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Des vies bouleversées par le loup

Isabelle Doucet
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Tournées auprès des éleveurs isérois, une série de vidéos témoigne du bouleversement de leur vie professionnelle comme prersonnelle en raison de la pression du loup. A découvrir dès ce vendredi sur le site de Terre Dauphinoise.

Des vies bouleversées par le loup
Cédric Fraux, éleveur à Lavaldens, dont le troupeau a plusieurs fois été attaqué par le loup, livre son témoignage en vidéo.

A partir du mois de juin, la FDSEA de l’Isère propose une série de portraits vidéo d’éleveurs confrontés à la prédation. 
Le but : informer le grand public de la réalité de ce que vivent ces éleveurs, de leur ressenti face aux attaques du loup, des impacts sur leur vie personnelle et sur la vie de leur exploitation. 
« Les éleveurs racontent beaucoup de choses », rapporte Manon Reichenbach, stagiaire en charge de recueillir la parole des professionnels.
Les vidéos seront proposées en deux formats, un court diffusé sur les réseaux sociaux et un plus long posté toutes les semaines sur le site de la FDSEA de l’Isère et de Terre Dauphinoise. La première vidéo sera mise en ligne ce vendredi.

La boule au ventre

Pour l’heure, six éleveuses et éleveurs ont été interviewés.
Tous racontent leurs vies bouleversées par la prédation. « Se protéger du loup réclame beaucoup plus de temps de travail, du coup, ils ou elles sont moins chez eux, et voient très peu leurs enfants », raconte la vidéaste.
Les témoignages varient en fonction de la situation des éleveurs confrontés au loup.
Ils expliquent leur façon de travailler, les moyens de protection qu’ils ont mis en place - les chiens et les clôtures – et ce que cela implique, les attaques qu’ils ont subies.
« Il y a un impact sur la vie personnelle, sur leur travail, sur leur mental. C’est récurrent. Ces personnes sont stressées car elles se demandent chaque matin en se levant ce qu’elles vont trouver dans leurs parcs », indique Manon Reichenbach.
« Une éleveuse me racontait qu’elle consultait souvent MapLoup(1) pour se tenir informée, mais à chaque fois qu’une nouvelle attaque était notée, cela lui mettait la boule au ventre », poursuit-elle.

Tout ce à quoi on ne pense pas

Les professionnels font aussi part de leurs attentes vis-à-vis du syndicat dont ils souhaiteraient plus d’action ou des politiques dont ils aimeraient se sentir plus écoutés et aidés. Ils apprécient qu’on leur donne ainsi la parole. 
La stagiaire de la FDSEA rapporte qu’elle « a découvert beaucoup de choses sur le dossier prédation, notamment les problèmes posés par les patous et la cohabitation avec les randonneurs. Et puis, il a tout ce à quoi on ne pense pas comme les difficultés liées aux constats, l’existence de différentes zones de prédation, la présence des chiens à l’année dans les exploitations, l’impact de la présence du loup sur les paysages, là où les bêtes ne peuvent plus pâturer, les problèmes de règlementation, d’indemnisation, tout le côté pratique et complexe. »
Les vidéos dressent aussi le constat de toute la batterie de moyens que les éleveurs ont mis en place… pour une efficacité des plus limitées. 

Isabelle Doucet

(1) MapLoup : Carte des suspicions d'attaques de l'année en cours par le loup dans des régions Auvergne-Rhône-Alpes et Sud-Paca.

Point de vue / Une menace permanente 

Espèce protégée, le loup influe sur tout l'écosystème montagnard sans être inquiété.

Christophe Gabert, référent loup pour la FDSEA de l’Isère, répète depuis longtemps « qu’il faut que les éleveurs communiquent et fassent entendre leurs arguments ». Car ils sont devenus une des cibles des écologistes, estime l’éleveur de Chirens. « Il faut dire les choses, même si elles sont exacerbées, mais je suis le dossier depuis longtemps et rien n’avance. »
Interviewé pour la série de vidéos de la FDSEA, il explique que le loup représente « une menace permanente, un stress énorme, qui transforme la mentalité des éleveurs, qui finissent par tout prendre au premier degré. Tout l’entourage en pâti et ils en peuvent plus faire de la vente directe tellement ils sont à cran. »
Il dénonce le refus de l’administration d‘accorder des tirs de défense aux éleveurs bovins au motif qu’il faut avoir déjà subi une attaque pour déclencher le dispositif.
Élevage, chasse, fréquentation des espaces : le loup influe sur tout l’écosystème, insiste Christophe Gabert. « Qu’on ne nous dise pas que cela se passe bien à l’étranger. On retrouve partout les mêmes problèmes de prédation et cela ne se passe bien à aucun endroit. » Il estime que pour enrayer la prédation « la seule solution est le prélèvement », avant d’ajouter « mais l’État fait de l’élevage de loup en vue de l’utiliser comme arme à destination ». Dans les faits, c’est le pastoralisme qui est remis en cause.
L’éleveur rappelle enfin que le « premier problème est la convention de Berne » qui protège le loup au niveau international. « Et la directive habitat (où il est classé d’intérêt communautaire ndlr) ne bougera que quand la Convention de Berne bougera, ce qui n’est pas prévu, sauf à obtenir l’unanimité des 27… »
ID