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Territoire

Le délicat sujet des inondations en terres agricoles

Une journée relative à la prise en compte de l’activité agricole dans la gestion des risques d’inondation s’est tenue au siège des chambres d’agriculture le jeudi 1er décembre. Parmi les sujets abordés, celui de la surinondation. Qui est responsable ? Qui finance et comment ?
Le délicat sujet des inondations en terres agricoles

« En cas d'inondations naturelles, ce sont les assureurs qui paient. En cas de surinondation, c'est le Code civil qui régit. Si la main de l'homme intervient, c'est lui qui est responsable », explique Gilles Renaud, en charge de l'urbanisme et de l'aménagement foncier au sein de la chambre d'agriculture de la Meuse, à l'occasion de la journée organisée par l'APCA le jeudi 1er décembre. Pour illustration, les digues construites en amont par des maîtres d'ouvrage peuvent provoquer une surélévation de l'eau. C'est bien cette surélévation que ne veulent pas couvrir les assureurs. En parallèle de la responsabilité, la question du financement des indemnisations se pose aussi. À l'heure actuelle, les collectivités à tous les niveaux (régions, départements, communes et intercommunalités) sont en charge de l'entretien et de la restauration des cours d'eau et des ouvrages de protection contre les crues (loi de 2014). À partir du 1er janvier 2018, ces travaux seront confiés exclusivement aux communes avec les fameux « Gemapi » (gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations). « L'inquiétude est globale sur la capacité financière à pouvoir créer un fonds lorsque l'on voit à quel point l'État ponctionne sur les budgets des communes. Comment va-t-on pouvoir créer une ligne budgétaire pour indemniser ? » analyse Gilles Renaud. Afin de répondre à ce défi, la loi prévoit la possibilité pour les communes de lever une taxe sur leur territoire, plafonnée à 40 euros par habitant. « Il faut confier cela à des structures permanentes telles que les agences de l'eau. Il faudrait avoir une redevance de bassin, de l'ordre de 0,3 % du contrat des assurances, payée par la totalité des personnes du bassin, et pas seulement par les agriculteurs. Je plaide pour cette vision de l'indemnisation », suggère plutôt Daniel Marcovitch, président de la commission mixte inondations (CMI), une structure créée dans le but de faire dialoguer les différentes parties concernées.


Assurance et construction en zones inondables


« On protège d'abord les biens et les services, jamais on ne discutera là-dessus ! Mais il faut savoir que quand on inonde un champ volontairement, avec 20 cm d'eau pendant plus de 48 heures, la culture elle est morte ! », souligne Joël Lhospital, président de la FDSEA de l'Aube. La profession agricole qui dénonce au passage des situations parfois invraisemblables. Dans certains cas, des champs sont inondés afin d'éviter des dommages aux habitations construites elles-mêmes dans le lit majeur d'un cours d'eau. Concernant le volet assurantiel, les agriculteurs déplorent un système inadapté aux conditions vécues depuis maintenant plusieurs années. « Ça fait 3-4 ans que les exploitants agricoles n'ont plus de récolte et donc ne peuvent pas déclencher l'aléa climatique ! », dénonce Joël Lhospital. La logique du rendement historique, basée sur la moyenne des cinq dernières années (en retirant l'année la plus basse et la plus haute), semble être de plus en plus remise en question par la profession.


Culture de la mémoire


« La mémoire paysanne, il faut savoir l'écouter », évoque André Bernard, président de la chambre d'agriculture du Vaucluse. Une notion citée à plusieurs reprises dans les échanges et directement reliée à celle de la confiance. « Ne surtout pas mésestimer cette notion de confiance avec le monde agricole », ajoute Patrice Garin, chercheur à l'Irstea. Selon lui, un bon diagnostic en amont permet d'éviter la situation « de passage en force ». Le rôle du monde agricole dans cette culture de la mémoire est puissant.