Energies renouvelables
Les fermes ont de l’énergie

Isabelle Doucet
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Le Crédit agricole Sud Rhône Alpes accompagne les projets photovoltaïques et de méthanisation portés par les agriculteurs en les conseillant dans leurs choix.

Les fermes ont de l’énergie
Caroline Brenas et Franck Julien, respectivement chargée des relations et directeur du marché agricole du Crédit agricole Sud Rhône Alpes, lors des rendez-vous de Beaucroissant.

Éolien, biomasse, biocarburant, photovoltaïque ou méthanisation sont autant de productions d’énergies renouvelables qui intéressent l’agriculture. « L’enjeu est important, indique Franck Julien, directeur du marché agricole du Crédit agricole Sud Rhône Alpes qui finance certaines installations. En 2030, le mix énergétique s’élèvera à 33% de la production dont 40% de la part de la production électrique. »
Alors, louer un terrain où est implantée une éolienne, produire du bois énergie, des céréales destinées aux biocarburants : le champ des possibles est assez large. Le Crédit agricole a choisi d’accompagner ses clients agriculteurs sur les dossiers de projets photovoltaïques et de méthanisation. La banque en a rappelé les grands principes lors des Rendez-vous de l’agriculture, au mois de septembre à Beaucroissant. 

La fiabilité du photovoltaïque

« Le photovoltaïque se développe depuis 15 ans dans les exploitations, reprend Frank Julien. Très incitatif dans les années 2008-2009 grâce au prix de rachat destiné à lancer l’activité, le système bénéficie aujourd’hui du recul et a prouvé sa fiabilité. Transformer les rayons de soleil en énergie, c’est simple et efficace. »
Les installations de panneaux photovoltaïques peuvent recouvrir des bâtiments de stockage, d’élevage, des serres. Existent aussi des trackers solaires ou encore des couvertures partielles de cultures pérennes. 
L’exploitation peut soit louer ses toitures, soit aménager son installation pour vendre ou auto consommer l’énergie produite. 

Complément de revenu

« Le système où les panneaux appartiennent au producteur d’énergie se développe beaucoup, assure Franck Julien. Il s’agit d’un bail emphytéotique ou d’un bail à construire et d’un contrat d’usage d’une durée de 15 ans. A l’issue des 15 ans, l’exploitant agricole est propriétaire des panneaux et du bâtiment et perçoit le fruit de la production électrique. » Dans le cas où l’exploitant construit lui-même son installation, revendra l’électricité pour partie ou en intégralité, ou choisira de l’utiliser en autoconsommation. « Cela peut constituer un complément de revenu, d’autant que le coût de l’énergie va augmenter », fait remarquer le banquier. 
Le dossier mérite d’être étudié en fonction des besoins qui détermineront la puissance d’installation tout en tenant compte de la surface de la toiture. Il faut 6 à 7 m2 de panneaux pour produire 1 kWc (kilowatt-crête). Certaines filières, comme l’aviculture, présentent des rendements intéressants, indique Franck Julien.

Attention au coût de raccordement

« Dans nos territoires, les rendements peuvent couvrir les annuités et laisser de la trésorerie en plus », affirme-t-il. Les investissements portent sur la pose des panneaux solaires et onduleurs, la construction du bâtiment et le raccordement Enedis. Il en coûte environ 100 à 120 000 euros pour la seule pose de panneaux d’un projet à 100 kWc.
Une attention sera portée au coût du raccordement au réseau. Il faut également compter avec les charges (assurances et maintenance), soit 10 à 20% d’un chiffre d’affaires estimé à environ 12 000 euros (pour 100 kWc) par an. 
D’autres systèmes, comme les serres photovoltaïques, sont expérimentés en Drôme, à Etoile-sur-Rhône et dans certains départements du sud de la France. Ils sont adaptés à des productions comme les kiwis ou les framboises.
Le point de vigilance, tant pour la banque que pour l’administration qui délivre les autorisations, est que l’installation ne serve pas de prétexte. « Le principe est de concilier production d’énergie et production agricole sur une même surface foncière et de protéger les plantes. En arboriculture et en viticulture, l’orientation des panneaux est gérée par des algorithmes », explique le responsable. 
Quant aux trackers, qui sont des panneaux qui suivent le soleil fixés sur un mât, il fait valoir leur emprise réduite au sol. 
Quel que soit le projet, Franck Julien avertit du long parcours et des différents niveaux d’accompagnement, depuis l’exploitant qui décide de tout mener seul jusqu’à une assistance de A à Z. Il délivre deux conseils : ne pas se mettre de freins et se poser les bonnes questions. 

Isabelle Doucet

Méthanisation / L’entente et l’acceptation
Le méthaniseur d'Apprieu en Isère.

Méthanisation / L’entente et l’acceptation

Les très lourds projets de méthanisation méritent une réflexion et un accompagnement très en amont.

Les dossiers de méthanisation relèvent quant à eux de projets industriels dont les montants des investissements oscillent entre 5 et 7 millions d’euros. Valorisation économique des déchets, réponse au traitement des effluents d’élevage, le bénéfice pour les exploitations est certain.
Mais les projets se heurtent souvent à l’acceptation sociétale alors même que les territoires ont l’obligation de répondre aux enjeux de demandes en énergies renouvelables. 
Deux systèmes de production de biogaz existent. La cogénération est la transformation du gaz produit par l’unité en électricité ou en chaleur. L’injection consiste au traitement du biométhane directement à la station avant son injection dans le réseau. 
« Le premier frein n’est pas technique, mais sociétal », insiste Franck Julien, directeur du marché agricole du  Crédit agricole Sud Rhône Alpes.
Dès lors, la communication prime dans ce type de projet, tout autant que l’entente entre associés. Un projet de méthanisation se conçoit très en amont. « Il faut être blindé. Le collectif doit être assez solide, avertit le responsable. C’est pourtant une vraie solution de production locale et d’indépendance énergétique. »

Visiter plusieurs sites

La dimension du projet doit être mûrement réfléchie. En dépendent le retour sur investissement, la capacité d’alimentation des agriculteurs, la qualité et la nature des intrants, mais aussi le temps de travail dédié à l’unité.
Franck Julien recommande de visiter plusieurs unités avant de se lancer dans un projet et d’écouter le retour d’expérience des porteurs de projets.
Approbation locale, étude de faisabilité, de rentabilité, choix des constructeurs, obligations règlementaires : ces dossiers très lourds peuvent être accompagnés par une filiale dédiée du Crédit agricole.
Le responsable met en garde les agriculteurs face aux tentations de privatisation par des capitaux extérieurs, puis ajoute : « A la fin il y va de la rentabilité et de la sécurisation des exploitations. »

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