L’habitat grignote toujours plus d'espaces naturels, agricoles ou forestiers
Entre 2011 et 2020, la région Auvergne-Rhône-Alpes a vu disparaître 292 km² d’espaces naturels, agricoles ou forestiers au profit de l’urbanisation, soit 0,4 % de la surface régionale. C’est le constat effectué par l’Insee, en partenariat avec la direction régionale de l’équipement, de l’aménagement et du logement (Dreal), dans une étude publiée en octobre 2025.
La région Auvergne-Rhône-Alpes se hisse au cinquième rang des plus consommatrices de foncier en France métropolitaine : les deux tiers des surfaces artificialisées l’ont été pour la construction de logements. L’activité économique et les infrastructures de transport en représentant respectivement 22 % et 7 % des espaces utilisés. La progression de l’occupation des sols augmente de 7,5 % entre 2011 et 2020, contre 6,7 % au niveau national. La dynamique démographique régionale y est pour beaucoup : la population a, en effet, crû de 6,3 % (contre 3,9 % en moyenne nationale). 43 % de la consommation d’espace liée à l’habitat correspond donc à l’évolution du nombre d’habitants. Les territoires les plus concernés sont la Haute-Savoie (+ 7,3 %) et l’Ardèche (+ 7,2 %), suivis de la Haute-Loire, de l’Allier et de l’Ain. En Haute-Savoie, les zones situées entre Annecy et Genève connaissent une flambée de la construction : la communauté de communes Usses et Rhône s'est ainsi urbanisée à plus de 10 %. À l’inverse, dans le Rhône, déjà très urbanisé, la hausse reste limitée à 2,7 %.
Vacance et résidences secondaires
Si la croissance démographique stimule les besoins de logements, elle n’est pas le seul facteur de l’augmentation de la pression foncière. Dans l’ouest de la région (Allier, Haute-Loire, Cantal), beaucoup de logements, notamment les plus anciens, sont désormais inadaptés aux attentes actuelles (localisation, confort, rénovation difficile). Cette situation favorise ainsi leur vacance, autre facteur de la pression foncière. Les constructions neuves repartent donc à la hausse, surtout là où le foncier reste bon marché. Dans l’Allier, les logements vacants expliquent 63 % de la croissance du parc. D’un autre côté, au sein des zones touristiques (massifs savoyards, Sancy, gorges de l’Ardèche) les résidences secondaires se multiplient et accentuent le phénomène. Jusqu’à 79 % des logements sont non permanents dans certaines intercommunalités. Ces biens échappent souvent à la population locale, incitant à construire davantage.
Les axes de communication
L’étude met en lumière la tendance de l’urbanisation à se concentrer le long des grands axes, à proximité des infrastructures, autour des agglomérations et le long des axes de communication, notamment pour l'emploi. La région Auvergne-Rhône-Alpes fait d’ailleurs partie des quatre régions métropolitaines qui comptent le plus d’espaces protégés (34 %), notamment grâce aux parcs naturels. Dans la Drôme, une petite partie des communes (10 %) concentre la moitié de l’urbanisation et de l’artificialisation des sols entre 2011 et 2020. Ailleurs, comme en Haute-Savoie ou en Isère, la pression est plus diffuse mais continue, mais l’urbanisation est essentiellement concentrée dans les communes de la vallée du Rhône, ainsi que le long de l’axe en direction de Grenoble via Romans-sur-Isère. Face à ces dynamiques, les collectivités doivent composer entre attractivité, tourisme et sobriété foncière. La loi Climat et résilience impose d’ailleurs de réduire de moitié la consommation d’espace d’ici 2031, avant d’atteindre le « zéro artificialisation nette » en 2050. Un défi de taille dans une région où la montagne, les zones protégées et les terres agricoles se disputent d’ores et déjà un territoire limité.
Charlotte Bayon