Elevage
« Il n’y a plus personne pour faire naître les bêtes »

Isabelle Doucet
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Fidèle de la Foire de Beaucroissant, le marchand de bestiaux Max Josserand pose toujours un regard juste sur la situation de l’élevage en France.

« Il n’y a plus personne pour faire naître les bêtes »
Max Josserand, défenseur infatigable de l'élevage.

« On a tous les moyens modernes de communication, mais rien ne vaut un échange assis sur une botte de paille. Retrouver l’espace de liberté et le lieu de rencontre que représente Beaucroissant est inestimable. »
Max Josserand, négociant en bestiaux à Saint-Cassien, est resté fidèle à la Beaucroissant, même s’il est le seul sur le champ de foire à encore présenter des bovins.
Sa présence, les affaires qui vont bon train, le ballet incessant autour de son emplacement, feraient bien mentir des marchands de bétail qui considèrent le foirail comme d’un autre temps.

 


Au plus près de la vie des exploitations, où il intervient aussi dans les moments de crise, Max Josserand pose un regard d’expert sur la situation de l’élevage à l’épreuve de la sécheresse.
« Ce n’est pas comme en 1976. La nourriture est certes un handicap, mais il n’est pas majeur, hormis pour quelques exploitations qui n’ont plus de fourrage, observe-t-il. Mais globalement, les fermes ont du stock grâce aux méthodes d’ensilage et d’enrubannage qui se sont modernisées. Et en 76, les cours s’étaient effondrés, ce qui n’est pas le cas cette année. En revanche, j’ai beaucoup de commandes et il manque de bétail. À force de ne pas être reconnus, depuis 10 ou 15 ans, les éleveurs se sont découragés et il n’y a plus personne pour faire naître les bêtes. »
Il explique que les abattoirs manquent d’animaux pour répondre aux besoins de l’industrie agroalimentaire et que la demande à l’export est aussi très forte.
C’est la raison pour laquelle se développent les bandes d’engraissement dans les fermes, mises en place par les acteurs de l’aval ; une des solutions pour soutenir les exigences du marché.

Vaches de demain

Avec humour, Max Josserand présentait sur la foire des vaches d’aujourd’hui : des charolaises symboliquement rattachées à un tuyau et une bonbonne de gaz pour le rôle de restitution qu’elles apportent à la nature, en énergie, biodiversité, fertilisant, préservation des territoires etc.
À côté d’elles des vaches de demain « en planche, bien vertes, bien belles, avec leurs cornes en lyre, mais sur un lit de ronces, excellent combustible pour les incendies », explique le négociant.
Infatigable défenseur de l’élevage, il fait le constat de son repli et de ses conséquences. Il ajoute : « Il y a 20 ou 30 ans, on était fiers de présenter des animaux à Beaucroissant, aujourd’hui, les gens en ont honte ».
Max Josserand plaide « pour que soient redonnées leurs lettres de noblesse aux éleveurs. » Il souligne « le rôle essentiel d’un élevage mesuré dans le respect d’un juste équilibre entre l’humain, l’animal et la nature ».

Isabelle Doucet