VOLAILLES DE CHAIR
La filière face à la « quadrature du cercle »

Alors que la Covid-19 provoque un recul de la consommation de volailles de chair, l'interprofession Anvol poursuit son double objectif : lutter contre les importations et répondre aux attentes sociétales sur le bien-être animal.

La filière face à la « quadrature du cercle »
Sous l'effet de la crise sanitaire, la consommation de volailles de chair pourrait reculer de 1,1 % en 2020, a alerté l'interprofession Anvol en octobre.

Sous l'effet de la crise sanitaire, la consommation de volailles de chair pourrait reculer de 1,1 % en 2020, a alerté l'interprofession Anvol en octobre. La progression des ventes en magasins (+ 5,9 % attendus sur l'année) ne compensera pas la mise à l'arrêt de la restauration. Or, c'est elle qui tirait la croissance de la demande depuis quinze ans. Entre 2005 et 2019, la consommation de volailles a progressé de 30 %. En 2020, la crise sanitaire a particulièrement sinistré les filières dépendantes de la restauration. En pintades, « la situation devient dramatique », prévient Jean-Yves Ménard, président du CIPC (interprofession du poulet de chair), avec une baisse de consommation « de 20 à 25 % » sur les sept premiers mois de 2020, et des stocks de 1 300 t. Idem pour le canard, dont les ventes ont plongé de 16 % par rapport aux sept premiers mois de 2019 (gras et à rôtir). Avec 12 000 t de stocks, la filière dispose de réserves supérieures à une année de consommation.

Baisse « artificielle » des importations

La filière dindes affiche quant à elle une consommation en hausse de 2,3 %, mais « finira l'année à zéro », prédit Jean-Yves Ménard. Ces volumes supplémentaires correspondent « aux dindes mises en place fin 2019, qui ont été consommées et n'ont pas généré plus de stocks », précise-t-il. De leur côté, les ventes de poulet (70 % des volailles consommées) se maintiennent à 805 000 t (+ 0,1 %). Le n°1 des volailles de chair reste toutefois sous la pression des importations, qui représentent 45 % des poulets consommés en 2019. Le coup de frein en RHD a provoqué un recul des importations de 7,6 % sur les sept premiers mois de 2020, mais cette baisse est « totalement artificielle », pour Jean-Yves Ménard. « Je veux rassurer tout le monde : les importations sont reparties », ironise de son côté Gilles Huttepain, vice-président de la FIA (industriels). 

L'étiquetage de l'origine en janvier 2021 ?

Dans une conjoncture toujours marquée par le poids des importations, l'interprofession a marqué son impatience de voir aboutir une demande de longue date : l'étiquetage obligatoire de l'origine en restauration. « C'est en cours, mais il faut que ça aille plus vite », a commenté le président d'Anvol, Jean-Michel Schaeffer. « Le décret devait paraître en septembre, puis être notifié à Bruxelles », explique Anne Richard, la directrice d'Anvol. Mais ce texte est entré « en confrontation » avec un amendement ajouté dans la loi sur la transparence de l'information sur les produits alimentaires, prévoyant la même mesure. « On se retrouve avec un nouveau décret, aujourd'hui devant le Conseil d'État », souffle Anne Richard. Après ce télescopage législatif, Jean-Michel Schaeffer espère une application « en janvier 2021 » pour les viandes crues. « Le combat continue au niveau européen pour étendre l'affichage de l'origine aux produits transformés », ajoute l'éleveur alsacien.

600 M€ d'investissements nécessaires

L'affichage de l'origine occupe une place clé dans le projet d'Anvol, qui ambitionne de reconquérir 10 % de parts de marché aux importations dans les dix ans. Le tout en transformant les élevages pour répondre aux attentes sociétales sur le bien-être animal. Rénovation ou construction de poulaillers, intégration de lumière naturelle, Jean-Michel Schaeffer demande un « soutien financier » via le plan de relance. Anvol a chiffré les besoins à 600 millions d'euros (dont 550 au niveau des élevages). Dans les prochaines années, la filière devra résoudre « la quadrature du cercle », estime Gilles Huttepain. D'un côté, une restauration en croissance, forte consommatrice de découpes de volailles standard, et qui « favorise les importations », d'après Jean-Michel Schaeffer. De l'autre, des attentes sociétales qui ne se traduisent pas encore en performances commerciales. Entre les deux, la filière volailles veut satisfaire tous les marchés... avec pour boussole le consommateur. « La seule réponse qu'on peut donner, c'est celle au consommateur », tranche Jean-Michel Schaeffer.

Y.G.