Autant de nitrates et plus de carbone

Jean-Noël Rochas vit au milieu d'un petit paradis : une exploitation d'une trentaine d'hectares dont le siège est aux deux tiers de la pente de la montagne, exposition sud-sud-est, une activité de transformation fromagère rentable pour valoriser les 300 000 litres de lait produits par sa cinquantaine de vaches... Tout irait pour le mieux si Quincieu, sa commune, n'était pas menacée d'être incluse dans l'extension de la zone vulnérable aux nitrates.
« Ici, nous sommes en zone de montagne, on ne pourra rien y faire. Les bêtes s'accrochent aux herbes pour brouter. L'entretien alentour n'est pas mécanisable. Il est fait par les animaux ou à la main, mais encore faut-il être jeune », décrit l'éleveur encore en pleine force de l'âge. Alors, il ne comprend pas ce classement purement administratif.
Deux bassins versant
Son exploitation a reçu la visite d'un groupe de responsables professionnels locaux et nationaux, mercredi 29 octobre, à la sortie d'une conférence de presse donnée à quelques kilomètres, chez Bruno Neyroud, éleveur à Varacieux, commune également concernée par la zone vulnérable, les deux seules de ce versant des Chambaran, versant Isère, subissant ce « label ». « Le classement de Quincieux en ZV du fait provient qu'une bande de terre au sommet de la montagne, déborde de l'autre côté de la crête, donc verse sur la Bièvre. Un ruisseau plus en aval aurait eu des taux de nitrates justifiant ce classement... mais c'est un autre bassin versant ! », s'écrie Bruno Neyroud. Une situation qu'il comprend d'autant moins, que, quel que soient les côtés de la montagne, on y trouve guère que des forêts, des prairies pâturées, quelques hectares de noyers et de très rares parcelles de céréales. Le classement de Quincieux « est donc aberrant », selon Florent Dornier, secrétaire général national des JA. « Nous sommes au coeur d'un exemple d'une inadaptation totale de la réglementation, tempête Jean-Pierre Royannez, président de la FRSEA Rhône-Alpes, d'autant plus qu'une zone vulnérable n'apportera aucune amélioration ici ! » Au contraire, cela pourrait dégrader la situation : l'exploitation fait vivre cinq personnes sur 30 hectares exploités. La ZV obligerait Jean-Noël Rochas à supprimer la moitié de son troupeau et à faire venir du lait par camion de la vallée pour continuer à assurer sa production de saint-marcellin et autres douceurs fromagères écoulées à Grenoble, quelques marchés locaux et à Rungis. Les nitrates dans l'eau locale n'évolueraient pas, mais l'empreinte carbone, grimperait en flèche.