Le marché des bovins allaitants révèle les problématiques de la filière

En jeunes bovins comme en vaches allaitantes, les cours ne sont pas au beau fixe, selon la lettre de conjoncture de l’Institut de l’élevage (Idele) de mai. La hausse saisonnière escomptée
ne s’est pas manifestée. Par contre, le cours des vaches laitières, lui, grimpe, tiré par la demande en viande hachée et par un marché européen allégé. L’écart entre les cours des animaux de type de laitier et de type allaitant se réduit de fait, d’où l’impérieuse nécessité de travailler sur la qualité de la viande pour la filière. Le but : obtenir une meilleure segmentation de marché entre la viande issue de vache allaitante et celle issue de vache laitière. En outre, pour Jean-Pierre Fleury, président de la Fédération nationale bovine (FNB), le nouveau mode d’étiquetage des viandes, mis en place en décembre 2014, ne favoriserait pas cette segmentation. Effectivement, à nom, mode de cuisson et tendreté égaux, le prix fera la différence, mais pas le type de vache. Et si le prix fait la différence, le type laitier l’emportera, comme il l’emporte déjà dans le secteur du steak haché. Quelle place conservera alors la viande de vache de type allaitante dans les rayons ?
Viser la qualité et une meilleure segmentation de marché
Dans son communiqué du 12 mai, à la suite de la réunion de crise entre les acteurs de la filière viande bovine, le ministère de l’Agriculture a répondu à la demande de la FNB. Il a annoncé
qu’« une mission » serait « diligentée de façon à évaluer l’impact de l’étiquetage des viandes en libre-service » dans la distribution, tout en affirmant son soutien à la filière pour « une amélioration qualitative » des viandes. Il a vivement incité les acteurs de cette filière à « s’organiser […] pour saisir de nouvelles opportunités tant sur le marché intérieur qu’à l’export ». Effectivement, avec la prochaine modification du statut de la France vis-à-vis de l’ESB (encéphalopathie spongiforme bovine), de nouveaux marchés exports comme la Chine devraient s’ouvrir, d’où la récurrence de ce sujet surtout dans un contexte de prix bas. À l’heure actuelle, l’export en viande semble être en perte de vitesse, notamment vers l’Europe du Sud, ce qui contribue à faire pression sur les cours de la viande. D’après l’Idele, « les opérateurs français » ont dû « concéder des baisses de prix pour préserver des volumes. Même si la viande polonaise s’est renchérie sous l’effet de la baisse de l’euro face au zloty, elle demeure toujours beaucoup moins chère et encore plus abondante qu’à l’automne dernier. » En vif, par contre, les exportations se tiennent mieux depuis le début de l’année, notamment vers la Lybie, le Liban et l’Algérie.
L’export, une bouffée d’air très attendue
Stéphane Le Foll « croit en l'avenir de la viande » puisque qu’après un comité export, créé il y a un an, il a annoncé la nomination, le 12 mai, d’« un inspecteur général dédié à ces problématiques d’export », Jean-Luc Angot, actuellement directeur général adjoint de la direction générale de l’agriculture et de l’alimentation. Il « compte sur la responsabilité des professionnels pour conquérir de façon durable de nouveaux marchés », y compris français avec la restauration hors domicile. Dominique Langlois, directeur de SVA Jean Rozé, justifie la difficulté de prendre des parts de marché à l’export par la concurrence très forte de l’Inde, de l’Amérique du Sud, du Brésil… « La viande reste un produit cher. Chercher des marchés export est un travail de long terme », souligne-t-il. Dans ce contexte, les négociations dans le cadre de l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis sont plutôt, par contre, très mal vues. « La France portera une grande attention aux morceaux nobles des carcasses, qui font la rentabilité de la filière allaitante française (notamment l’aloyau) afin de limiter au maximum les contingents sur ces pièces », a rassuré le ministre le 5 mai.