Pastoralisme
Accompagner la santé humaine face au loup

Morgane Poulet
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Le 31 mai, les résultats d’une étude sur la prédation ont été présentés en visioconférence et des facteurs de risque identifiés.

Accompagner la santé humaine face au loup
Les résultats d'une étude sur le loup et la santé humaine ont été présentés en visioconférence le 31 mai.

Alors que plus de 70 départements français sont inscrits au plan national de protection du loup, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le lien entre santé humaine et prédation.
Le 31 mai, l’UMT pastoralisme(1), le RMT travail en agriculture(2) et la MSA ont organisé une visioconférence rapportant les résultats d’une étude sur les effets de la présence des loups et la santé des éleveurs et des bergers. Différents facteurs de risque ont ainsi été identifiés pour permettre aux autorités compétentes de pallier ces difficultés.
 
Un contexte particulier
 
« Le loup est réapparu en France en 1992 dans le Mercantour, rappelle Antoine Doré, sociologue à l’Inrae, et alors que la pression de la prédation concerne un nombre croissant d’élevages et une aire géographique en expansion, on s’interroge encore assez peu sur les effets de la présence du loup sur l’existence des éleveurs et des bergers ».
Il constate que la pression n’est d’ailleurs pas répartie de manière homogène. La moitié des attaques est aujourd’hui indemnisée et se concentre en moyenne sur 10 à 15 % des exploitations touchées. Pour le sociologue, « l’impact de la présence des loups sur la santé n’est alors pas toujours corrélé à la pression directe de la prédation. La nature et l’intensité des effets de la présence du loup sur la santé sont davantage liés au sentiment de maîtrise de la situation ».
La présence des loups rend de nouveau visibles les pratiques de garde des troupeaux, ce qui en fait un enjeu professionnel principal. En effet, révéler les difficultés des éleveurs et des bergers face à la prédation leur fait prendre le risque de se faire renvoyer l’image d’un « métier d’assisté », relève Antoine Doré. Mais cela tend aussi à « les faire entrer dans des carrières délinquantes », dans le sens où « être berger, c’est aussi être gardien de chiens de protection, donc s’enfermer dans un statut qui peut imposer la crainte ».
 
Profils différenciés
 
Pour Ludovic Martin, directeur délégué de la MSA du Languedoc, les bergers et les éleveurs sont sujets à des facteurs de risques différents. Les bergers sont soumis à « un fort engagement du corps au travail », ce qui peut conduire à des troubles musculosquelettiques. L’augmentation de la charge de travail à des moments donnés les contraint aussi à dépasser leurs horaires, à ajouter des tâches, à augmenter l’effort physique et l’engagement psychologique, l’exposition aux risques environnementaux ou encore à diminuer le temps et de la qualité du repos. « Tout cela a des conséquences sur la vie privée, car ils peuvent se retrouver isolés et la gestion de la vie de famille lors de l’estive peut être plus difficile », précise Ludovic Martin. D’autant plus que dans le secteur couvert par la MSA du Languedoc, « nous constatons une hausse des attaques depuis une dizaine d’années, précise Lionel Venezia, responsable du service de prévention des risques dans cette caisse. Avant, c’était plus ponctuel et nous accompagnions des personnes ayant subi des attaques, nous proposions une aide psychologique, mais nous n’avions pas de démarche de prévention spécifique. Nous nous concentrons désormais dessus » car la prédation modifie les conditions de réalisation du travail.
Côté éleveurs, il faut en outre prendre en compte les pics de travail, notamment lors d’agnelages ou encore de la réalisation des foins. Le temps et la qualité du repos sont aussi touchés et un glissement a ainsi lieu entre vies professionnelle et privée.
Selon Ludovic Martin, le pastoralisme est peu représenté dans les syndicats professionnels locaux, ce qui rend la protection vis-à-vis des risques plus difficile.

Morgane Poulet

 
(1) Unité mixte technologique « ressources et transformations des élevages pastoraux en territoires méditerranéens », porté par l’Idele.
(2) Réseau mixte technologique en agriculture, porté par l’Idele.