Horticulture
Comment naissent les roses

Isabelle Doucet
-

François Félix, rosiériste au Grand-Lemps, est aussi obtenteur, un métier rare de création de rosiers. Il présentera la rose Rêves de gosses, en présence de la marraine de l’association Véronique Jannot, ce week-end, à la première édition de Plantes en folie au château de Pupetières à Châbons.

Comment naissent les roses
Le rosiériste et obtenteur François Félix, devant une de ses créations, le rosier Rêves de gosses.

« Il faut huit ans pour créer une rose. »
François Félix est un rosiériste obtenteur, un club très fermé qui compte à peine une vingtaine d’experts de la création de rosiers en France.
Il présentera une de ses dernières roses, baptisée Rêves de gosse, à l’occasion de la première édition de Plantes en folie, qui se déroule ce week-end au château de Pupetières.
L’événement aura lieu en présence de la marraine de l’association, l’actrice Véronique Jannot.

Quatre roses en 2014

« C’est un savoir-faire qui ne s’apprend pas à l’école, un métier rare qui à la base réclame de connaître et aimer les roses », confie-t-il.
Après, tout est question d’intuition et de secrets d’hybridation bien gardés. Le rosiériste, qui dit « être un garçon né dans les roses », représente la troisième génération de producteurs de roses du Grand-Lemps, les  Roses Félix.
Mais il ne s’est lancé dans l’obtention qu’en 2006, une fois qu’il s’est estimé prêt à le faire.
Il a obtenu ses premières variétés en 2014 : quatre nouvelles roses, dont la rose Pupetières. Depuis François Félix a créé une quinzaine de roses.

La rose Pupetières
Ce qu’il aime par-dessus tout, « c’est créer des roses pour le paysage », plaide ce diplômé de l’École nationale supérieure de paysage qui a longtemps conduit une double activité de bureau d’études et d’horticulture.
Il ajoute : « Mais parfois, on trouve des choses que l’on ne cherchait pas et on s’autorise des détours. On travaille avec ce que la nature nous offre. »

Véronique Jannot, marraine

En 2022, il a baptisé à Versailles la rose Potager du roi, une hybride rosa rugosa à fleurs semi-doubles, « celle que je cherchais depuis 15 ans », glisse-t-il avec contentement.
L’an passé, il fut également l’auteur de la rose Laure Calamy, une hybride de thé rouge, pétillante et qui plaît tant au public, à l’image de l’actrice.
« Des roses ont toujours été dédiées à des personnalités », explique François Félix, régulièrement sollicité pour que ses fleurs portent des noms célèbres, à l’image de la princesse Gabriella de Monaco, un rosier buissonnant à fleurs groupées doubles de couleur rose argenté.

Rêves de gosse

Il évoque ainsi sa rencontre, un peu par un heureux hasard, avec Jean-Yves Glémée, le président de l’association Rêves de gosse, créée par les Chevaliers du Ciel.

Rêves de gosse
Ces pilotes aériens bénévoles œuvrent pour l’inclusion des enfants en favorisant la rencontre de jeunes « ordinaires et extraordinaires » autour d’un projet pédagogique et d’une aventure aérienne.
Le rosier paysager Rêves de gosses a été lancé en 2016, à l’occasion des 20 ans de l’association. « C’est un rosier qui mêle différents coloris : du jaune, du blanc, de l’orange et du rose. Il figure ainsi l’union entre tous ces enfants, un mélange de tout ce qui compose leur bonheur », confie le rosiériste un peu poète.
Le rosier a ensuite fait l’objet d’une convention afin que chacune des ventes rapporte un euro à l’association.
De plus, chaque ville étape du tour de France aérien que les Chevaliers du Ciel effectuent tous les ans à la rencontre des enfants, plante un massif de roses Rêves de gosses.

Rosiers fétiches

Lorsqu’il a appris que l’actrice Véronique Jannot, qui est marraine de Rêves de gosses, était aussi marraine de la première édition de Fleurs en folie, François Félix a profité de l’occasion pour que lui soit présentée cette rose.
Il ne lui restait d’ailleurs que quelques pieds disponibles qu’il a gardés pour ce week-end.
« J’aime la beauté et le plaisir, les fleurs et le jardin. L’esthétique fait partie de ma vie », déclare encore le rosiériste.
Il n’a pas de rosier préféré, mais des rosiers fétiches comme rosa chinensins mutabilis, un rosier ancien buissonnant aux coloris changeant, « le plus beau au monde ».
Et puis son chef-d’œuvre est encore à venir, il le baptisera Mano Gentil, du nom de son épouse écrivaine.

Isabelle Doucet

 

Une rose Pupetières
La rose Pupetières.

Une rose Pupetières

Que de roses ! Rêves de gosse, Véronique Jannot, mais aussi Pupetières, ces rosiers seront à (re)découvrir lors de la première édition de Fleurs en folie, les 29 et 30 avril et 1er mai au château de Pupetières à Châbons.

« C’est une de mes premières hybridations, que j’ai effectuée en 2006 : un croisement de deux rosiers paysagers, un rosier botanique et un plus moderne », confie François Félix, le père du rosier Pupetières, dont le processus de création a abouti en 2014.
« Il y a un côté symbolique car c’est mon premier rosier paysager »
, poursuit celui qui a fait de ce type de rosier son étendard. La même année nait le grimpant Madame Léon Félix, en hommage à son aïeule, un buissonnant à fleurs groupées, ainsi qu’un rosier à grandes fleurs. 
Le lien entre la roseraie Félix et le château de Pupetières à Châbons date de la période où Aymar de Virieu, propriétaire du château, était aussi administrateur de l’abbaye de Chaalis dans l’Oise où il organisait des journées des roses.
Il souhaitait mettre en avant les créations de son voisin dauphinois.
Lorsqu’il y a dix ans sont lancées à l'automne les Journées des plantes de Pupetières, c’est tout naturellement que François Félix répond non seulement présent, mais baptise une de ses premières roses du nom du château, « un festival de nuances de rose, de parme et de jaune accompagné d’un délicat parfum de musc et d’épices ».
Depuis, le rosiériste a présenté nombreuses de ses créations à Châbons, notamment le rosier Gabriella de Monaco l’an passé et Rêves de gosses ce printemps.

La première édition de Plantes en folie
Fort du succès des Journées des plantes de l’automne, Aymard de Virieu a souhaité donner rendez-vous au grand public au printemps, les 29 et 30 avril et 1er mai.


Environ 70 exposants seront présents faisant la part belle aux vivaces, aux annuelles, aux plants de légumes et aux graines. 
L’actrice Véronique Jannot a accepté d’être la marraine de cette première édition placée sous le signe de la rose.
Elle baptisera en effet samedi un rosier à son nom et découvrira dimanche la rose Rêve de gosse dont elle est marraine de l’association.
Animations sur les stands, conférences, films, expositions et visites du château ponctueront ce trois jours de fête. Le 1er mai, un pot de muguet leur sera offert.
Au château de Pupetières à Châbons, de 10 h à 18 h, entrée 7 euros (réduit 5 euros, gratuit -12 ans). 
ID

 

Le métier d’obtenteur
La rose Rêves de gosse. Crédit photo : François Félix

Le métier d’obtenteur

L’obtenteur est celui qui crée les nouvelles variétés de roses en observant un plan d’hybridation.
« Les parents sont sélectionnés pour l’intérêt de leurs caractères, la plante idéale étant recherchée », explique François Félix. Son fil conducteur : créer des roses pour le paysage.
« Il faut avoir une vue précise de ce que l’on cherche, précise-t-il. Et l’on y arrive que si l’on a une certaine sensibilité, mais aussi de l’audace, et puis l'envie de faire des roses qui plaisent à d’autres. »
Cet érudit de la rose connaît les richesses de chaque famille de rosiers qu’il combine selon ses intentions.
Membre du très sélect WFRS Breeders’ Club, la fédération internationale des sociétés de roses, il participe à des concours internationaux, qui lui permettent de se comparer et d’échanger.
« Quelle que soit sa nationalité, chacun poursuit le même but,
observe-t-il. Depuis 20 ans les obtenteurs prennent des chemins convergents. Le premier critère recherché, hormis la beauté de la rose et son parfum, est la résistance naturelle aux maladies, en raison de la disparition des produits phytopharmaceutiques partout dans le monde. L’autre priorité émergente est la résistance au changement climatique. »
L’obtenteur souligne l’intérêt de croiser variétés modernes et originelles pour conjuguer les qualités de chacunes. 
Sur 3 000 fécondations réalisées par an, le rosiériste garde 1 000 descendants mis en semis l’année N+1. Lors de la première sélection, en N+2, il retient 100 variétés. La huitième année, il n’en restera qu’une.
« Ce qui est éliminé de l’édition fait partie de la base de données génétiques sur laquelle je travaille », confie encore François Félix. Sa bible maison.

Le métier d’éditeur

« Comme pour les livres ou la musique, l’éditeur est celui qui se charge de la mise sur le marché de créations originales », précise François Félix.
Il est garant du respect du droit concernant la création artistique et la propriété intellectuelle. L’éditeur est à l’interface entre l’obtenteur et le producteur qui travaille sous licence. 
En 1992, François Félix s’est associé avec les roseraies de la région Reuteur, Orard et Laperierre pour créer la société d’édition Edirose. « Nous voulions rester maîtres de notre catalogue de variétés, explique encore le rosiériste. Nous travaillons avec une cinquantaine de producteurs de rose. »

ID

La roseraie Félix
François Félix devant son rosier fétiche.

La roseraie Félix

Les Roses Félix sont situées en Isère, au Grand-Lemps, au cœur des Terres froides.
Production annuelle : 300 000 rosiers, 400 variétés en catalogue
2 associés : François Félix et David Boully, 8 salariés, 2 à 5 saisonniers
Chiffre d’affaires : 1 million d’euros.
Plan de cultures :
- 600 000 rosiers greffés en pleine terre sur 10 ha de culture en 2 ans ;
- 80 000 rosiers en conteneurs sur 11 000 m² de culture hors sol, greffés ou issus de boutures chaque année ;
- exploitation de 85 ha dont 75 ha de céréales et semences fourragères, afin d’assurer la rotation des cultures avec les rosiers.