-entrepreneur, ce qui ne facilite pas la transparence de leur activité. 

Lobbying

En réponse à cette absence pesante face à la demande croissante des consommateurs pour les plantes médicinales via des soins préventifs ou naturels, les producteurs essaient de faire entendre leur demande de reconnaissance et œuvrent pour la création d'un référentiel précisant un métier de paysan-herboriste.
« Dès lors que nous faisons de la vente directe, il serait normal que nous soyons formé et reconnu. Ce serait plus simple et plus clair. Et pour certaines maladies, ce serait tellement intéressant d'associer notre savoir-faire à celui de la médecine conventionnelle », assure Fanny, dans le film.
Mais aujourd'hui, c'est un travail de titans qui se heurte au lobbying des laboratoires pharmaceutiques, peu enclins à supporter le manque à gagner qui en découlerait. 

Pourtant, les acteurs de la filière sentent que « les choses bougent ». Au plan législatif, une mission sénatoriale sur la filière et le métier d'herboriste visant à aboutir à une proposition de loi a été lancée. Elle peine à aboutir, mais les personnes engagées continuent de se mobiliser avec l'appui du sénateur Joël Labbé.
Les mentalités aussi évoluent. « Les diplômes universitaires de phytothérapeutes comptent dans leurs rangs de plus en plus de médecins », indique Aline Mercan, médecin et phytothérapeute.

Pérennité de la ressource

Peu abordées dans le film, Thida Ao, productrice de PPAM à Saint-Pierre-d'Entremont, a également raconté les difficultés rencontrées par les producteurs en termes d'accès au foncier et de retour sur investissement compliqué.
Comme la soirée était consacrée aux producteurs installés dans de petites surfaces, qui pratiquent la cueillette, il a donc aussi été question de la ressource et de sa pérennité. Les professionnels ont expliqué tout le soin qu'ils portent à l'activité, ne cueillant jamais en grande quantité et uniquement quand la plante est prête. Ils estiment que « cela fonctionne encore aujourd'hui. Mais que, si tout le monde se met à cueillir, c'est sûr, il y aurait un problème ».

Isabelle Brenguier