Le Premier ministre, Gabriel Attal, s’est rendu le 30 janvier à l’Assemblée nationale pour présenter son discours de politique générale aux députés dans un contexte de tension avec le monde agricole et face à des oppositions politiques très marquées. Il n’a donné que peu de gages permettant d’apaiser la colère des agriculteurs.
« Les agriculteurs qui n'ont pas encore reçu le solde de la Politique agricole commune (PAC) au titre de 2023 seront crédités sur les comptes bancaires « d'ici le 15 mars », a annoncé Gabriel Attal le 30 janvier devant les députés. « Nous travaillerons avec les régions et nous travaillerons avec les régions pour que les aides à l’installation des jeunes agriculteurs puissent, elles, être versées dans les prochaines semaines pour certains. » Est-ce les deux seules annonces à retenir du discours de politique générale ? En grande partie oui, puisque le chef du gouvernement s’est contenté de livrer quelques généralités sinon quelques banalités qui ont surtout conforté les manifestants agricoles dans leur détermination et motivation à poursuivre leur mouvement. Ceux-ci ne semblent pas avoir été rassurés par les propos de Gabriel Attal qui a affirmé que son gouvernement a « engagé une action résolue pour la souveraineté agricole de notre pays (…) Notre agriculture est une force, pas simplement parce qu’elle nous alimente au sens propre du terme, mais parce qu’elle constitue l’un des fondements de notre identité et de nos traditions. Parce que nos agriculteurs incarnent des valeurs fondamentales », a-t-il soutenu. Fustigeant « l’empilement des normes » face auquel il se déclare « lucide », Gabriel Attal souhaite mettre en place « une exception agricole française ». Sans en préciser ni les contours ni les modalités. Le terme n’est d’ailleurs pas nouveau puisqu’il avait déjà été utilisé à de nombreuses reprises pour les négociations sur le GATT (ancêtre de l’OMC) … en 1994 et lors des différentes réformes de la PAC. Cette exception n’a, sauf preuve du contraire, jamais vu le jour.
« Sans ambiguïté »
Avec toute la force et la volonté de sa jeunesse, Gabriel Attal a assuré vouloir « aller loi, changer de logique. J’assume de dire que tout ne sera pas réglé en quelques semaines. J’assume de dire que les chantiers sont complexes et que pour certains, il faudra y travailler encore. J’assume aussi d’apporter des réponses rapides partout, là où c’est possible », a-t-il dit. Il a promis que le gouvernement serait « au rendez-vous, sans aucune ambiguïté » pour répondre à la crise agricole actuelle. Sur le volet rural, le locataire de Matignon a annoncé qu’il lutterait contre les déserts médicaux. Pour ce faire, les médecins étrangers présents en France seront régularisés. « La sécurité, ça doit être pour tous, y compris dans la ruralité et dans les petites villes », a-t-il ajouté pour rassurer des agriculteurs de plus en plus victimes d’intrusions sur leurs exploitations. Sur le volet social, il restera à déterminer l’impact financier sur l’agriculture française de ses annonces sur la « désmicardisation » de la France et la généralisation du conditionnement du RSA à 15 heures d’activité d’ici le 1er janvier 2025.
Bruxelles
En somme, avec plus de questions que de réponses, le jeune chef du gouvernement s’est à peine contenté du minimum syndical, laissant le soin au ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, et au chef de l’Etat, Emmanuel Macron, de négocier préalablement à Bruxelles. Le second s’y rend le 1er février lors du Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement. L’occasion d’aborder les dossiers européens comme la pause environnementale sur le Green Deal et les 4 % de jachère imposés par la Commission de Bruxelles. La vieille, 31 janvier, c’est Marc Fesneau qui aura tenté « traiter des urgences européennes » et de déminer le terrain avec les deux commissaires : Thierry Breton (Marché intérieur) et Janusz Wojciechowski (Agriculture) sur des dossiers en cours (IED, NGT, SUR…), les accords de libre-échange et la concurrence déloyale et enfin la simplification de la PAC. FNSEA et JA qui ont rencontré les représentants du gouvernement le 29 janvier pendant plus de 3h30 attendent des propositions plus concrètes avant de se prendre une position sur une poursuite du mouvement ou une sortie de crise. En attendant, les barrages sont maintenus sur l’ensemble du territoire français.