Sécheresse
Des moutons pour dénoncer l'exclusion

Morgane Poulet
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Alors que le Vercors isérois et drômois a été déclassé de la calamité sécheresse pour 2022, les organisations agricoles des deux départements ont rencontré le sous-préfet de Vienne, à Grenoble, le 19 décembre.

Des moutons pour dénoncer l'exclusion
Une quarantaine d'agriculteurs a amené des moutons devant la préfecture, à Grenoble, pour manifester contre le déclassement du Vercors.

Le 19 décembre, une vingtaine de moutons et une quarantaine d’agriculteurs, réunis sous les bannières des FDSEA de l’Isère et de la Drôme, des chambres d’agriculture de l’Isère et de la Drôme et des Jeunes agriculteurs de l’Isère et de la Drôme, se sont campés devant la préfecture de Grenoble pour dénoncer le retrait du Vercors de la calamité sécheresse et demander sa réintégration.
Les 22 et 30 novembre, les Comité départementaux d’expertise avaient reconnu le Vercors, versants Isère et Drôme, en calamité agricole sécheresse, avec un taux de perte sur prairies de 45% pour le premier et de 41% pour le second.

Déclassement

Mais alors que les départements de Savoie, de Haute-Savoie et des Hautes-Alpes n’ont pas fait de demande pour bénéficier d’aides aux calamités agricoles, la dernière Commission nationale de gestion des risques agricoles a déclassé le Vercors.
A l’issue de la rencontre avec Denis Mauvais, sous-préfet de Vienne, Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère, a expliqué aux manifestants que le ministère de l’Agriculture avait déjà signé l’arrêté excluant le Vercors drômois et isérois du périmètre de calamités agricoles.



« Nous allons donc mener un recours gracieux pour tenter de négocier la réintégration du territoire », a-t-il ajouté.
« Ce n’est pas parce qu’il y a eu deux orages que la situation a changé. Les pertes de fourrage dans les alpages n’ont pas été prises en compte, or, il faut entrer dans un périmètre de calamités pour pallier les achats de fourrage qu’il y a eu dans la Drôme et en Isère. »
Les représentants des différents organismes agricoles ont précisé que la DDT* était à l’écoute de leurs doléances et qu’elle était du même avis que les syndicats.
Un compte-rendu sera fait et envoyé au préfet de l’Isère pour lui faire part du problème.
« Si le recours gracieux ne fonctionne pas, nous irons jusqu’au tribunal compétent pour régler ce problème. »
Sous le regard étonné des passants, les moutons ont été rembarqués à l'issue de la rencontre avec le sous-préfet.


Ils ont dit…
 
Serge Guier, secrétaire général de la FDSEA de la Drôme
« Dans la Drôme, nous avons eu des restrictions d’eau à partir de mi-avril. Il a été très difficile d’anticiper la situation et nous avons finalement été confrontés à la sécheresse. Il y a en France 5,4% de SAU agricole, tous départements confondus. Nous constituons la deuxième ressource en eau d’Europe et, pourtant, nous empêchons nos agriculteurs d’y avoir accès. »
 
Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère
« Il était très important que nous menions une action interdépartementale. La solidarité est importante pour avancer et pour montrer que nous rencontrons un problème d’ampleur. Il faut aussi mettre la pression aux assurances, qui se sont rangées du côté de l’État. »


 
Sandrine Roussin-Philibert, présidente de la FDSEA de la Drôme et vice-présidente de la Chambre d’agriculture de la Drôme
« Nous avons bien expliqué au sous-préfet de Vienne que si les agriculteurs n’avaient pas gain de cause et que le Vercors n’était pas inclus dans la zone de calamité agricole sécheresse, il ne servirait à rien de continuer une activité agricole, car les exploitants ne seraient jamais entendus. »
 
Jérémy Jallat, des Jeunes agriculteurs de l’Isère
« Il y a deux millions de prairies dans la région. Il ne faudrait pas que trop de confiance soit accordée aux satellites car ce sont les agriculteurs qui sont sur le terrain et qui constatent le mieux les problèmes liés à la sécheresse. D’autant plus que cette année pourrait servir de référence pour les 20 prochaines années, selon les climatologues. »
 
Jean-François Giguel, vendeur de foin à Saint-Laurent-en-Royans (Drôme)
« J’ai perdu 50% de mes fourrages, si l’on compare la situation à une année normale. Il y a un réel problème d’interprétation de la carte graphique, car pour l’État, le Vercors a essuyé moins de 30% de pertes, alors que nous constatons sur le terrain que les chiffres sont beaucoup plus élevés. Nous sommes aussi là aujourd’hui parce que nous sommes contre le fait que l’État ait diminué le taux de reconnaissance de calamité agricole dans la Drôme et en Isère. »
 
Mariette Bauchon, éleveuse à Valbonnais (Isère)
« Je n’ai pu récolter qu’environ 50% de mes foins et j’ai subi des pertes presque aussi importantes en prairie, par rapport à une année normale. Pour compenser ces pertes, il a fallu acheter du fourrage, descendre des alpages plus tôt mais aussi rentrer les animaux plus tôt en bergerie. Nous voulons que le Vercors soit soutenu. Il y a beaucoup d’incompréhension pour nous car au départ, il l’était. »

Morgane Poulet

*Direction départementale des territoires.