Vins de Savoie
Du Domaine Labbé à « Terres de 1248 » : un héritage préservé

Isabelle Brenguier
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L’innovation a toujours été au cœur de la stratégie d’entreprise de la famille Labbé. Pour développer des pratiques biologiques et alternatives, Jérôme et Alexandra Labbé ont créé un nouveau domaine.

Du Domaine Labbé à « Terres de 1248 » : un héritage préservé
Jérôme Labbé utilise des UVC pour aider sa vigne à lutter naturellement contre les maladies.

Passionnés par la culture de la vigne et animés par une volonté permanente de se renouveler héritée de leurs pères et même de leur grand-père, Alexandra et Jérôme Labbé, du domaine Labbé à Chapareillan, viennent d’en créer un nouveau dénommé « Terres de 1248 ».

« 1248 est l’année où le Mont Granier (sommet du massif de la Chartreuse, ndlr) s’est éboulé. Nous avons choisi ce nom en mémoire de ce que la nature nous a laissé, avec cette zone d’éboulis composée de sols argilo-calcaires propices à la vigne », explique Alexandra Labbé.

Pour les deux cousins, l’aventure s’apparente à un nouveau challenge, puisque ce domaine qui prend place au sein d’1,5 hectare pris au Domaine Labbé, est conduit en agriculture biologique.

« Notre démarche a été motivée par l’envie de ne plus utiliser de produits chimiques. C’est un beau défi car cela nous demande énormément d’apprendre toutes ces nouvelles techniques, qu’elles soient mécaniques, en lien avec l’utilisation des plantes et des huiles essentielles ou les effets de la lune. Mais c’est passionnant », avance Jérôme Labbé.

« Bien que j’ai toujours été intéressé par l’agriculture biologique et la biodynamie, je pensais qu’elles étaient plus adaptées au sud de la France et que dans nos terres plus humides de Savoie, elles pouvaient être compliquées à mettre en œuvre. Avec le changement climatique, j’espère que nous avons des possibilités », ajoute le viticulteur.

Nombreuses techniques 

Pour autant, il n’était pas question de convertir l’ensemble du Domaine Labbé. Car ces changements de pratiques demandés par certains consommateurs, impliquent une hausse des coûts de production et une mise en danger de celle-ci, des conséquences qu’ils n’ont pas voulu faire supporter à leurs clients d’origine.

« Le domaine « Terres de 1248 » est cultivé avec un autre était d’esprit. Sa production est destinée à un autre marché, une autre clientèle », souligne Jérôme Labbé.

Dans ce nouveau domaine, Alexandra et Jérôme Labbé utilisent de nombreuses techniques alternatives. Certaines expérimentées au sein du Domaine Labbé ont déjà bien fait leurs preuves.

C’est le cas du travail du sol, réalisé avec un concept de machines fabriquées maison, combinant tondeuses et charrues interceps. Une des dernières créations de la famille est d’ailleurs une tondeuse interceps, capable de tondre toute la largeur de la ligne en un seul passage, de façon à diminuer les coûts et le temps de travail.

Résultats prometteurs

Cette année, les viticulteurs ont également essayé l’utilisation de prêles, qui grâce à leur forte teneur en acide salicylique ont un effet fongicide, et d’orties, propices à la fortification de la vigne. Ils ont été impressionnés par les résultats.

« Nous avons constaté une végétation plus verte et plus brillante. Le vignoble semble en bien meilleure santé », indique Jérôme Labbé. Et dans ce même objectif de trouver des solutions pour aider la vigne à lutter naturellement contre les maladies, ils ont développé des essais avec un outil prêté par un concessionnaire de Myans (Savoie), qui produit des UVC * permettant au végétal de développer ce même acide salicylique qui l’aide à développer ses propres défenses immunitaires

Pour tirer les bonnes conclusions de leurs expérimentations, les Labbé divisent leurs parcelles. Dans le Domaine « Terres de 1248 », une moitié est conduite en bio, avec les traitements UV. L’autre, uniquement en bio.

Et dans le Domaine Labbé, conduit en conventionnel, une partie utilise des traitements phytosanitaires et les traitements UV et l’autre, seulement les UV. Même si l’année a été favorable pour la mise en œuvre de tels essais avec une faible pression en termes de maladies, Alexandra et Jérôme Labbé estiment que l’expérience est intéressante et que leurs premiers résultats sont prometteurs.

La conversion de ces parcelles a commencé cette année. Le millésime 2023 sera le premier à être commercialisé sous conversion.

* Les UVC sont une des trois fractions des ultraviolets

Isabelle Brenguier

L’opération vendanges 2022 est lancée

Août n’était pas terminé que les vendanges commençaient dans le vignoble de Savoie. Rencontre avec Alexandra et Jérôme Labbé, propriétaires du domaine Labbé à Chapareillan. 

 

« La récolte s’annonce très qualitative », estiment Alexandra et Jérôme Labbé, du domaine Labbé à Chapareillan, alors qu’en ce 29 août, ils commencent tout juste à vendanger. « S’agissant de la quantité, c’est plus difficile à dire. C’est très hétérogène selon les parcelles. Pour les cépages précoces, la pluie est arrivée trop tard pour avoir un effet. Mais pour les autres, et notamment la jacquère, les 30 millimètres tombés à la mi-août sont une aubaine », ajoutent-ils. Cela dit, comme ils le soulignent prudemment tous les deux, « tant que la récolte n’est pas en cuves, ce n’est pas fini. Rien n’est acquis ».

Installés au sein de l’exploitation familiale depuis 2004 à la suite de leurs pères respectifs, Marc et Roger Labbé, dans des parcelles réparties entre Les Marches et Chapareillan, Alexandra et Jérôme Labbé l’ont beaucoup fait évoluer.

S’ils ont gardé les 30 hectares de céréales, de maïs et de luzerne ainsi que les dix hectares de vigne existants, ils ont développé l’encépagement pour en avoir une dizaine aujourd’hui.

« Nous avons 80 % de jacquère pour faire de l’Abymes, de l’altesse pour faire de la Roussette, du chardonnay planté en vins de France pour faire du vin blanc, nos mousseux blancs, nos jus de raisin blanc et pétillants. En rouge, nous faisons du pinot noir et de la mondeuse, ainsi que du rosé pour moitié pinot et moitié mondeuse », explique Alexandra Labbé.

60 000 bouteilles par an

Aujourd’hui, les deux cousins sont aidés d’un salarié temporaire embauché de mi-novembre à mi-juillet. Mais pour les vendanges, tout est mécanisé. Selon Alexandra Labbé, « l’achat d’une machine à vendanger - au sein de la Cuma des Eboulis – nous permet de rentrer rapidement nos récoltes en cuves. Maintenant que nous connaissons de chaudes journées d’automne, il est important de ne pas trop trainer », souligne la viticultrice.

Elle reconnaît aussi que la création de la Cuma en 2009 a été une belle avancée. Elle leur permet d’investir dans des outils performants, tout en mutualisant les coûts.

Les Labbé produisent 60 000 bouteilles par an. La moitié est exportée, essentiellement vers les Etats-Unis. Le reste est commercialisé sur place à la ferme, et au sein du magasin de producteurs « Le comptoir de nos fermes », à Biviers. « Nous sommes contents de ce débouché. Il nous a permis de faire (re)découvrir nos vins à une clientèle grenobloise qui n’en avait pas toujours une bonne image », précise la jeune femme.

IB