En Isère, la force du réseau contre l'agribashing

Se faire entendre. Avec les élections des membres de la chambre d'agriculture, le monde agricole ne dispose pas seulement d'un droit de vote. Il a aussi le pouvoir de s'exprimer, d'interpeler les candidats et de défendre ses valeurs. Pour ce faire, la liste d'ouverture Avançons ensemble les pieds sur terre prévoit une série de réunions publiques destinées à échanger avec leurs candidats sur l'avenir de l'agriculture en Isère.
Acteur de la profession
La campagne s'est ouvert sur une première rencontre lundi 14 janvier à Courtenay, une seconde mardi à Goncelin, deux autres mercredi à Vernioz et Roche, suivies d'une dizaine d'autres à travers l'ensemble du département. Parmi les temps forts de la campagne, la conférence-débat organisée ce jeudi à Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs par la FDSEA de l'Isère et JA38, qui conduisent la liste Avançons ensemble. Deux élus nationaux, Daniel Prieur, secrétaire général adjoint de la FNSEA, et Loïc Quellec, vice-président national des JA, répondront aux questions des agriculteurs et s'effroceront de les convaincre de participer aux élections. « C'est l'occasion de se sentir acteur de sa profession », insiste Loïc Quellec, éleveur de bovins viande dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Aller dans le bon sens
Les candidats locaux reviendront en détail sur les grands thèmes de la campagne (projets économiques pour l’agriculture iséroise, renouvellement des générations, défense du foncier agricole, transition énergétique et agroenvironnementale...). Les deux représentants nationaux veulent également mettre l'accent sur les missions et le pouvoir d'une chambre d'agriculture à l'échelle locale. « Il s'agit de faire en sorte que ça aille dans le bon sens, en termes de formation, d'appui technique, d'accompagnement au changement de pratique, mais aussi de représentation dans les négociations départementales, régionales et nationales », souligne Loïc Quellec, tout en rappelant le rôle structurant d'une chambre consulaire au niveau de l'agriculture départementale et la mission de veille qui lui est dévolue.
Construire un modèle économique de proximité
Daniel Prieur, éleveur laitier dans le Doubs, très investi dans la filière comté, ajoute que les chambres ont un rôle à jouer dans la construction d'un « modèle économique de proximité ». « Si chez nous, avec le comté, c'est facile, chez vous, c'est possible. Mais avant d'y aller, il faut s'imprégner des problématiques. » Car, comme tous les territoires, l'Isère a un « vrai ressort à activer par rapport à ces questions de valeur », estime Daniel Prieur. Encore faut-il que « les paysans » aient conscience d'être « dépositaires d'une identité », productrice de valeur, qu'il convient d'arrimer aux produits. « La valeur ne viendra pas seulement de la quantité de glucides ou de protéines, insiste le secrétaire général adjoint de la FNSEA. Quand on achète un produit, on achète aussi un savoir-faire, un mode de production, une histoire, un terroir, un paysage. » Or, en la matière, l'Isère ne manque pas d'atouts. C'est le message que cherchent à faire passer les candidats de la liste de la FDSEA-JA38, la seule capable de représenter, selon Daniel Prieur, les acteurs d'une « agriculture en mouvement, connectée aux attentes de la société ».
Considération
Certes, « il nous faut un peu de temps, mais aussi de la considération », insiste l'élu national. Comme tous les responsables, il sait bien qu'une partie des troupes est démobilisée, parfois même éreintée par les crises à répétition et les campagnes de dénigrement systématique qui se multiplient depuis quelques années. Les Français ne sont pourtant pas dupes : récemment, 68% d'entre eux déclaraient avoir une bonne image des agriculteurs (1). Une large majorité estime même que l'agriculture joue un rôle clé à l'échelle des territoires : il suffit de se rappeler la qualité des débats lors des Etats généraux de l'alimentation pour s'en convaincre.
Faire entendre la voix des agriculteurs
Le problème, c'est que les agriculteurs ne savent comment capitaliser sur cette image. Beaucoup peinent à se faire entendre, se sentent isolés, se disent impuissants, épuisés, démoralisés même. « Une chambre d'agriculture est aussi là pour faire entendre la voix des agriculteurs face aux attaques », précise Loïc Quellec, qui ajoute avec pragmatisme : « Dans nos départements, il s'agit notamment de défendre l'élevage. Les chambres d'agriculture, de par leur notoriété et leur neutralité, parviennent plus facilement que nous, syndicats, à organiser le débat, en réunissant des chercheurs et en parlant de ces sujets de façon constructive. » Une raison de plus pour aller voter.
Marianne Boilève
(1) Source Ifop : Le baromètre d’image des agriculteurs, Vague 18, 2018.