Lait : allier « compétitivité » et « durabilité »
L’industrie laitière entend « marcher sur deux jambes » pour accompagner les mutations en cours.

L’assemblée générale de la Fédération nationale de l’industrie laitière (Fnil), qui s’est récemment tenue à Paris, a donné à voir un contexte géopolitique mouvant que le secteur laitier ne peut pas ignorer. « Le monde a changé depuis janvier avec l’arrivée du président Trump à la Maison Blanche. L’ordre international qui régnait depuis la Seconde Guerre mondiale, basé sur des accords commerciaux, est rebattu depuis plusieurs mois. Les taxes qui nous menacent seront-elles de 10 %, 20 % ou de 200 % ? Nous ne le savons pas », résume en substance François-Xavier Huard, le PDG de la Fnil. Pour autant, l’industrie laitière française sait ce qu’elle veut et ce qu’elle ne veut pas. « Nous sommes branchés sur les marchés, mais nous devons cultiver une différence européenne par rapport à l’approche débridée des États-Unis ou de la Chine », argumente son PDG. Partisane de « liberté contractuelle », mais aussi de « régulation », la Fnil se défie des « discours populistes » tout autant que de la « surrèglementation » nationale ou de la « surtransposition » des textes communautaires. En rajouter une couche sur la loi Égalim ? Ce serait « une boucherie », avertit François-Xavier Huard. « Il faut être raisonnable. Nous avons déjà trop de normes. Résultat, très peu de secteurs, excepté le lait, appliquent la loi Égalim tandis que les centrales d’achats la contournent. De grâce, laissons les opérateurs fonctionner. »
Une origine France réputée
Pour le PDG de la Fnil, l’industrie laitière doit « marcher sur deux jambes : la compétitivité et la durabilité. Le Green Deal allait peut-être trop loin, mais le retour en arrière est sans doute excessif. Le changement climatique est là et nous devons accélérer sur la transition en donnant la parole à ceux qui ne pensent pas comme nous et en cherchant le consensus ou le compromis. » « Nous devons faire matcher les réalités de terrain et les nouvelles exigences sociétales », a rappelé Alexandra Laferrière, directrice générale communication et affaires publiques du numéro un mondial des produits laitiers. La transformation laitière française exporte pour 9 milliards d’euros (Md€) de produits laitiers et dégage un excédent commercial de l’ordre de 3 Md€ par an, a rappelé Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur, dans une vidéo. Partisan de « produire plus » de lait en France, il défend la politique gouvernementale de « réarmement industriel » et identifie des débouchés potentiels nouveaux en Inde ou dans les pays du Golfe. Un optimisme tempéré par Christophe Lafougère, directeur du Gira, un bureau d’études qui prévoit une production mondiale de lait en hausse de 1,6 % par an au cours des cinq prochaines années (tout particulièrement en Asie), mais de 0,2 % par an seulement dans l’UE – « un marché mature où la population diminue ». Cela dit, « le monde va consommer plus de fromage », un marché sur lequel l’UE et les États-Unis se partagent 80 % des exportations. De plus, « la matière grasse est de plus en plus demandée et les crème et beurre origine France très bien cotés ». Attention toutefois à « ne pas rater la bataille du lactosérum » sur lequel reposent, selon lui, « la valeur ajoutée et les marges de demain ».
Actuagri