Accès au contenu
Loup

Avant-pays savoyard, nouveau front de prédation

Vendredi 5 septembre, Fabrice Pannekoucke, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, est venu à Novalaise (Savoie) rencontrer les éleveurs locaux, durement frappés par la prédation. Jusqu’ici concentré en zone de montagne, le loup a franchi un nouveau cap : il s’installe aujourd’hui aux portes des zones urbaines. 

Avant-pays savoyard, nouveau front de prédation
Vendredi 5 septembre, Fabrice Pannekoucke, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, s’est rendu à Novalaise afin d’y rencontrer des éleveurs du territoire durement frappés par la prédation. De nombreux représentants de la profession agricole avaient tenus à être présents parmi lesquels : Michel Joux, président de la Chambre régionale d’agriculture, Frédéric Gontard, président de la section ovine de la FRSEA AURA, René Fechoz, secrétaire général de la FDSEA des Savoie ou encore Julien Curtil, président des Jeunes Agriculteurs de la Savoie.

Depuis quelques semaines, l’avant-pays savoyard est devenu un nouveau front de colonisation pour le loup, avec des attaques qui se multiplient et une pression qui ne cesse de croître. Marie-Lise Marchais, jeune éleveuse ovine installée à Novalaise (Savoie) depuis deux ans, a perdu une vingtaine de bêtes en quelques mois. Malgré la pose de filets de protection et même l’achat d’un patou, les attaques continuent, parfois à quelques mètres des habitations. Avec des pertes équivalentes à la moitié de sa production annuelle, elle dénonce un système à bout de souffle. « Je suis là pour nourrir les gens, pas le loup », a-t-elle affirmé devant Fabrice Pannekoucke, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes venu rencontrer ses éleveurs à bout de nerfs. Au-delà de la douleur morale et des nuits blanches, les coûts sont écrasants : plus de 15 000 € déjà investis en moyens de protection, dont une partie non remboursée par des dispositifs souvent lourds et parfois peu adaptés.

Les témoignages convergent : malgré les chiens de protection, les filets et une surveillance accrue, rien ne permet de garantir la sécurité des troupeaux. Dans un territoire morcelé, proche des habitations, les contraintes de protection viennent s’ajouter à celles d’élevage. Michel Metton, président de la louveterie régionale, qui avait tenu à être présent ce jour, n’a pu que confirmer l’impuissance de ses équipes face à un cadre légal trop rigide. Ils ne peuvent intervenir qu’après deux attaques en moins de quatre mois, et seulement à proximité immédiate des troupeaux. « On a du matériel performant et on pourrait éviter un grand nombre d’attaques si on nous laissait intervenir quand il faut », a-t-il déploré.

Le poids des lourdeurs administratives

Frédéric Gontard, président de la fédération ovine de la Drôme et à la tête de la section ovine de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, a quant à lui dénoncé un « imbroglio administratif inimaginable » pour déclencher l’intervention des louvetiers. « Si le loup a tout mangé et qu’il n’y a pas de preuve, on ne peut rien faire. » Face au loup qui « se spécialise de plus en plus dans les espèces domestiques », l’éleveur drômois déplore en outre « une situation qui n’est pas près de s’améliorer tant qu’on ne changera pas de politique au niveau du loup ». Avant d’ajouter qu’« il faut remettre l’animal à sa place. On ne dit pas qu’il faut l’exterminer, mais il faut vraiment une régulation correcte pour que les éleveurs puissent dormir tranquilles ». Aussi, il n’a pas hésité à réclamer la prise de mesures simples : l’autorisation automatique de tir de défense pour les éleveurs ayant déjà subi des attaques ; l’octroi systématique d’une avance de trésorerie aux éleveurs ayant un dossier loup pour couvrir les dépenses à venir ; ou encore l’intervention des lieutenants de louveterie à la demande des éleveurs.

Des chiffres contestés

Le comptage officiel du loup était bien entendu au cœur des critiques. Les organisations agricoles dénoncent des chiffres largement sous-estimés. « On nous dit qu’il y a 1 000 loups en France, mais nous savons qu’ils sont au moins 2 500, peut-être 3 000 », a affirmé Michel Joux, président de la chambre régionale d’agriculture. Une affirmation face à laquelle Fabrice Pannekoucke a abondé : « En Haute-Savoie, un travail sérieux de comptage a montré que l’effectif officiel annoncé ne représentait que la moitié de la réalité. Il faut donc commencer par-là ». En effet, si le droit de prélèvement (19 % de la population totale) n’est pas juste par rapport à la croissance annuelle réelle de la population du loup, son expansion ne peut être qu’exponentielle. Conséquence : le nombre de victimes explose. En Auvergne-Rhône-Alpes, il a augmenté de plus de 10 % en un an. Le sentiment est unanime : si rien n’est fait, c’est la survie même de l’élevage qui est menacée. « Les éleveurs finissent par être résignés, et certains arrêtent », regrettait Frédéric Gontard. Fabrice Pannekoucke a insisté sur trois priorités : rétablir la vérité sur les chiffres du comptage de la population lupine, faciliter les interventions des louvetiers et renforcer la régulation avant de souligner le mal-être profond des éleveurs qui « ne dorment plus la nuit ».

Malgré les pertes et l’épuisement, les éleveurs présents à Novalaise ont tenu à rappeler l’importance de leur métier : nourrir la population, entretenir les espaces, maintenir une activité économique vitale. Mais pour continuer, ils réclament des décisions fortes, rapides et concrètes. « Si on veut préserver notre agriculture, l’élevage de plein air et le dynamisme de nos territoires, il faut réagir », a alerté Marie-Lise Marchais. En somme, il semble être temps de remettre les priorités dans le bon sens et comme l’a rappelé Fabrice Pannekoucke « personne n’a dit qu’il fallait éradiquer le loup. Mais il y a un équilibre à trouver entre la sécurisation d’une espèce et celle de notre élevage et de nos territoires. Soyons responsables de l’avenir que l’on souhaite pour nos territoires ! ».

Alexandra Escobar