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AGRESTE

Les fermes bovines européennes ne sont pas rentables sans les aides Pac

En 2023, en Union européenne, les revenus nets moyens des exploitations spécialisées en bovins viande sont équivalents aux aides Pac reçues. 

Les fermes bovines européennes ne sont pas rentables sans les aides Pac
En France, c’est la dimension des exploitations de bovins viande qui compense le revenu net par hectare, bien plus faible que la moyenne européenne.

Le service statistique du ministère de l’Agriculture, Agreste, a passé en revue et comparé les résultats économiques de 251 000 exploitations spécialisées en bovins viande de treize pays européens1. Leur bilan (556 000 € - K€) est majoritairement composé à l’actif de foncier (296 K€), alors que le cheptel reproducteur et non reproducteur n’excède pas 80 K€. Mais dans les pays où les agriculteurs sont propriétaires de leurs terres, très chères à l’achat, le foncier est écrasant : 2 100 K€ sur 2 600 K€ à l’actif au bilan en moyenne au Danemark, 782 K€ sur 895 K€ en Irlande, quand les éleveurs français ne détiennent que 40 K€ sur un actif total de 502 K€. Mais les terres détenues sont souvent en pleine propriété. Seuls les éleveurs danois et néerlandais sont fortement endettés pour en financer l’acquisition.

En France, des exploitations plus grandes

A l’échelle des treize pays, on distingue les dizaines de milliers d’éleveurs contraints de faire face à des frais généraux, des amortissements et des frais financiers très élevés (85 K€ à 150 K€ par exploitation et par an) et les autres bien moins pénalisés (15 à 20 K€ par an). La France, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Danemark regroupent cette première catégorie de producteurs ; les pays méditerranéens et l’Irlande la seconde, puisque leurs animaux n’ont pas systématiquement besoin d’être à l’abri l’hiver. Dans la plupart des pays plombés par des charges de structure démentielles, la productivité globale en pourcents (produits totaux/charges x 100) est plus faible (autour de 90 %) que dans la seconde (> 100 %). Mais dans chacune de ces deux catégories, les Pays-Bas (104 %) et l’Irlande (94 %) sont deux pays à part.

Ces différences entre pays européens expliquent pourquoi la ferme européenne en bovins viande moyenne (59 ha, 57 têtes et 556 K€ de capitaux), représentative des 251 000 exploitations référencées dans treize pays, ne reflète pas pour autant leur diversité. En France, les fermes sont les plus grandes de l’Union européenne (123 ha, 122 bêtes) avec seulement 40 K€ de foncier en propriété sur 502 K€ à l’actif au bilan. La valeur moyenne du cheptel reproducteur (120 K€) est aussi la plus importante de l’Union et, fait rare, supérieure au cheptel non reproducteur (75 K€). L’Espagne est dans le même cas de figure.

Degré d’intensification 

Dans les autres pays, les fermes en bovins viande détiennent davantage de cheptels non reproducteurs que de vaches allaitantes (94 K€ versus 26 K€ au Danemark). Ces animaux à rotation rapide permettent de dégager des chiffres d’affaires proportionnellement plus élevés sur des surfaces moins importantes (37 ha en Irlande, 85 ha au Danemark) qu’en France (122 ha). En 2023, le revenu net moyen de l’ensemble des 251 000 exploitations européennes en bovins viande était de 22 K€, équivalent aux aides Pac versées (23 K€). Les frais généraux n’excèdent pas 25 K€ et la productivité est de 103 % (production brute rapportée aux charges). La Belgique fait partie des pays où ce revenu net (42,5 K€) est supérieur aux aides Pac (33 K€), la France, des pays où il est inférieur (30 K€ versus 53 K€) comme l’Irlande (13 K€ versus 17 K€). En fait, le revenu des producteurs de bovins viande dépend, dans certains pays, de la dimension de leur exploitation et, dans d’autres, du degré d’intensification de leur pratique d’élevage. En Pologne, le revenu net de 7 K€ sur des exploitations de 19 ha est quatre fois plus faible que la moyenne française (30 K€) sur des exploitations six fois plus petites. Aussi, rapporté à l’hectare (360 €/ha), il est proche de la moyenne européenne (372 €/ha) sur des exploitations trois fois plus petites tout en étant plus performant qu’en France (250 €/ha). A contrario, la Belgique (61 ha) dégage un revenu net de 42 K€ versus 30 K€ en France (122 ha), car les pratiques d’élevage sont plus intensives. Par hectare, le revenu net est plus de deux fois supérieur (640 €/ha versus 250 €/ha). Dans l’Hexagone, c’est la dimension des exploitations qui compense le revenu net par hectare, bien plus faible que la moyenne européenne. Mais au Danemark (12 K€ par exploitation ; 141 €/ha), les éleveurs sont plombés par leurs charges de structure (150 K€), alors que leur chiffre d’affaires est supérieur de moitié aux exploitations françaises et belges ! 

1 Année de référence 2023 pour des raisons d’accessibilité aux chiffres comptables. 

Actuagri