L’actu vue par Alain Merlin
Les MFR doivent garder le cap
Alain Merlin, le directeur de la Fédération départementale des MFR (Maisons familiales et rurales) de l’Isère, évoque la rentrée scolaire et les chantiers dans lesquels les établissements isérois vont se lancer au cours de l'année.
Directeur de la Fédération départementale des MFR de l’Isère depuis 2007, Alain Merlin vient de préparer sa dernière rentrée scolaire. Entré dans le giron des MFR en 1986 en tant que moniteur, devenu par la suite directeur d’établissements, puis directeur de la fédération départementale de l’Isère en 2007, il fera valoir ses droits à la retraite à la fin du mois de septembre.
Convaincu par le concept pédagogique des MFR, la proximité qu’elles mettent en place avec les élèves, ainsi que par l’intérêt d’associer la pédagogie de l’alternance à l’apprentissage théorique, il a œuvré sans relâche pour que les jeunes des MFR trouvent leur voie et s’épanouissent dans leur vie personnelle et professionnelle.
Comment s’annonce cette nouvelle rentrée pour les 13 MFR iséroises ?
« Le recrutement dans l’enseignement agricole est conforme aux années précédentes. Nous comptons environ 1 500 élèves inscrits au titre du ministère de l’Agriculture. Il en est de même pour les formations en apprentissage. Chaque année, nous craignons des baisses d’effectifs. Mais elles ne sont pas au rendez-vous. Malgré l’inflation, les familles continuent d’inscrire leurs enfants dans nos établissements. C’est un vrai choix qu’elles font, parce qu’elles reconnaissent la qualité de notre enseignement et de notre accompagnement pour leurs enfants. »
Sur quels projets les MFR de l’Isère vont-elles s’engager ?
« Les maisons du département vont continuer de travailler sur l’éducation au monde et aux autres, soit tout ce qui concerne « le vivre ensemble ». La société bouge. Il est nécessaire que nous donnions aux jeunes un cadre clair. Elles vont aussi poursuivre l’accompagnement mis en œuvre pour les jeunes en situation de handicap. Le partenariat noué avec le Brésil va également se prolonger. Il fait le lien avec ce que nous effectuons en matière d’éducation au monde et aux autres, et aborde les enjeux que sont l’agriculture, le développement durable, le changement climatique, la gestion de l’eau. Cela nous permet de lutter contre les idées reçues de l’agriculture au Brésil, de mettre en avant le modèle d’agriculture familiale qui y est aussi important. Enfin, nous sommes toujours dans l’amélioration de la formation à distance, grâce à l’utilisation des outils numériques. »
Qu’est-ce qui vous a motivé durant toutes ces années qui ont composé votre carrière ?
« Quand j’ai commencé à travailler comme moniteur dans une MFR de Côte-d’Or, j’ai été séduit par le concept de pédagogie de l’alternance, par cette idée d’associer la théorie à la pratique, de se servir de l’expérience acquise par les jeunes en entreprise, d’être en lien avec le monde professionnel. Les années passant, j’ai apprécié la liberté pédagogique permise par le modèle des MFR, la possibilité de travailler dans une dynamique de projets. J’ai aimé le management des équipes, le lien avec les territoires. J’ai toujours été porté par l’envie de donner de nouvelles perspectives à des jeunes qui n’en avaient plus, de les valoriser, de leur redonner le goût d’apprendre et la volonté de trouver un projet professionnel. Au sein des MFR, nous nous attachons à développer leur savoir-être. C’est très important. Cela passe pour beaucoup, par le temps que nous passons ensemble, dans le cadre de l’internat, en dehors du temps scolaire. Tout cela est ce qui a donné du sens à ma carrière professionnelle. »
La réforme de l’apprentissage qui a eu lieu en 2018, a-t-elle changé la perception de ces formations ? Leur a-t-elle donné un nouvel engouement ?
« Absolument. Il y a eu un avant et un après en la matière. Avec cette réforme, le gouvernement a mis de nouveaux moyens qui ont permis à ces filières de se développer et de changer le regard qu’on leur portait. C’est une très bonne chose. Mais dans le même temps, on a assisté à un accroissement des formations proposant de l’alternance, qui ont augmenté la concurrence. Dans cet environnement, notre force est d’avoir fait le choix de garder des établissements à taille humaine, avec 150 élèves en moyenne. C’est ce qui nous permet de garder la proximité que nous entretenons avec nos jeunes. Pour qu’ils réussissent, ils ont besoin d’être connus, reconnus, valorisés. C’est pour cela qu’il ne faut pas des classes trop importantes. »
Entre vos premières années d'enseignement, et aujourd’hui, la société a pris un virage numérique très important. Qu’est-ce que cela a changé dans l’enseignement dispensé aux jeunes ?
« Ce virage est allé très très vite et est monté en puissance. Ses conséquences sont importantes dans deux domaines. Au niveau de l’encadrement, les formateurs doivent consacrer de plus en plus de temps à l’administratif, au renseignement de plateformes. Cela questionne, car le cœur du métier n’est pas là. Il est dans l’accompagnement des jeunes. Mais si on s’en désintéresse, on se marginalise… La réponse n’est pas évidente. Et au niveau des jeunes, le développement du numérique, des réseaux sociaux, l’accélération de la circulation de l’information, nous incite à nous adapter pour rester proches des jeunes et des familles. Nous sommes confrontés à une problématique de gestion de maladresses, de conflits, sur les réseaux sociaux, qui enlèvent de la sérénité. Nous avons beaucoup à faire pour fonctionner dans un environnement apaisé. La relation avec les parents est parfois délicate aussi. »
Quels enjeux les MFR doivent-elles relever ?
« Il convient qu’elles ne soient pas hors-sol, qu’elles gardent leurs valeurs et qu’elles s’adaptent à faire la meilleure combinaison possible pour garder le cap de ce qu’elles font depuis toujours. »
Propos recueillis par Isabelle Brenguier
Les aides pour l'embauche d'un apprenti
Dans les domaines de l’industrie et de l’artisanat, l’apprentissage est un moyen de former une personne à un poste, dans l’objectif de l’embaucher à l’issue de son contrat d’alternance. La situation est un peu différente dans l’agriculture, où les jeunes viennent acquérir des compétences qu’ils pourront valoriser lors d’une prochaine étape de leur parcours professionnel (salariat, installation…)
Les employeurs qui recrutent des jeunes en contrat d'apprentissage peuvent bénéficier d’un accompagnement financier de l’Etat. Versé uniquement au titre de la première année d’exécution du contrat, il s’applique aux contrats conclus entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2024. Pour que l’employeur bénéficie de cette aide, il faut que l'alternant prépare un diplôme ou un titre à finalité professionnelle inférieur ou égal au niveau 7 du cadre national des certifications professionnelles (master, diplôme d'ingénieur, etc.). Le montant de l'aide s'élève à 6 000 euros maximum. Dans le secteur agricole, ces aides s’apparentent à un véritable booster qui facilitent leur mise en place.
Pour percevoir cette aide, l’employeur doit déclarer l'embauche de son apprenti à Ocapiat, l’Opérateur de compétences (Opco) de la coopération agricole, de l’agriculture, de la pêche, de l’industrie agroalimentaire et des territoires.
L'aide est versée automatiquement par l'Agence de services et de paiement (ASP) tous les mois pendant la première année du contrat d'apprentissage, avant le paiement du salaire.
Les rémunérations des apprentis bénéficient de la réduction générale de cotisations renforcée. L’exonération des cotisations salariales spécifique aux contrats d’apprentissage du secteur privé est limitée à 79 % du Smic en vigueur au titre du mois considéré. Les conseillers entreprises de France Travail (ex-Pôle Emploi), les opérateurs de compétences, et la chambre consulaire dont l’employeur dépend, sont là pour répondre aux questions en la matière.
A noter que l'aide de 6 000 euros maximum ne s'applique plus aux contrats de professionnalisation conclus après le 30 avril 2024.
Source : Ministère de l’économie et des finances
Hausse des contrats d’apprentissage
La loi du 5 septembre 2018, qui réforme le système de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue, a en Auvergne-Rhône-Alpes, fait augmenter le nombre de contrats d’apprentissage de 124% entre 2017 et 2021. La Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) en a compté près de 110 000 en 2021.
La loi, en permettant aux personnes d’accéder à l’apprentissage jusqu’à 29 ans (au lieu de 25 ans avant 2018), a contribué mécaniquement à cette hausse du nombre des contrats. Elle a logiquement engendré un accroissement de la part des contrats signés par les plus de 26 ans passant de 1% à 7% des contrats en 2021.
Source : Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités - L’évolution de l’apprentissage en Auvergne-Rhône-Alpes - 2022