Créées en 1945, les Cuma impliquent aujourd’hui un tiers des exploitations françaises. Véronique Lucas, sociologue à l’Inrae de Rennes, revient sur l’histoire des Cuma et de leurs plus-values en agriculture depuis presque 80 ans.
« On considère les zones de polyculture-élevage comme le premier terreau d’implantation des Cuma », contextualise Véronique Lucas. Leur diversité, de fait, a été un facteur déterminant de recherche d’économie. Mais elles ne sont pas les seules. « D’autres réalités ont amené la création de Cuma, avec des besoins différents : la viticulture sur le pourtour méditerranéen, avec l’apparition de la machine à vendanger », poursuit la sociologue. La création des Cuma s’explique donc par des besoins d’équipements multiples, un besoin d’apprendre des pratiques d’autrui afin de limiter les risques, mais surtout, une recherche d’autonomie économique. « Au cours de mes travaux, j’ai découvert un tissu très riche de Cuma dans la Drôme. Cette existence est très liée à la production de semences qui a permis à de petites exploitations ou des exploitations de taille moyenne de se maintenir économiquement. La production de semences étant une culture à haute valeur ajoutée. Elles se sont donc maintenues grâce à une forte organisation en Cuma. »
D’une pensée individuelle à une réflexion commune
Si l’impulsion des créations de Cuma tient son origine dans la volonté des exploitants en polyculture-élevage d’être plus autonomes, différents acteurs ont participé à cette mutualisation de l’utilisation de matériel agricole. « La Jeunesse catholique agricole (JAC), mouvement de jeunesse et d’éducation populaire très présent dans les années 50, a participé aux nouveaux modes de mécanisation partagée que constituent les Cuma », affirme Véronique Lucas. Aujourd’hui, les agriculteurs trouvent ensemble une autonomie économique en réduisant leurs charges. Ils comparent leurs résultats, leurs besoins, partagent leur expérience... Aujourd’hui, il existe environ 12 000 Cuma en France : elles étaient 14 000 dans les années 90. D’après Véronique Lucas, « leur nombre diminue seulement de manière très minime, lors de fusions, en raison d’un manque de nombre d’adhérents dans des zones données ». On parle donc toujours d’un mouvement important, qui se maintient : la conjoncture ne fait que conforter la place des Cuma sur le territoire, avec la volatilité des cours, surtout depuis 2007 pour les produits laitiers et les intrants, qui a été un déterminant supplémentaire pour les éleveurs pour se tourner vers de nouvelles stratégies d’autonomisation.
Charlotte Bayon