Pollution
Pour respirer de mieux en mieux

Isabelle Doucet
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Le troisième Plan de protection de l’atmosphère de Grenoble Alpes Dauphiné intègre pour la première fois les rejets d’ammoniac.

Pour respirer de mieux en mieux
Le préfet de l'Isère Laurent Prévost (à droite) et les vice-présidents des communautés de communes lors de la présentation du troisième plan de protection de l'atmosphère.

La grande région grenobloise respire mieux.
Les données 2020 font état d’une baisse générale des émissions de polluants atmosphériques, excepté pour l’ozone (Observatoire régional climat air énergie).
C’est une bonne nouvelle à la veille de la mise en œuvre du troisième Plan de protection de l’atmosphère (PPA) de Grenoble Alpes Dauphiné.
« Grenoble est sortie du contentieux européen sur la qualité de l’air », annonce Laurent Prévost, préfet de l’Isère en présentant ce nouveau plan, fin décembre 2022. « Il considère toutes les activités, détaille-t-il : industrie, résidentiel-tertiaire, agriculture, mobilité-urbanisme et comporte un volet communication. » Plus ambitieux, le PPA couvre aussi 297 communes, soit 27 de plus que le précédent, et huit EPCI, soit 850 000 habitants.
Sur les 32 actions retenues, quatre concernent l’agriculture. Elles sont incitatives.
D’autres secteurs, comme le résidentiel et le chauffage au bois, font l’objet de mesures spécifiques dans le cadre de la loi climat résilience.
Fort des relevés encourageants de ces dernières années, ce troisième PPA cale ses objectifs sur les valeurs guides de l’OMS publiées en septembre 2021, qui vont au-delà des valeurs réglementaires.

Réduire les émissions d’ammoniac

D’ici 2027, le but est de réduire de 66 % les émissions de dioxyde d’azote (NO2) et de 50 % les composés organiques volatils non méthaniques (COVnM) par rapport à une valeur de référence 2005 ; de 50 % les émissions de particules fines PM 10 et PM 2,5 par rapport à une valeur de référence 2020 ; et de 11 % les émissions d’ammoniac (NH3) chaque année. Ce dernier objectif est une nouveauté comparée aux précédents plans.
Or, c’est l’agriculture qui est le principal émetteur de ce polluant, qui représente 9 % de la pollution totale.
« Certaines mesures sont plus fortes que d’autres », annonce le préfet qui cite le soutien à la rénovation thermique des bâtiments s’appuyant sur le dispositif France rénov.
Le plan amplifie le déploiement de la subvention pour le remplacement des appareils de chauffage au bois non performants, l’interdiction d’installation de ces appareils dans le périmètre du PPA, l’accompagnement de la métropole dans la mise en place de la ZFE (zones à faibles émissions) par le soutien aux mobilités durables et à la mise en place de contrôles automatisés ou encore, le soutien aux mobilités douces dans le cadre du contrat de plan État-Région.
Les foyers peuvent être directement concernés et bénéficier d’une prime de conversion de 1 000 euros pour l’achat d’un véhicule propre si une personne travaille dans la ZFE ; les ménages modestes peuvent aussi obtenir un bonus écologique de 7 000 euros ; un prêt à taux zéro est lancé en janvier et pour deux ans.

Une ZFE méconnue

La mise en place de la ZFE est prévue en juillet 2023.
Les résultats de la concertation, qui s’est déroulée d’octobre à décembre 2022, seront connus en début d’année. Mais le dispositif reste largement méconnu des concitoyens. Les réflexions ont porté sur les horaires et les accès, les dérogations, les axes exemptés, les mesures d’accompagnement et les deux roues.
Du côté des communautés de communes, ce troisième PPA suscite des réflexions.
Le Grésivaudan accompagne la démarche en travaillant sur la qualité des produits de sa filière bois énergie.
Mais il pointe aussi quelques contrariétés : la loi ZAN (Zéro artificialisation nette) et les PPRI (plan de prévention des risques inondation), en réduisant la consommation de foncier « limitent les installations d’énergies alternatives », explique Philippe Lorimier, vice-président.
Il dénonce aussi « l’aberration d’une autoroute A41 payante et sous-utilisée » au détriment de l’encombrement des routes départementales de la vallée.
Albert Buisson, maire de l’Albenc et vice-président de Saint-Marcellin-Vercors Isère communauté, plaide pour les territoires ruraux et le soutien à l’agriculture pour favoriser les pratiques vertueuses.
Il demande aussi, au sujet de la ZFE, à ce que « les gens puissent encore entrer dans Grenoble ».

Isabelle Doucet

Une baisse généralisée entre 2000 et 2019 en région Auvergne-Rhône-Alpes

Les oxydes d’azote (NOX) : -56 %
Les particules fines de taille inférieure à 10 µm (PM10) et 2,5 µm (PM2.5) : -38 % et – 43 %
Les composés organiques volatils non méthaniques (COVNM) : - 55 %
Le dioxyde de Soufre (SO2) : - 70 %
L’ammoniac (NH3) : -7 %
Seul l’ozone (O3), polluant secondaire, est en augmentation
(Source : Observatoire régional climat air énergie)

Des moyens pour les bonnes pratiques

Deux défis concernent plus particulièrement le domaine agricole.

« De la pédagogie et de l’information », indique Thierry Blanchet, secrétaire de la Chambre d’agriculture de l’Isère.
Les deux défis concernant l’agriculture dans ce nouveau plan de protection de l’atmosphère ciblent « la diffusion des bonnes pratiques pour réduire les émissions d’ammoniac (NH3) » et « la limitation des brûlages ».
La chambre d’agriculture se montre attentive à la prise en compte des rejets d’ammoniac et autres gaz azotés issus des épandages d’effluents d’élevage, d’engrais minéraux et organiques.
D’autant que ce sont les seuls gaz polluants dont la valeur ne baisse pas. « Nous attendons un accompagnement financier pour mettre en place des actions de sensibilisation sur les bonnes pratiques, mais les agriculteurs ont aussi besoin d’aides financières pour l’achat de matériel performant et au plus près des besoins des plantes », souligne l’élu.
« De nouvelles communes sont intégrées, cela veut dire que de nouvelles exploitations sont concernées », note Jean-François Perret, chef du service accompagnement des transitions des systèmes agricoles.
Il souligne que les précédentes versions des PPA intégraient déjà l’interdiction de brûlage des végétaux, sauf dérogation en cas de présence de pathogènes sur les végétaux, « une mesure déjà bien observée par les agriculteurs ».
« Après 2027, ces mesures peuvent aller en s’accentuant, reprend Thierry Blanchet, et il ne faudra pas être pris au dépourvu. »

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