Origine des denrées
Les producteurs isérois tiquent sur l'étiquette

Marianne Boilève
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Invitée à la journée d'échanges sur la filière laitière, la DDPP de l'Isère a précisé les nouvelles obligations des industriels en matière d'étiquetage des produits laitiers. Si le côté français du produit est mis en avant, l'origine des ingrédients primaires doit être mentionnée.

Les producteurs isérois tiquent sur l'étiquette
Pour Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'Isère, l'origine et l'étiquetage des produits sont des enjeux aussi stratégiques que le prix.

Pour Jérôme Crozat, l'origine et l'étiquetage des produits sont des enjeux aussi stratégiques que le prix.
Lors de la visio-conférence sur l'avenir de la filière laitière en Isère, le 9 avril dernier, le président de la FDSEA a proposé aux éleveurs d'engager le combat sur le terrain de l'origine des ingrédients.
« On ne veut pas tout attendre d'une loi, mais est-ce qu'on ne peut pas défendre le 100% de lait français dans les yaourts et les produits fromageables ? », a-t-il lancé à l'adresse de ses collègues et des représentants de la FNPL  conviés à la réunion virtuelle.

Ne pas induire le consommateur en erreur

Dans la filière, tout le monde a en tête la récente victoire de Lactalis sur le décret « origine du lait » (1).
D'où l'intérêt, selon Jérôme Crozat, de militer pour un étiquetage qui éclaire le consommateur. 
A en croire la DDPP de l'Isère (2), les choses sont en bonne voie. Présents à la réunion, son directeur, Stéphan Pinède, et Marie Bottiglione, contrôleuse à la Direction générale de la consommation et répression des fraudes (DGCCRF), ont rappelé la logique de la réglementation européenne.
En effet, si le décret français « origine du lait » de janvier 2017 a bien été annulé par le Conseil d'Etat en mars dernier, la réglementation européenne sur l'étiquetage reste applicable.
Or celle-ci rend obligatoire la mention de l'origine « pour les denrées alimentaires qui, à défaut d'une telle mention, pourraient induire en erreur le consommateur sur l'origine ou la provenance », a précisé l'inspectrice de la DGCCRF. 

Dispositions renforcées

Certaines dispositions communautaires ont même été récemment renforcées.
« Depuis avril 2020, les industriels ont l'obligation de mentionner l'origine ou la provenance de l'ingrédient primaire pour les produits laitiers, en particulier si les informations peuvent laisser penser que la denrée a un pays d'origine ou de provenance différent », a indiqué Marie Bottiglione.
C'est également le cas si le lieu de provenance ou le pays d'origine du produit est indiqué - un yaourt fabriqué en France par exemple  - et que l'ingrédient primaire, en l'occurrence le lait, est différent (s'il vient par exemple de Pologne). L'industriel est alors obligé de mentionner le lieu de provenance ou d'origine de l'ingrédient ou de préciser qu'il est autre que celui de la denrée alimentaire. 
« Si Lactalis ne souhaite pas mettre en avant le côté français de son produit, il n'est pas obligé d'indiquer l'origine du lait ou de la poudre, a résumé Stéphan Pinède. En revanche si, sur une plaque de beurre, il met un drapeau bleu-blanc-rouge ou tout autre élément d'origine facilement reconnaissable - par exemple un blason breton ou la silhouette du Mont-Saint-Michel -, il doit indiquer l'origine du lait (par exemple France) et l'origine de la crème (par exemple Pologne). Et ce, dans le même champ visuel, à savoir la face avant du produit, avec le même corps de caractère et non pas en tout petit. »

Contrôles en vue

Les agents de la DDPP ont illustré leur propos avec plusieurs cas pratiques. 
Pour un saint-félicien "fabriqué en France" par exemple, l'emballage doit désormais mentionner "en face avant" (sur le dessus) l'origine des ingrédients primaires (le lait et la crème), pas forcément celle de la présure.
Pour un yaourt sucré aux fruits "fabriqué en Isère", le pot devra reprendre en face avant la mention des origines des ingrédients primaires (lait, crème, poudre de lait, fruits). 
La réglementation communautaire étant toute récente, les fabricants sont en train de la mettre en place, a souligné le directeur de la DDPP de l'Isère.
« Nous avons des tâches de contrôle à réaliser, a-t-il ajouté. L'an dernier, nous avons ainsi procédé à 126 actions de contrôle en Isère, ce qui a donné lieu à deux procès-verbaux, six mises en demeure avec contre-visites et vingt rappels de réglementation. » En 2021, les agents de la DDPP vont de nouveau être mobilisés : 150 contrôles sont prévus sur le terrain.

MB

(1) Suite à une requête du groupe Lactalis demandant l'annulation par étiquetage de l'origine du lait, le Conseil d'État a jugé qu'il était « illégal d'imposer l’étiquetage géographique du lait car il n’y a pas de lien avéré entre son origine (UE, non UE) et ses propriétés » (décision du 10 mars 2021).

(2) Direction départementale de la protection des populations.