CLUSTER BIO
La filière brassicole bio recherche orge et houblon locaux

Producteurs d’orge et de houblon, porteurs de projet, malteries et brasseries, 95 acteurs de la filière brassicole bio régionale ont répondu à l’invitation du Cluster bio à l’Ineed (Alixan Drôme) le 19 octobre. Des échanges pour avancer vers la structuration d’une jeune filière dynamique, tirée par les 83 brasseries bio de la région.

La filière brassicole bio recherche orge et houblon locaux
À l’invitation du Cluster bio, 95 acteurs ont participé à une journée de rencontre pour la filière régionale brassicole bio, le 19 octobre 2021. Une première étape pour structurer un Cluster bière.

Auvergne Rhône-Alpes est la première région pour le nombre de brasseries (près de 400 pour 2 000 en France). Les brasseries artisanales qui se sont multipliées sur le territoire mettent volontiers l’accent sur le local mais peinent à s’approvisionner en malt et houblon de proximité. Cela reste une gageure que le nouveau plan de filière régional 1 devrait aider à soutenir. Premier pas dans cette direction, la région compte depuis peu quatre malteries bio qui ont présenté leurs outils et procédés au cours de cette journée. Évidemment, leur production de malts ne suffit pas à satisfaire la demande des brasseurs dont les besoins ont été estimés à 2100 tonnes par an par le Cluster Bio. L’étude conduite cette année auprès de 49 brasseurs bio permet d’identifier leurs besoins. La majorité utilise des malts d’orge (Pilsen, pale) et 80 % d’entre eux utilisant déjà partiellement du malt régional souhaitent en incorporer davantage. En moyenne, ils se déclarent prêts à acheter 10 à 30 tonnes par an de malt bio régional. Cependant, 86 % refusent pour autant de devoir augmenter le prix de leurs bières. Les brasseurs ont en effet une image peu flatteuse du malt régional : prix élevé, qualité décevante et trop peu de disponibilités. Les brasseurs prennent également en compte les attentes de leurs consommateurs : des matières premières locales, l’artisanat, des conditions environnementales de production, la consigne. En cohérence, à l’unanimité, ils veulent rechercher des matières premières locales ; ce qui signifie accroître le nombre de producteurs de houblon et d’orge brassicole.

Des houblonnières en devenir

Le Cluster bio a estimé que les brasseries bio en Aura consomment 12 tonnes de houblon bio en pellets par an, provenant d’Amérique du Nord, d’Allemagne, d’Alsace, de Nouvelle-Zélande. Des études sont conduites depuis 2015 pour développer des houblonnières régionales produisant des houblons de qualité valorisables en brasserie. Un guide technico-économique régional a été édité. En 2020, on recense 12 ha de houblons en Aura (60 ha en France). Des formations se mettent en place (2). La culture est exigeante et requiert au minimum 300 heures/ha de main-d’œuvre et un investissement de 20 000 à 30 000 €/ha. Ces efforts payent. Selon les projections régionales, 24 ha devraient être en culture en 2022. De quoi répondre à la demande. Toutefois, les échanges ont permis de conclure que le dialogue entre producteurs et brasseurs devait s’intensifier avant d’envisager des contrats et qu’il fallait développer une typologie des qualités gustatives des variétés cultivées en région. Les brasseurs qui méconnaissent les producteurs locaux restent exigeants quant à la régularité de la qualité.

Une orge peu rentable

Les brasseurs conservent également une attitude prudente vis-à-vis des malts locaux, et par conséquent de la capacité régionale à produire des orges de qualité. Le 19 octobre, ils ont pu mieux comprendre les difficultés agronomiques et d’adaptation des céréaliers. Cela semble être un défi de produire des orges brassicoles avec des taux de germination et de protéines satisfaisants pour les malteries, qui de plus recherchent des céréales triées et calibrées. Les outils de tri et calibrage manquant sur les exploitations. Autre handicap à surmonter : le choix variétal plus restreint en Aura qu’au Nord de l’hexagone. Ici, les céréaliers cultivent des escourgeons dont les qualités brassicoles sont à confirmer et il faut veiller à retenir des variétés tolérantes à la jaunisse (JNO). Cet hiver, de nouveaux essais seront entrepris sur trois sites avec 20 variétés. De plus, le critère rentabilité n’est pas le moindre pour les céréaliers. Ils préfèrent opter par exemple pour des blés meuniers plus rémunérateurs. Quant aux coopératives, comme la Drômoise de céréales, qui veulent soutenir la filière brassicole bio, elles doivent trouver des espaces de stockage dédiés pour répondre aux attentes des malteurs. Tous les acteurs ont compris qu’il faudra consentir des efforts pour soutenir la production d’orges brassicoles en Aura si l’on veut développer une véritable filière régionale du champ au verre.

Louisette Gouverne