Valorisation
saint félicien

 Etude de caractérisation du saint-félicien au lait de vache, diagnostics d’exploitations, rédaction d’un cahier des charges, le comité de promotion de ce fromage œuvre en vue de déposer une demande de reconnaissance en IGP. 

saint félicien
Le volet « transformation » du cahier des charges du saint-félicien est à présent défini dans ses grandes lignes. Pour le volet « production », les discussions se poursuivent.

Le projet de reconnaissance du Saint-félicien au lait de vache en indication géographique protégée (IGP) a été ralenti par le confinement. « Mais nous avons quand même pu mener de gros chantiers cette année », indique Thomas Huver, conseiller filière lait à la chambre d’agriculture de l’Isère et animateur de ce projet. Ont été entrepris une étude de caractérisation organoleptique du Saint-félicien (une obligation pour la démarche IGP) et des diagnostics d’exploitations. Les résultats ont été donnés le 30 octobre lors de l’assemblée générale dématérialisée du comité de promotion de ce fromage (association créée en 2018 regroupant producteurs et opérateurs laitiers). 

Caractérisation organoleptique

Réalisée par Agro Sens Conseil (société experte dans l’analyse sensorielle), l’étude a comparé le saint-félicien à trois autres fromages en appellation, le saint-marcellin, le brillat-savarin et le camembert. Elle était destinée, en priorité, à déterminer ses spécificités organoleptiques, qui le distinguent des trois autres fromages. Cela en vue d’étayer le projet de demande d’IGP. Elle visait aussi à mieux connaître l’incidence de certains facteurs tels que la teneur en matière grasse et l’origine des fabrications (coopératives ou industriels, ateliers fermiers ou artisanaux). Pour cette étude, 10 dégustateurs qualifiés et indépendants ont évalué 15 fromages saint-félicien (5 laitiers, 5 fermiers ou artisanaux et 5 double crème), 5 saint-marcellin, 5  brillat-savarin et 5 camembert. Et ce, avec 18 descripteurs évalués pour l’odeur, la texture, le goût et l’arôme en bouche. C’est-à-dire une approche multidimensionnelle avec 5 400 données.

Des traits de caractère

L’étude conclut que, vis-à-vis des trois autres appellations, le saint-félicien présente bien une singularité organoleptique, des traits de caractère qui lui sont propres. C’est cependant avec le saint-marcellin qu’il présente le plus de proximité. Tous deux se situent dans une position intermédiaire entre le camembert et le  brillat-savarin. Ils s’en distinguent toutefois avec une croûte moins dissociée et perceptible en fin de bouche et une note « champignon » moins marquée en bouche. Les fabrications laitières double crème, elles, présentent une texture moins ferme, plus fondante et moins collante que les autres types de saint-félicien. Leurs caractéristiques restent dans la famille du saint-marcellin tout en se rapprochant de celles du  brillat-savarin.

L’étude identifie aussi une certaine diversité organoleptique au sein de l’appellation Saint-Félicien (selon le transformateur, le stade d’affinage, la maîtrise technologique… ), notamment en fonction de la teneur en matière grasse ou de l’origine de fabrication (fermier ou laitier). Mais elle ne remet pas en cause les spécificités globales établies. « Il n’y a pas d’incohérences », signale Thomas Huver.

Rédaction du cahier des charges

Le volet « transformation » du cahier des charges est à présent défini dans ses grandes lignes (process, méthodologie… ), « à quelques éléments près ». Le volet « production », lui, est moins avancé. Les discussions se poursuivent sur les critères à prendre en compte. Afin de recueillir des données chiffrées, 50 diagnostics d’exploitations ont été réalisés cette année par les chambres d’agriculture de la Drôme et l’Isère ainsi qu’Adice. Et le cahier des charges du saint-marcellin a été pris comme base de travail. Cependant, suite aux résultats présentés en assemblée générale, une réflexion est en cours : tout en s’appuyant sur celui du Saint Marcellin, ne faudrait-il pas adapter le cahier des charges du Saint-félicien afin qu’il demeure accessible aux exploitations de demain ? C’est-à-dire prendre en compte des points posant problème sur les exploitations, tels que l’impact de la sécheresse et l’évolution de leur système d’élevage, la part de l’herbe dans l’alimentation des vaches. Par exemple, peut-être inscrire dans le cahier des charges un critère de 180 jours de pâture par an sous réserve que les conditions climatiques le permettent. « Il faut garder une certaine souplesse pour pouvoir continuer à s’adapter car, avec le changement climatique, on ne sait quelle sera la disponibilité en eau dans le futur », observe le président du comité de promotion du saint-félicien, Jean-Michel Bouchard. Il considère aussi « obligatoire » d’introduire comme critères le bien-être animal, bien identifiable par les consommateurs, et la haute valeur environnementale (HVE)…

En tout cas, le comité de promotion du saint-félicien reste mobilisé et s’active pour faire avancer la démarche d’IGP. Il espère pouvoir déposer auprès de l’Inao un premier dossier en 2021. 

 

Annie Laurie

 

Repères /

- Production de saint-félicien au lait de vache estimée entre 3 000 et 3 200 tonnes par an.

- 676 communes sont concernées par le projet d’IGP : en Ardèche, Drôme, Isère, dans le Rhône, ainsi que quelques-unes de la Savoie et l’Ain.

- Un potentiel de 180 exploitations laitières, soit plus de 300 éleveurs.

- Transformateurs engagés dans la démarche d’IGP : la Fromagerie alpine (Romans - 26), Vercors lait (Villard-de-Lans - 38), L’Etoile du Vercors (Saint-Just-de-Claix - 38), La Fromagerie du Dauphiné (Têche - 38), les établissements Beillevaire (anciennement Fromagerie du Vivarais - 07), la Fromagerie Sainte-Colombe (Saint-Genix-sur-Guiers - 73), la Fromagerie Jeandin (Saint-Symphorien-sur-Coise - 69), pour ce qui est des coopératives et industriels. S’ajoute une dizaine de producteurs fermiers et d’artisans.