La FNO veut une reconnaissance des aménités positives
La Fédération nationale ovine (FNO) a organisé sa 78ᵉ assemblée générale à Paris le 30 septembre. Lors d’une table-ronde sur la place de la production ovine française dans le contexte européen à l’horizon 2030, la question de la reconnaissance, y compris financière, des services rendus par l’élevage est revenue.
Le secteur ovin français n’en finit pas de payer les conséquences du Rainbow Warrior (lire encadré) et les effets se ressentent encore aujourd’hui avec une baisse de 14 % de la production en 2024 par rapport à la moyenne quinquennale 2019-2023. Depuis les années 1990, la production a été divisée par deux et le cheptel a été réduit de près de 80 % ! Comme s’il fallait en rajouter, la production de lait de brebis a chuté de 5 % depuis 2021 ; la part de la viande d’origine française dans la consommation de viande ovine n’atteint que 41 % ; et enfin, plus de la moitié des éleveurs de brebis ont plus de 50 ans.
Redonner des couleurs à l’élevage ovin français
Face à ces constats qui sont autant de défis à relever, les dirigeants de la FNO entendent actionner tous les leviers à leur disposition pour redonner des couleurs à l’élevage ovin français. Parmi eux, la nécessité de valoriser les aménités positives du pastoralisme et d'être rémunérés pour les services rendus, et l’entretien des paysages en fait partie. « Car il faut en finir avec l’idéologisation de l’enjeu environnemental », a lâché Dacian Ciolos, agroéconomiste, ancien commissaire européen à l’agriculture (2010-2014) et ancien Premier ministre roumain (2015-2017). Il regrette que la Commission européenne ne les ait pas « politiquement intégrés » alors que lui-même constate le reboisement naturel des montagnes roumaines. « Dans les Carpates, où l’élevage bovin et ovin a diminué, nos paysages se transforment ». Car autour de ces paysages façonnés par le pastoralisme, ce sont de nombreuses activités qui font vivre le territoire, en particulier le tourisme. « Dans la chaîne des Puys, nous croisons des parapentistes, des cyclistes, des randonneurs, des chasseurs », a développé le sénateur Jean-Marc Boyer (LR, Puy-de-Dôme), pointant la nécessité de concilier ces activités.
Multifonctionnalité
Pour Brigitte Singla, secrétaire générale de la FNO, ces aménités concernent aussi la protection de la biodiversité, le captage carbone, l’agroforesterie, l’éco-pâturage, et naturellement la lutte contre les incendies. Dans de nombreux départements, les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) proposent aux agriculteurs des contrats de défense de la forêt contre les incendies (DFCI). « Environ 85 % des brebis sont en zone défavorisée. Il faut donc maintenir l’indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) et obtenir une aide aux surfaces pâturées », a-t-elle plaidé. « On l’a vu cet été dans le Sud de la France. Les feux se sont propagés là où l’agriculture et notamment l’élevage ont été abandonnés », a souligné Michèle Boudoin, présidente de la FNO, qui a insisté sur la « multifonctionnalité de l’élevage ovin qu’il faut rémunérer ». Elle demande à « changer le logiciel de la Commission de Bruxelles pour réaliser cet objectif et pour que la France puisse, par ailleurs, parvenir à l’autonomie stratégique sur les produits de base ». Son ambition ? « Avoir un million d’agneaux de plus dans les prochaines années, pour avoir plus de lait et plus de viande ». Le prochain congrès de la FNO (le 79ᵉ) se déroulera dans l’Hérault. Ce sera le dernier de sa présidente et de sa secrétaire générale qui passeront le flambeau à d’autres dirigeants.
Christophe Soulard
Les conséquences du Rainbow Warrior
Le 10 juillet 1985, le Rainbow Warrior, navire amiral de l’ONG Greenpeace qui s’opposait aux essais nucléaires français dans le Pacifique (Mururoa), coule dans le port d’Auckland (Nouvelle-Zélande). L’explosion, provoquée par les services secrets français, cause la mort du photographe portugais de Greenpeace, Fernando Pereira. En plus des retombées diplomatiques, politiques, militaires et judiciaires, cet attentat a entraîné des conséquences économiques. La France a été contrainte d’accepter (en compensation de cet attentat) les importations de viande ovine néozélandaise à hauteur de 228 000 tonnes équivalent carcasse.
C.S