Chambres agriculture Rhône Méditerranée
Porter la singularité méditerranéenne

L’association Carm, qui réunit les chambres régionales d’agriculture d’Auvergne-Rhône-Alpes, Paca et Occitanie, a à cœur de se porter porte-parole d’une agriculture méditerranéenne spécifique.

Porter la singularité méditerranéenne
Légende photo : André Bernard, Christian Gely, Magali Saumade, Gilbert Guignand, Sébastien Windsor, Georgia Lambertin et Jean-Pierre Royannez lors de la rencontre Carm, le 29 mars dernier, à Orange (Vaucluse) ©C. Z.

Le 29 mars dernier, au lycée viticole d'Orange (Vaucluse), les Chambres d'agriculture régionales (CRA) Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Paca, réunies dans l'association Chambres agriculture Rhône Méditerranée (Carm) ont souhaité porter à connaissance de leurs partenaires leurs réflexions et leurs propositions de solutions. Magali Saumade, présidente de la chambre d'agriculture du Gard, a rappelé en quoi cette association était « importante pour se faire le porte-parole d'une agriculture méditerranéenne spécifique, notamment dans ses composantes eau et pastoralisme ». De son côté, Gilbert Guignand, président de la Cra Auvergne-Rhône-Alpes saluait ce qui les reliait, en premier lieu « ce fleuve Rhône, qui a toujours de l'eau et permet la production de produits de valeur que l'on partage entre agriculture, industrie, collectivité et citoyens. À nous trois, nous pesons face aux autres décideurs, tels que la Compagnie nationale du Rhône ou l'Agence de l'eau, avec lesquelles nous pouvons discuter. Cette association et ce fleuve, nous devons les entretenir. C'est pourquoi il faut maintenir et soutenir une économie agricole forte que nous appelons de nos vœux, ne serait-ce que pour entretenir des espaces économiques face notamment au risque d'incendie croissant en ces temps de changement climatique ». André Bernard, président de la Cra Paca, a, pour sa part, rappelé certaines missions de Carm : «  défendre les préoccupations de notre agriculture méditerranéenne et porter des débats spécifiques au niveau national, où le pastoralisme en zone sèche, la viticulture et les fruits et légumes n'ont pas toujours leur place ». Poursuivant, le Vauclusien rappelle que « les chambres d’agriculture sont essentielles pour assurer notre souveraineté alimentaire, portée en étendard par tous. Avec la biomasse et l'agrivoltaïsme, nous protégeons nos cultures et nos collaborateurs, nous produisons des aliments et de l'énergie, le tout sur de l'eau renouvelable, stockée et non prise dans des nappes. Ce sont des arguments forts pour des industriels qui aujourd'hui, réinventent leur implantation géographique et se tournent vers nous ».

Des outils pratiques

D'autant que ces trois chambres régionales, en lien avec les chambres départementales, n'ont pas chômé ces dernières années pour mettre en place des outils visant la connaissance et l'atténuation de l'impact du changement climatique. Avec le Criiam Sud en région Paca, l'outil 'Oracle' en région Occitanie, le projet AP3C en région Aura ou encore le réseau Red – recherche expérimentation développement –Paca, tous les services des Chambres de ces trois régions ont eu à cœur de compiler des données historiques permettant désormais de développer des outils afin d’« être proactifs sur le changement climatique, sur tous nos territoires, nos filières, pour développer des indicateurs agro climatiques, d'impact agronomique, d'adaptation, sans compter des indicateurs d'atténuation », rappelait Pierre Goulard, de la CRA Occitanie.

"Urgence" et "eau"

Pour Georgia Lambertin, présidente de la chambre d'agriculture du Vaucluse, il manquait cependant un mot fort dans cette matinée de réflexion. « Ce mot, c'est urgence. Sur les exploitations, les agriculteurs vivent diverses fortunes impactées par le changement climatique, l'augmentation des charges, les problèmes économiques. Comment faire pour que la richesse agricole arrive sur l'exploitation ? », s'inquiète l'arboricultrice arguant que les réflexions doivent se mener à l’échelle du territoire. avec des acteurs « qui réfléchissent ensemble dans tous les pans économiques, pour poser l'avenir qu'ils veulent sur leur territoire » et par filière « en fédérant toutes les espèces pour monter des projets » cohérents.

Quant à Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d'agriculture de la Drôme, il a résumé de manière assez pragmatique les clés de la réussite. Selon lui, il faut « de l'argent, du dialogue et des partenariats », prenant comme exemple l'eau. « Depuis au moins une décennie, l'agriculture fait des économies énormes d'eau. Mais on ne l'a pas assez mis en avant. Alors après 2022, c'est assez énervant de s'entendre dire qu'il faut qu'on s'adapte et que l'on doit réduire notre consommation d'eau. Certes, nous devons aussi travailler autrement, parler de rétention d'eau plutôt que de retenues, réfléchir aussi en termes de sol et d'infiltration. Mais nous faire dicter ce que l'on doit faire, ça suffit ! On a besoin d'un contrat de confiance. »

Céline Zambujo

Grand témoin /

Une méthode « partagée »

En grand témoin de la journée Carm organisée le 29 mars (lire ci-dessus), le Normand Sébastien Windsor, président de chambre agriculture France, a salué ces travaux et la méthodologie mise en musique par Carm.

« Ce n'est pas un hasard si les mouvements agricoles de ces dernières semaines sont nés ici. Car ces trois régions sont particulièrement impactées par le changement climatique, avec des productions sans revalorisation de prix, à l'image des fruits et légumes, malgré une montée en gamme portée par le bio, aujourd'hui dans l'impasse. Dans ces manifestations, ce que les agriculteurs expriment, ce sont aussi ces inquiétudes vis-à-vis du changement climatique et du revenu. » Pour le président national, il est vital « d'accélérer, plus vite et plus fort » sur les alternatives à mettre en œuvre. « Mais, pour être efficace, il faut de la méthode ce qui implique d'une part, que l'on doit comprendre et de façon assez fine, les conséquences sur nos micros-territoires ; et d'autre part, nous devons mesurer l'impact sur nos cultures. Facile à dire, mais avec les nombreuses et multiples cultures mineures présentent sur vos trois aires d'action, sans compter les ravageurs qui remontent du Sud dans un contexte de raréfaction des outils sanitaires de lutte. » Au-delà du partage d'un diagnostic et d'une méthode, Sébastien Windsor note qu'il faut aller aussi plus vite pour transférer ces leviers dans les cours des exploitations, « en proposant des bouts de solutions qui, agrégés, offrent une sortie économique, en collaborant de façon plus efficiente pour en pas refaire des travaux portés ailleurs, y compris hors de France ». Sur les leviers, la ferme France a déjà fait beaucoup (génétique, numérique), « il faut désormais être raccord au niveau législatif entre la France et l'Union européenne ».

C. Z.