Technique
Mieux comprendre les concours de labour

Isabelle Brenguier
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Le labour, c’est tout un art… qui respecte certaines règles très précises. Explications.

Mieux comprendre les concours de labour
Crédit photo : PdlL, Lucie Grolleau Frécon Le plus important est d’être rectiligne pour l’ouverture, pour les bandes de labour et pour la dérayure finale.

Il existe deux catégories sur un concours de labour : le labour à plat et le labour en planche. Les candidats ont un temps d’essai, d’environ deux heures, pour s’adapter au terrain, régler leur charrue. Ensuite, a lieu le tirage au sort de la parcelle, puis les commissaires rappellent le règlement aux candidats.
Le concours commence par l’ouverture, 15 minutes pour le labour à plat et 20 minutes pour le labour en planche. Une fois l’ouverture effectuée, le candidat s’arrête et la raie est notée. Le candidat peut ensuite poursuivre son travail.
Pour le labour en planche, huit critères sont notés pour arriver à un total de 100 points. Le total est le même pour le labour à plat, mais avec neuf critères.
Le plus important est d’être rectiligne pour l’ouverture, pour les bandes de labour et pour la dérayure finale. L’apparence générale du labour est aussi un facteur important, pour faire la différence.
Les candidats doivent respecter une certaine profondeur, généralement autour des 20 centimètres. Si cette mesure n’est pas respectée des pénalités sont appliquées.

Comme dans le Tour de France

Selon Jean-Paul Prudhomme, ancien céréalier, jury de concours, « cela demande une grande dextérité de réaliser avec succès un labour bien fermé, un sillon rectiligne, puis de terminer la parcelle proprement, sans trace de pneumatique ».
« D’autant qu’au mois d’août, pendant la période des concours, on a souvent des périodes sèches. Cela complique le maintien de la régularité de la profondeur du labour. Il est important de veiller à la qualité de la première ouverture du sillon. Si elle est bien réalisée, elle va faciliter la suite. Comme il difficile de régler son outil depuis son siège de tracteur, il ne faut pas hésiter à en descendre », précise-t-il.
Depuis les années 1960, le matériel s’est beaucoup amélioré. Les charrues ont évolué. Certaines marques se sont imposées. Et il y en a même qui se sont spécialisées avec des dispositifs hydrauliques. « Les concours de labour sont une vraie compétition et sur la ligne de départ, certains concurrents sont particulièrement bien équipés. Comme dans le Tour de France cycliste. C’est tout le professionnalisme du participant qui permet de tirer profit de ces outils. Et c’est toujours plaisant à regarder », s’amuse Jean-Paul Prudhomme.

Jurys nationaux

L’objectif est que la parcelle soit entièrement labourée. Le travail réalisé par les candidats est jugé par des jurys spécialisés. Les FRL (Finale régionale de labour) sont encadrées par des jurys nationaux (1) qui ont pour mission de veiller à ce que tous les candidats soient jugés de façon équitable.
Les jurys du prochain concours isérois seront présidés par Xavier Céréza, directeur de la Direction départementale des territoires de l’Isère, et Jérôme Crozat, président de la FDSEA et expert en labour.

(1) Les jurys nationaux sont composés pour deux tiers de professionnels du labour et pour un tiers de représentants d’administrations du monde agricole.

Lucie Grolleau Frécon et Isabelle Brenguier

Premier concours
Louis Bouvier s’apprête à participer à son premier concours de labour.

Premier concours

Tout juste âgé de 17 ans, Louis Bouvier s’apprête à participer à son premier concours de labour. « J’habite à Marcilloles, à quelques kilomètres seulement du site. Je suis vraiment très content de participer à cet évènement majeur. Les concours de labour font partie de l’histoire agricole mais il y en a de moins en moins. J’ai donc très envie d’y participer pour le faire vivre », explique le jeune étudiant en apprentissage en grandes cultures au CFPPA de La Côte-Saint-André.
Inscrit avec un ami qui va le guider pendant sa prestation, Louis Bouvier se réjouit dès à présent de sa future participation. « Je pratique le labour quand j’aide mon père à la ferme et lorsque je suis chez mon patron. Mon objectif est de terminer le labour, de faire du mieux que je peux et surtout de m’amuser et de me perfectionner en apprenant de nouvelles techniques », précise encore celui qui souhaite reprendre la ferme familiale.

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« Un moment festif »

« Un moment festif »

Pour Jérôme Crozat, président de la FDSEA et membre du jury national de labour, « les concours de labour ont plus de 60 ans d’existence. Malgré cet âge avancé, ils n’ont pas vieilli. Ils sont toujours un moment festif, propices aux échanges et aux rencontres entre agriculteurs. Ils sont également toujours une occasion permettant de communiquer auprès du grand public, de lui expliquer nos missions de productions agricoles, d’entretien du territoire, de productions d’énergie… L’agriculture a beaucoup évolué en 60 ans. Et elle évoluera encore. Mais elle ne peut pas évoluer jusqu’à ne plus produire ».

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Souvenirs des premiers concours

Souvenirs des premiers concours

« Dans les années 1960, les centres des jeunes agriculteurs organisaient des comices agricoles composés d’un concours de labour et d’une présentation des élevages du territoire dans tous les cantons. Même si je n’ai jamais disputé une finale, puisque je faisais aussi souvent partie de l’organisation, j’aimais bien y participer. Je me souviens qu’une coupe était mise en jeu et si elle était remportée trois années de suite par le même concurrent, il pouvait la conserver », expose Jean-Paul Prudhomme, céréalier à la retraite à Saint-Quentin-Fallavier, dans le Nord-Isère.
« Aujourd’hui, ces manifestations sont moins nombreuses. Il n’est pas facile de trouver du monde pour les organiser. Les agriculteurs sont très sollicités. Mais les concours de labour qui fleurissent un peu partout sous l’égide des JA représentent une bonne opportunité pour communiquer auprès du grand public, et pour se retrouver entre agriculteurs, pour se confronter, se jauger. En toute amitié bien sûr. Ce type de compétition peut paraître saugrenue à des personnes qui ne sont pas initiées. Mais cela requiert un grand savoir-faire. Le labour est la première opération à réaliser pour implanter une production. Si elle est mal exécutée, le cycle cultural s’en trouvera perturbé, les rendements aussi. In fine, cela entrainera des pertes financières à l’exploitant. A l’époque, pour mes travaux de labour, je m’inspirais des règlements de concours qui précisaient les recommandations à respecter pour réaliser un beau labour », précise le spécialiste.

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« Un vrai savoir-faire agricole »

« Un vrai savoir-faire agricole »

« J’ai endossé le rôle de jury pour la première fois lorsque j’étais chef de service à la DDAF (Direction départementale de l’agriculture et de la forêt) de Corrèze. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Freddy Bohr, le premier français champion du monde de labour. Il y a une dizaine d'années, il m’a proposé d’intégrer le jury national. J’ai donc jugé ma première finale nationale à Bordeaux en 2014. Puis je les ai toutes suivies. Le labour fait partie de l’histoire agricole car il a joué un rôle important pour son développement. Au gré des années, la technique a évolué car aujourd’hui, on est sur un travail du sol plus léger et moins profond qu’auparavant. Cette discipline met en valeur un vrai savoir-faire agricole. On retrouve au bord des parcelles labourées un public d’initiés composé autant de retraités agricoles que de jeunes. Et ces manifestations, qui donnent la parole à de nombreux élus du monde rural, souvent organisés fin août-début septembre, sonnent la rentrée agricole. C’est un rendez-vous très attendu », indique Xavier Céréza, directeur de la Direction départementale des territoires de l’Isère.

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