Attaques
A Montseveroux, le désespoir des bergers

Isabelle Doucet
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Les Bergers de Montseveroux ont subi quatre attaques du loup en 2020 et perdu 17 brebis, mais ce n’est que la partie visible de l’iceberg car toute l’organisation de leur exploitation a été remise en cause.  

 

A Montseveroux, le désespoir des bergers
Les Bergers de Montseveroux ont vu toute leur organisation bouleversée par la prédation, avec des agnelages décalés au moment des fêtes et des marchés.

Ils ont subi quatre attaques en 2020 et les parents de leur stagiaire, qui habitent aussi Montseveroux, une en 2021. Elodie et Frédéric James, éleveurs du Gaec de Montseveroux, sont confrontés depuis l’an dernier au phénomène de prédation et à la mise en place d’un dispositif complexe. 
L’an passé, la commune n’était pas classée en cercle 2 mais ils ont pu bénéficier de tirs de défense simples (TDS) de façon dérogatoire. Ils sont valables cinq ans. 
Cette année, la DDT a demandé de nouveau une autorisation spéciale au préfet coordinateur pour mettre en place des TDS chez les éleveurs du secteur qui les demandent et envoyer les louvetiers. Leur déploiement est imminent. Ils seront à la manœuvre, mais la présence des chasseurs est la bienvenue, cela en dépit du mot d’ordre national de se retirer des tirs de protection des troupeaux.  

Deux indemnisations sur quatre 

« Nous avons été choqués par les attaques qui se sont déroulées à proximité des maisons », explique Elodie James.
L’an passé, l’OFB a mis un piège photo, qui a capturé l’image du loup.
Difficile cependant de savoir combien d’individus se baladent dans les Bonnevaux. La même nuit, celle du 16 mars dernier, le loup a attaqué et dévoré un veau aux Portes-de-Bonnevaux avant de tuer trois brebis à Montseveroux. « Il avait faim », s’étonne Elodie James.
D’autant que deux jours après un chevreuil était aussi retrouvé éventré dans le secteur.  
En tout, les Bergers de Montseveroux ont perdu 17 brebis.
Ils racontent un parcours compliqué, entre le dépôt de plainte à la gendarmerie pensant qu’il s’agissait d’abord d’un chien, l’intervention de l’OFB, et les délais interminables de l’indemnisation.
« Sur quatre attaques, seulement deux ont été indemnisées. Les autres ont été bloquées car il manquait des documents. Les dossiers étaient retoqués par l’ASP, mais il n’y avait personne pour s’en occuper à la DDT, donc ils restaient en suspens. Si on n’appelle pas, il ne se passe rien », témoignent-ils. 

70% d’avortements

Dans l’urgence, la DDT leur a prêté en 2020 du matériel de contention : barrière et poste électrique qu’ils espèrent pouvoir racheter cette année puisqu’ils sont désormais éligibles à une aide de 80% en raison du classement en cercle 2.
« Mais le plus dur, c’est le côté humain, reprend Frédéric James. Heureusement, nous avons été soutenus par les élus et les autres éleveurs de la commune ». 
Aujourd’hui, c’est toute l’organisation de l’exploitation qui est remise en question.
« Les bêtes ne sont pas encore sorties et nous n’en avons pas envie. Seuls les béliers sont dehors et nous les rentrons la nuit. Nous sommes passés de 320 à 250 brebis et nous privilégions les autres ateliers, la fraise et l’accueil pédagogique. Cela prend du temps de placer les filets et de faire les parcs. Avant nous mettions les bêtes dans des clôtures ursus mais maintenant, il faut les rentrer tous les soirs en bergerie. Certes nous sommes aidés financièrement, mais je n’ai que deux bras ! », rapporte Frédéric James.
Et puis, il y a toutes les pertes indirectes liées au stress des animaux.
« La première attaque a eu lieu sur un lot de brebis gestantes. Sur 100 bêtes, j’ai eu 70% d’avortement. Il a fallu remettre ces brebis au bélier, nous avons perdu trois mois. Les agnelages ont eu lieu pendant la période des fêtes alors que c’est le moment où nous sommes sur les marchés ». 

Elodie James raconte aussi comment elle a demandé à l’agent de l’OFB d’achever avec son scalpel une bête agonisante.
Les deux éleveurs disent également leur malaise face à cette nouvelle situation : « L’aide, la protection, c’est dévalorisant. Nous ne sommes pas des profiteurs. Et puis, ce n’est pas motivant de se demander chaque jour quelles bêtes vont disparaître ». 

Isabelle Doucet 

Les attaques dans la Bièvre sur Maploup

Les attaques dans la Bièvre sur Maploup
Capture d'écran de Maploup sur laquelle les attaques concentrées dans la Bièvre et les Bonnevaux sont visibles.