Chauffage urbain : Biomax va brûler du bois local

En 2020, l'agglomération grenobloise sera équipée une nouvelle centrale à bois ultra-performante. Destiné à remplacer la chaufferie au fioul du CEA, sur la Presqu'Ile, le futur équipement aura pour mission de sécuriser le réseau de chauffage urbain tout en favorisant la transition énergétique. Par cet « investissement colossal » de 57,6 millions d'euros, Christophe Ferrari, le président de la Métro, veut aider ses concitoyens à sortir de leur « addiction au carbone ».
La cure de désintoxication a commencé en 2005 avec le plan air-climat-énergie qui, depuis, a mis en place tout un arsenal d'outils pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l'agglomération grenobloise. Le résultat est là : en dix ans, le territoire a réduit ses émissions de GES de 21 % et sa consommation d'énergie de 16 %. Pour ce qui est de la production d'énergie renouvelable, les objectifs fixés en 2005 sont eux aussi atteints : 15,5 % de la consommation provient d'énergies renouvelables, hydroélelectricité et biomasse pour l'essentiel. Mais la Métro, qui vise les 20% en 2020, veut passer à la vitesse supérieure et développer le solaire thermique et photovoltaïque, la géothermie, le biogaz et la biomasse, en particulier le bois.
Cogénération
C'est là qu'intervient Biomax, « un super héros écologique et économique », et présenté comme tel par le président de Grenoble Alpes Métropole. Le super héros est en fait une gigantesque centrale au bois de dernière génération. Installé au bord de l'A48, l'équipement, basé sur un système de cogénération, produira 220 GWh de chaleur et 37 GWh d'électricité à partir d'un générateur de vapeur de 40 MW. De quoi alimenter 15 à 20 000 logements en chauffage urbain et 10 000 en électricité dès 2020.
Pour les élus, qui ont validé l'avant-projet définitif en conseil métropolitain le 24 mars, Biomax représente un signal fort en matière de transition énergétique, « colonne vertébrale » de leur action politique depuis dix ans. La centrale va en effet recourir à deux innovations renforçant son efficacité énergétique : le stockage de la chaleur sous haute-pression (pour la restituer lors des pics de consommation) et un système de récupération de chaleur issu de la condensation des fumées, qui sert à pré-sécher le bois avant de le brûler dans la chaudière. Cette technique permet d'éviter le rejet de l'air chaud dans l'atmosphère et d'améliorer le rendement de la combustion calorifique, donc d'émettre moins de fumée.
Bois local
Côté approvisionnement, Biomax est censé se fournir en Isère et en Savoie, « dans un rayon de 62 à 100 km autour de Grenoble ». La plateforme de Goncelin devrait être en première ligne. « Il s'agit d'être cohérent en s'approvisionnant localement, indique Bertrand Spindler, maire de La Tronche et vice-président de la Métro en charge de l'énergie. Nous avons beaucoup de forêt sur notre territoire. Cette forêt gagne et est sous-exploitée. Nous sommes au cœur d'une zone propice à l'utilisation du bois. » Et l'élu de présenter la future centrale comme un outil stratégique permettant de consolider « l'économie du bois-énergie » et de « structurer la filière bois ». Pour alimenter Biomax, les calculs font état d'un besoin de l'ordre de 85 000 tonnes de bois par an, 92% provenant de plaquettes forestières, 8% de bois recyclé. Là encore, les élus se veulent rassurants, précisant que le bois sera issu de « forêts durablement gérées », bénéficiant par exemple de certification PEFC ou FSC. S'ils conviennent que, pour être rentable, la ressource devra provenir des forêts les plus facilement exploitables, l'éventualité de réaliser des coupes rases pour alimenter Biomax est a priori écartée.
Marianne Boilève