Vins de Savoie
Jérome Masson, viticulteur à Chapareillan, entre en conversion bio

Isabelle Brenguier
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Viticulteur à Chapareillan depuis 20 ans, Jérôme Masson fait prendre le virage de la bio au domaine familial ancestral. Un changement pour lequel il se sent prêt. Et motivé.

Jérome Masson, viticulteur à Chapareillan, entre en conversion bio
Jérôme Masson, viticulteur de père en fils à Chapareillan, engage son exploitation en conversion bio à partir de cette récolte.

28 août 2021. Dans l’histoire de l’exploitation familiale viticole de Jérôme Masson située à Chapareillan, la date restera. Il s’agit du jour où le domaine de 5,5 hectares composé à 95 % de cépage Jacquère (Abymes et Apremont) est engagé en conversion biologique.

« Cela fait déjà quelques années que j’y pense, car mes pratiques sont assez proches de celles requises par le cahier des charges. Car, depuis que j’ai intégré la ferme en 2002, j’ai mis en œuvre différents changements. J’ai enherbé un rang sur deux de vignes et l’autre, je le travaille mécaniquement. Et j’ai réduit de 90 % l’utilisation des herbicides au cours des dix premières années qui ont suivi mon installation. Actuellement, je considère avoir fait 85 % du parcours pour atteindre le cahier des charges. Mais ce qu’il reste est le plus difficile à réaliser… Heureusement, la technique a beaucoup évolué ces derniers temps. J’ai trouvé une petite tondeuse avec des interceps qui correspond exactement à ce que je cherchais. Cette trouvaille me conforte dans l’idée que mon objectif est atteignable. Et au niveau des traitements, je travaille depuis longtemps avec des produits de bio-contrôles. Ils ne sont pas homologués en bio, mais c’était déjà une alternative au conventionnel », explique le viticulteur, prêt aujourd’hui à franchir le pas et à mettre en œuvre les derniers changements nécessaires.

« Au niveau de la culture de la vigne, je ne pense pas que je rencontrerai des problèmes à ne plus utiliser d’herbicides chimiques. Après, il va falloir que je retravaille un peu mes process de vinification. Je vais devoir utiliser des produits œnologiques biologiques et réduire les doses de souffre. A mon avis, il s’agit de la contrainte la plus importante », ajoute-t-il.

Passionné par la vigne

Ce sont des raisons écologiques et économiques qui ont conduit Jérôme Masson à opérer ce changement. En améliorant régulièrement ses pratiques, il a eu « envie d’aller plus loin », estimant aussi que sur le plan commercial, cela pourrait lui « ouvrir d’autres horizons et marchés ».

Il considère aussi cet objectif comme un challenge. « Cela fait 20 ans que je cultive mes vignes en conventionnel raisonné. Cette conversion m’offre une opportunité pour me renouveler, me réinventer. Je n’ai pas envie de tomber dans la routine. Depuis que je suis tout petit, je suis passionné par la vigne. J’ai envie de le rester. Et puis, depuis quelques années, il y a de plus en plus de vignobles qui se convertissent. Ils proposent de beaux produits, les vignes sont belles. Cela m’a motivé », assure le viticulteur, conscient toutefois qu’il sera amené à passer encore plus de temps dans ses parcelles.

Aujourd’hui, la moitié de la production Masson est commercialisée en bouteilles en direct, grâce au caveau à la ferme, un magasin de producteurs, quelques commerces en station, des épiceries et des bars et des restaurants. Le reste est vendu en vrac à un négociant. « La demande en bio n’est pas prédominante mais elle s’accentue. Surtout de la part des particuliers et des restaurateurs », précise le viticulteur. Cette nouvelle demande qui reflète la sensibilité des consommateurs sur ce sujet l’a aussi conforté dans sa décision. « Pour l’instant, je ne me plains pas, je n’ai pas de problème de voisinage. Mais je sais que le fait de passer en bio rassure les gens », souligne-t-il.

Un vignoble morcelé

Jérôme Masson pense commencer ses vendanges autour du 25 septembre. « C’est plus tard que les récoltes de ces précédentes années. Mais c’est plus tôt que lorsque j’étais enfant », analyse-t-il. Touché par le gel de printemps, il ne sait pas exactement quelles seront ses pertes. « Certainement de l’ordre de 30 à 40 %. Une des particularités du vignoble de Savoie est d’être très morcelé. Cela nous contraint à passer beaucoup de temps sur la route. Mais en même temps, quand nous subissons un épisode climatique, nous pouvons espérer que toutes nos parcelles ne soient pas concernées », reconnaît l’agriculteur.

Isabelle Brenguier

La cuvée 1603 du domaine Masson de Chapareillan
Jérôme Masson vient de développer une nouvelle cuvée de 1 000 bouteilles nommée « 1 603 ».

La cuvée 1603 du domaine Masson de Chapareillan

« Dans la famille, nous sommes agriculteurs et viticulteurs depuis quelques générations », avertit Jérôme Masson, installé sur les hauteurs de Chapareillan, au hameau de La Pallud. En fait de « quelques générations », l’histoire de la famille remonte au moins à 1603. « Auparavant, il s’agissait de polyculture, mais la génération de mon père et la mienne avons spécialisé l’exploitation dans la vigne », précise le viticulteur.

Attaché à son histoire familiale, conscient que sans cet héritage, il ne serait pas là, Jérôme Masson a eu envie de rendre hommage à ses ancêtres. C’est ce qu’il a amené à développer une nouvelle cuvée de 1 000 bouteilles nommée « 1 603 ». « C’est un vin qui date de 2017 et que j’ai mis à la commercialisation cet été. Au départ, c’était un « Abyme » mais je l’ai fait vieillir dans des conditions particulières. Ce process ne le fait plus rentrer dans la typicité des Vins des Savoie mais lui confère des arômes assimilables à des fruits confits. J’ai voulu garder les origines de Chapareillan, des Abymes, des éboulis de La Pallud, mais j’ai aussi souhaité développer un autre vin. C’est la raison pour laquelle, sur les conseils de mon œnologue, je l’ai déclassé en Vin de France », détaille le professionnel, qui espère que cette nouvelle cuvée sera appréciée par ses clients.

IB