À Vichy (Allier), les Régions de France réunies en congrès ont redit à quel point leur échelon était pertinent pour apporter des réponses aux citoyens. En matière agricole, cette volonté de décentralisation sera effective dès le 1er janvier prochain avec, entre autres, le pilotage régional de la politique en faveur du renouvellement des générations.
Se tourner vers les territoires alors que l’orage gronde un peu partout, c’est en substance le message qu’ont délivré les élus des conseils régionaux réunis en congrès les 15 et 16 septembre 2022, à Vichy dans l’Allier. Au Palais des congrès, toutes obédiences politiques confondues, le message a été unanime pour réclamer davantage de décentralisation. Avec comme fil conducteur, la « souveraineté », les Régions de France souhaitent se positionner en première ligne, capitalisant sur deux atouts majeurs : la fine connaissance des problématiques de terrain et la réactivité. « Plutôt que de mettre de l’argent à acheter du gaz russe ou algérien, utilisons celle de nos territoires. C’est la grande bataille sur laquelle nous sommes engagés : développer des panneaux photovoltaïques sur l’ensemble de nos bâtiments publics, inciter nos agriculteurs à faire de la méthanisation. Si on attend que cela se décide à Paris, dans deux ans, cela ne sera toujours pas mis en œuvre. Si nous pouvons décider tout ira beaucoup plus vite », a résumé Laurent Wauquiez, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Cette capacité d’agir vite au plus près des réalités des territoires, les Régions vont la déployer pleinement dès le 1er janvier prochain dans le cadre de la future politique agricole commune (2023-2027). En effet, les Régions auront la responsabilité de piloter et mettre en œuvre les mesures « non surfaciques » du second pilier de la Pac, parmi lesquelles figurent les aides en faveur du renouvellement des générations. Un dossier stratégique à l’heure où la moitié des exploitants agricoles vont partir en retraite d’ici 10 ans.
Élargir les aides à l’installation
« Afin de fournir les conditions d’un débat apaisé sur cet enjeu majeur, Régions de France a commandé un rapport pour disposer d’un panorama complet des politiques régionales en faveur de l’installation et transmission », a indiqué Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne et de la Commission agriculture, alimentation, forêt, pêche de Régions de France. En 2021, les Régions ont consacré 32 millions d’euros à l’installation et la transmission en agriculture. Aujourd’hui, elles souhaitent mobiliser d’autres outils que la dotation jeune agriculteur (DJA) au sein des programmes de développement durable afin d’élargir et augmenter le nombre de bénéficiaires potentiels en imaginant de nouveaux critères d’accès et de poursuivre des objectifs parfois plus larges que le seul renouvellement des générations, par exemple la transition agroécologique ou encore la relocalisation de l’alimentation. Sur le terrain, la profession répond « banco », à condition toutefois de s’assurer de quelques préalables : « Il nous faut jouer en équipe. Même si demain les carrières agricoles ne seront plus celles de toute une vie, il est indispensable de garantir des installations viables économiquement et vivables socialement », a indiqué Gilbert Guignand, président de la chambre régionale d’agriculture. Et d’estimer que la prise en compte d’un certain niveau de formation est une priorité absolue : « Demain les chefs d’exploitation devront avoir suffisamment d’agilité, d’ouverture d’esprit pour se remettre en cause régulièrement. Cela requiert une formation adaptée qui est aussi indispensable que celle qui consiste à savoir labourer un champ ».
Témoignage
Cette aptitude au changement, Mathieu Chevalier l’a déjà expérimenté. À 37 ans, le jeune homme a repris l’an dernier, une exploitation bovine sur la commune du Breuil, située aux portes de la montagne Bourbonnaise. Après une carrière de salarié dans l’agriculture et les travaux publics, il ne regrette pas son choix, conscient que l’aide de la Région et l’accompagnement des conseillers de la chambre d’agriculture de l’Allier ont été un plus indéniable, tout comme le stage test qu’il a effectué avec le cédant durant neuf mois. Pétri d’enthousiasme, Mathieu se sent désormais à sa place, passionné par son métier. « Il faut arrêter de décourager les jeunes. On va avoir besoin d’agriculteurs. L’aide financière est importante, mais former les jeunes à se passionner pour ce qu’ils font est à mon sens, essentiel », a-t-il témoigné.