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ÉTUDE

L’industrie laitière fragilisée par le contournement des lois Égalim

La Fédération nationale de l’industrie laitière (Fnil) vient de publier, en collaboration avec la Banque de France, une étude sur la situation économique des entreprises privées de transformation laitière.

L’industrie laitière fragilisée par le contournement des lois Égalim
4 milliards de litres de lait transformés en produits laitiers par les entreprises adhérentes à la Fnil (sur 12 milliards) échappent aux lois nationales.

Les entreprises privées de transformation laitière représentent un chiffre d’affaires (CA) de 18 milliards d’euros (Md€), 36 000 emplois répartis dans des territoires très souvent ruraux et un tiers du chiffre d’affaires de l’agroalimentaire français. L’industrie laitière s’appuie sur un maillage territorial dense, des outils de production modernes et une forte capacité d’exportation. Ses entreprises ont une forte maturité : 73 % ont une grande ancienneté (+ de 21 ans d’existence), ce qui permet de la stabilité, de l’expérience, et une plus grande facilité pour les investissements ou pour la recherche et le développement. À l’instar du secteur agroalimentaire, l’industrie laitière privée connaît une croissance continue de son chiffre d’affaires. Le CA cumulé des 153 entreprises du secteur est passé de 14,7 Md€ en 2020 à 18,2 Md€ en 2024, soit une hausse de 22,7 % en 5 ans (à rapprocher de la hausse globale du secteur des IAA : + 25,8 % sur la même période).

« Pas de rebond en vue »

Les entreprises laitières sont en revanche plus exportatrices que la moyenne du secteur agroalimentaire. En 2024, 22,4 % du chiffre d’affaires total est réalisé à l’export (contre 20,8 % pour l’ensemble des IAA). Plus des trois quarts (77 %) des entreprises sont exportatrices, contre 41 % pour les IAA. « Nos entreprises contribuent ainsi directement à la souveraineté alimentaire du pays », se félicite François-Xavier Huard, président-directeur général de la Fnil. Mais ces bons résultats ne se retrouvent pas dans la performance des entreprises. Le taux de la valeur ajoutée (13,5 %) est en repli depuis 2020 et en deçà de la moyenne des IAA (18,8 %). Le taux de marge brute d’exploitation s’établit à 2,9 % (contre 6,5 % pour la moyenne des IAA). Et le taux de résultat net est à 1,1 % en 2024 (contre 3 % pour l’ensemble des IAA). Ce taux s’élève à 8 % dans l’automobile, 10 % dans l’énergie, 15 % dans le luxe et 20 % dans l’industrie pharmaceutique, constate François-Xavier Huard. « Il n’y a pas de rebond en vue qui permettrait de dire que la tendance s’inverse » déplore le président, qui s’inquiète de « l’incapacité » pour les entreprises à relayer les hausses de coûts de production « aux niveaux des clients distributeurs. »

Six milliards de litres concernés

Ainsi, les lois Egalim, qui devaient permettre une meilleure répartition de la valeur, sont contournées par la création de centrales d’achat européennes avec un siège en Belgique ou en Espagne afin d’échapper à la législation française. Résultat : 4 milliards de litres de lait transformés en produits laitiers par les entreprises adhérentes à la Fnil (sur 12 milliards) échappent aux lois nationales. En 2027, si rien n’est fait, plus de 6 milliards de litres de lait seront concernés. Pour contrer ce phénomène, la Fnil propose que les négociations des produits agroalimentaires majoritairement composés de matières premières agricoles collectées, transformées, distribuées et consommées en France aient lieu exclusivement en France. « Je ne peux pas accepter que l’on sacrifie l’industrie laitière et ses éleveurs partenaires sans rien faire. On ne peut pas parler de souveraineté alimentaire à longueur de journée et brader à la fois notre agriculture et notre industrie en les laissant échapper à la loi française » conclut François-Xavier Huard.

Actuagri