Innovation
Un atelier de transformation autonome

Isabelle Doucet
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La start-up grenobloise Fairme lance un atelier de transformation à la ferme entièrement autonome. Sa première installation est inaugurée dans le Vercors fin septembre.

Un atelier de transformation autonome
Le premier modèle de Fairme a été installé à Saint-Nizier-du-Moucherotte, dans le Vercors, au Gaec des Chamois.

C’est une maisonnette en bois de 2,5x6 mètres installée en bordure d’exploitation. L’intérieur est truffé de technologie permettant de fabriquer des produits laitiers fermiers.
Cette innovation disruptive change totalement le principe de transformation à la ferme. Elle a été mise au point par la start-up grenobloise Fairme.
Le premier modèle a été installé à Saint-Nizier-du-Moucherotte, dans le Vercors, au Gaec des Chamois. Il est entré en fonction au mois de septembre.
« Posé au plus proche de la salle de traite, cet atelier autonome transforme sur place le lait en produits laitiers : lait pasteurisé, yaourts, fromages – blancs, frais, aux herbes etc., soit une gamme de six produits. Bientôt, nous ferons de la crème, de la raclette et des tommes », annonce Nathan Freret, directeur du Développement de Fairme.

Ultra-compacte

Ce process innovant a nécessité trois ans de recherche et développement pour être mis au point.
Ultra-compacte, cette minifabrique « est capable de reproduire les gestes traditionnels, reprend le directeur du développement. Nous pratiquons par exemple l’écrémage à l’ancienne où la crème remonte doucement. » De la même manière, le robot restitue le moulage à la louche.

Nathan Freret, directeur du Développement de Fairme

La vente est également automatisée.
Sur place, Fairme dispose d’un terminal de paiement et d’un distributeur de produits fermiers automatique.
Le dispositif peut aussi fonctionner en drive fermier ou le client vient récupérer sa commande.
Un mode livraison est également possible, sur commande et dans des lieux prédéfinis.
Équipé de panneaux solaires, l’atelier couvre un tiers à la moitié de ses besoins en énergie.

Dégager un revenu

« Cela ne nous coûte rien et le lait nous est mieux payé que Sodiaal », fait valoir Didier Roland-Muquet, le plus jeune des trois associés du Gaec du Chamois.
Lorsqu’il a souhaité s’installer, il y avait du travail pour dix dans cette ferme de 100 laitières montbéliardes et de 172 ha de SAU, mais seulement des revenus pour deux personnes.
« Fairme nous permet de développer une activité et de tirer un salaire en complément de l’atelier de poules pondeuses que nous avons créé », poursuit l’éleveur.
Contacté par Fairme par courrier pour installer cette première machine, il reconnaît « s’être posé beaucoup de questions », mais a mesuré l’absence de risque. Les seuls changements seront l’accroissement des revenus de la ferme et un peu plus de fréquentation.
Le contrat passé avec Fairme est de 3 000 l de lait par mois rémunérés 600 euros/1 000 litres en prix de base, 800 euros avec les primes.
En contrepartie, l’éleveur s’engage à respecter un cahier des charges d’élevage : système herbager, agriculture biologique de préférence, privilégier des fournisseurs locaux, planter des haies etc.
« L’éleveur ne s’occupe de rien. Il n’est pas responsable sanitairement, ni commercialement de la production. Il n’y a pas de relation financière entre lui et la machine. Il ne la loue pas et on ne la lui vend pas », détaille encore Nathan Freret. L’éleveur loue seulement une parcelle de 50 m2 pour installer l’atelier.
Ce dispositif est plus particulièrement adapté aux élevages où la transformation serait possible, mais dont la charge de travail est telle que l’investissement financier et humain n’est pas envisageable.

Dix ateliers fin 2023

Fairme a été créée par Loïc Lecerf, docteur en intelligence artificielle qui a su s’entourer d’une équipe de spécialistes des techniques de transformation laitière, ingénieurs et designers.
La start-up emploie désormais 26 salariés et opérera une levée de fonds d’ici la fin de l’année pour le déploiement de son atelier.
« Le but est d’avoir dix ateliers en production d’ici fin 2023, 100 en 2024 et 200 en 2025 », reprend Nathan Freret.
Le concept est appelé à traiter d’autres produits tels que la farine et les œufs, voire les transformer pour proposer des pâtes, de la pâte à crêpes…
Lancé lors du dernier Salon de l’agriculture, Fairme devrait s’implanter en région Auvergne-Rhône-Alpes et dans d’autres bassins laitiers.
Isabelle Doucet