L'Isère engagée dans la bataille de l'image touristique

« L'Isère ? Mais personne ne sait que ça existe ! » Cette réflexion, ils sont des dizaines de professionnels à l'avoir faite au cours des premières assises du tourisme en Isère. L'attente était donc forte dans l'atrium du centre des congrès de Grenoble, le 3 octobre dernier. Elus, hébergeurs, entreprises de service, institutions, associations, offices du tourisme, territoires, près de 700 personnes ont répondu à l'invitation du Département. La plupart énoncent deux priorités : créer du réseau et valoriser la « destination Isère ».
« On ne se connaît pas et personne ne nous connaît », résume un restaurateur. Ce constat, établi depuis des années, saison après saison, pourrait bien évoluer prochainement. C'est en tout cas ce qu'espère le président Barbier qui, dans son discours inaugural, analyse la récente entrée de l'Isère dans le « Top 10 » des destinations touristiques préférées des Français comme un « effet de la politique du Département menée depuis un an ». Une poltique volontariste, justifiée par le fait que « le secteur crée de l'emploi et de la richesse ». Saluant le « formidable levier économique » que représente la filière « avec 33 000 emplois et 697 millions d'euros de consommation touristique sur le territoire », l'élu annonce qu'il entend « imprimer partout la marque Alpes-Isère » de façon à « gagner la bataille de l'image touristique ».
Muscler la communication
Le propos est fondé. Depuis le début de son mandat, le nouvel exécutif clame haut et fort sa volonté de « consolider la capacité d'attractivité touristique » du territoire. Il a pour cela privilégié quatre axes de développement (l'accès, l'hébergement, les nouveaux produits, la promotion), avec un tropisme assumé pour la montagne et le tourisme d'hiver, considéré par Jean-Pierre Barbier comme « la locomotive qui fait travailler de grandes entreprises locales, comme Poma ou Rossignol ». Après avoir « musclé la communication » en direction des médias nationaux et internationaux, Chantal Carlioz, la vice-présidente en charge du tourisme, a ouvert plusieurs chantiers, comme le développement du cyclotourisme (notamment via le vélo à assistance électrique) ou les « CPAI » (1), des « contrats de performance » censés favoriser le développement des massifs et des stations iséroises, dont les premiers ont justement été signés à l'occasion des assises.
Réseaux
Si les professionnels ne sont pas insensibles à ces coups de pouce, ils savent bien que la clé de leur avenir économique est ailleurs. Et qu'ils ont en face d'eux, de rudes concurrents, les Savoyards. Ce qu'ils sont venus chercher aux rencontres de Grenoble, ce sont des pistes pour développer des nouveaux produits, mais surtout des contacts et des réseaux. « C'est ce qui nous manque le plus », avoue une accompagnatrice en montagne qui a des projets plein la tête, mais aurait besoin de trouver des partenaires pour les mettre en œuvre. Pour Philippe Brunet, du cabinet Altimax, l'originalité est justement l'un des axes à creuser : « Il faut miser sur l'effet "waouh!". L'Isère est trop discrète. Il faut qu'elle se fasse connaître comme une destination authentique, plus raisonnable et moins bling bling que ses concurrentes directes. »
Prospective
Message reçu. Après cette entrée en matière, les participants partent glâner des idées dans les trois ateliers de prospective qui leur sont proposés. « Pas la peine d'inventer des choses extraordinaires, conseille Josette Sicsic, rédactrice en chef du magazine Touriscopie, lors de l'atelier sur les nouveaux formats de séjours. Le touriste, il faut l'observer, le comprendre et l'écouter pour voir où sont ses attentes et proposer des offres pertinentes. » Certes, mais encore faut-il savoir comment adapter son offre. Faut-il imaginer de nouveaux concepts ? Se lancer dans de nouveaux partenariats, de type public/privé par exemple ? C'est le pari qu'ont fait les stations qui ont rejoint le projet Play Alpes (carte d'abonnement à 13 domaines skiables), ou de celles qui ont voulu développer le trail sur leur territoire (partenariat entre des collectivités et des entreprises).
A la sortie des ateliers, les participants se retrouvent dans le showroom, où sont présentés une trentaine de stands tenus par des filières professionnelles, des territoires de l’Isère ou des entreprises proposant des services innovants. Les échanges vont bon train. Ici, on parle technique, là on commence à échaffauder un projet. Comme beaucoup, Jacqueline Rebuffet, référente du réseau Bienvenue à la ferme, enchaîne les rencontres. « Ces assises, c'est une très bonne initiative, mais il ne faudrait pas que ça s'arrête là. Ce pourrait être un tremplin pour relancer la marque Isère. » Et rappeler que les produits locaux sont aussi d'excellents ambassadeurs touristiques.
(1) Ces contrats ont pour ambition de soutenir les opérations d’investissement en maîtrise d’ouvrage publique (réalisées par les communes, les intercommunalités et leurs établissements publics) ayant « un impact significatif sur le développement ou le renforcement de l’activité touristique des stations hivernales et thermales ».
Marianne Boilève