Comme en juillet 2022, la plus haute juridiction administrative a suspendu le décret interdisant aux produits végétaux d’utiliser des dénominations animales. Les juges ont reconnu la distorsion de concurrence et les pertes économiques pointées par les fabricants de similis végétaux.
Le juge des référés du Conseil d’État a suspendu, par une décision du 10 avril, le décret du 26 février interdisant aux produits végétaux d’utiliser des dénominations animales comme « steak » ou « saucisse ». En juillet 2022, un précédent texte instaurant la même mesure avait déjà été retoqué pour imprécision et insécurité juridique. Cette fois, la plus haute juridiction administrative a estimé « qu’une interdiction à compter du 1er mai porterait une atteinte grave et immédiate aux intérêts des entreprises qui commercialisent ces produits », à l’origine du recours. Celles-ci auraient dû « renoncer à des appellations utilisées de longue date, installées dans l’esprit des consommateurs et figurant sur les cartes des restaurateurs ». En particulier, les juges ont retenu que l’interdiction aurait provoqué « une baisse importante du chiffre d’affaires de deux entreprises requérantes », tout en induisant des coûts supplémentaires (changements d’emballage, cessation temporaire de ventes, etc.). Dans le même temps, leurs concurrents européens, qui ne sont pas visés par le décret, « pourront continuer à utiliser ces dénominations pour vendre leurs produits en France ».
Doute sur la légalité du texte
Par ailleurs, le Conseil d’État a estimé qu’il existe « un doute sérieux sur la possibilité d’adopter de telles mesures nationales » au regard de la réglementation européenne. Saisie par la justice française, la Cour de justice de l'Union européenne « doit se prononcer dans les prochains mois ». Les deux conditions nécessaires pour accepter le référé sont donc remplies : doute sérieux sur la légalité du décret et condition d’urgence pour les entreprises requérantes. Le verdict du Conseil d’État est « une victoire pour la filière du végétal », a réagi la marque HappyVore, une des entreprises à l’origine du recours. « La mise en application du décret aurait eu des conséquences néfastes pour la marque et la catégorie, notamment en créant une concurrence déloyale entre les entreprises qui fabriquent en France et celles qui produisent à l’étranger », expliquent ses cofondateurs Guillaume Dubois et Cédric Meston, dans un communiqué du 10 avril. Et d’annoncer que « les acteurs de la filière végétale vont également s’associer en créant une campagne de communication commune, afin de montrer leur collaboration face à cette victoire commune ».