La cohérence écologique d'une exploitation apicole

Le projet d'installation en apiculture de Nicolas Guintini était un projet professionnel, mais aussi un projet de vie. Sensibisé aux problématiques environnementales et écologiques, et dans le rejet de la société de consommation, il voulait avoir une activité en lien avec la production et la nature. L'objectif de ce projet, partagé avec son épouse, Isabelle Gombert, était aussi de leur permettre d'être le plus autonome possible. La ferme en pisé qu'ils ont acquise à Semons leur a ainsi permis de réaliser leur rêve. A côté des petits animaux, du potager et du verger destinés à leur consommation personnelle, Nicolas Guintini, s'est progressivement installé. Il fut pluriactif de 1999 à 2002, puis en exploitation individuelle jusqu'en 2009, au moment où il a créé le Gaec « les Ruchers nomades ». Aujourd'hui, celui-ci compte trois associés (Nicolas Guintini est à plein temps alors qu'Isabelle Gombert et Hélène Bois sont à mi-temps) pour travailler 400 ruches et produire différents miels de cru (lavande, acacia, châtaignier, tilleul et montagne), du pollen frais et de la gelée royale. Quelques produits transformés sont encore disponibles à la vente, mais comme les récoltes de miel sont en chute ces dernières années, ils sont moins abondants. C'est sans déplaire à Nicolas Guintini qui « préfère privilégier l'abeille et les productions directes ».
Une cohérence écologique
L'installation de Nicolas Guintini et de son épouse reposait sur la recherche d'une cohérence écologique la plus complète possible. Leur première volonté était d'avoir un taux d'endettement minime pour ne pas perdre en autonomie. L'acquisition du matériel fut donc réalisée progressivement, selon leurs besoins. Dans le même temps, ils ont privilégié le local dans l'ensemble de l'organisation de l'exploitation. Qu'il s'agisse des bâtiments (ils ont profité des avantages que procurait le bâti en pisé et l'utilisation de matérieux d'origine locale comme le carrelage, l'inox et le bois), des approvisionnements, de la production (ils favorisent les ruchers sédentaires pour minimiser les déplacements et la consommation de gasoil), et de la vente (le miel et les autres produits sont vendus en Isère). La certification en agriculture biologique de leur production n'était pas une fin en soi. Naturellement, leurs pratiques correspondaient déjà quasiment au cahier des charges.
Une exploitation rentable
Un quart des produits du Gaec est commercialisé en direct sur l'exploitation, lors du marché des fermes du Viennois au Chambaran ou dans des foires bio. Pour le reste, les miels et les pollens sont vendus en pot en demi-gros dans des magasins de producteurs et des épiceries biologiques, alors que la gelée royale est vendue en vrac au sein des mêmes canaux de distribution. Aujourd'hui, le Gaec des Ruchers nomade est une exploitation rentable, qui permet à ses associés de gagner leur vie. Mais le travail est très intense et pas toujours en adéquation avec la vie de famille. Pour Nicolas Guintini, c'est une contradiction : « c'est une activité professionnelle qui permet de se faire plaisir, mais qui nécessite des sacrifices personnels ».
Une évolution des pratiques agricoles
Si l'apiculteur est satisfait de son installation, son emplacement dans la plaine cultivée de La Côte-Saint-André n'est pas sans poser problèmes. « Les traitements sur le blé et le colza sont nombreux et non sans conséquences pour les abeilles », affirme Nicolas Guintini, qui l'année dernière a même envisagé de déménager. Pour lui, la diminution de la qualité environnementale ne cesse de s'accentuer depuis 20 ans. Malgré la réduction des produits phytosanitaires et un meilleur encadrement de leur utilisation, le problème reste entier. Et bien que les publications mettant en avant le rôle de ces produits soient nombreuses, il reste encore un long chemin à parcourir pour une évolution des pratiques agricoles.