Les agriculteurs manifestent à Grenoble
À l’appel de la FDSEA et de JA Isère, les agriculteurs ont exprimé leur ras-le-bol ce vendredi 26 septembre devant la préfecture de l’Isère dénonçant les menaces qui pèsent sur leur activité : budget PAC, accords internationaux, concurrence déloyale, gestion de l’eau, pression du loup et crise sanitaire.
Le Mercosur, le budget de l’Europe, la dermatose nodulaire contagieuse figurent parmi les grands sujets qui ont alimenté la rencontre d’une heure et demie entre une délégation d’agriculteurs des syndicats FDSEA de l’Isère et Jeunes agriculteurs et la préfète de l’Isère, Catherine Seguin, vendredi 26 septembre en préfecture.

Jérémy Jallat, Aurélien Clavel et Jérôme Crozat, syndicalistes de la FDSEA38 et responsables de la Chambre d'agriculture de l'Isère. C ID TD
Les agriculteurs avaient prévenu du lancement des mobilisations pour rappeler que les sujets qui énervent la profession sont toujours sur la table et que d’autres se rajoutent.
Une quarantaine d’agriculteurs, représentant toutes les filières, sept tracteurs et trois moutons ont donc investi dans le calme le devant de la préfecture, en fin de matinée.
L'effondrement de l'agriculture
La signature de l’accord sur le Mercosur rendrait possible l’arrivée d’Amérique du Sud de 100 000 tonnes de viandes blanches et autant de viande rouge, « mais aussi du miel », qui alertent les producteurs.
« Bœufs aux hormones de croissance, aux antibiotiques, ce sont autant de produits interdits en France. Donc nous voulons un non ferme du Président de la République », assène Jérémy Jallat de la FDSEA de l'Isère.
Il cite par ailleurs l’exemple du maïs grain du Brésil et d’Argentine pour lesquels 178 molécules sont autorisées « et sur ces 178, 92 sont interdites en Europe et 138 en France ».
Il ne croit pas aux clauses miroir, persuadé que la France n’a pas les moyens de contrôler ces produits d’importation.
Jérémy Jallat met en perspective cette ouverture de marché vers plus de libéralisme avec la réduction de 20 % du budget de la PAC annoncée pour 2027. « C’est l’effondrement de l’agriculture », assure le syndicaliste.
Aurélien Clavel, le président de la Chambre d’agriculture, poursuit sur les distorsions de concurrence, entre la France et certains pays d’Europe autorisés à utiliser des molécules interdites, dont l’acétamipride qui a tant fait débat.

Des produits aux origines douteuses. C ID TD
« Il faut prendre conscience que la France perd en productivité dans la plupart de ses filières », déclare-t-il.
« Un complotisme irresponsable »
Quant à la crise de la DNC, qui concerne désormais deux zones et couvre cinq départements, Jérôme Crozat rappelle que réunis en début de crise avec la Direction générale de l’alimentation, quatre syndicats sur trois – la FNSEA, JA et la Coordination rurale – s’étaient prononcés pour la stratégie de vaccination/dépeuplement.
La Confédération paysanne était contre et la Coordination se ravise aujourd’hui sur les réseaux sociaux.
« Mais tout ne se résoudra pas sur les réseaux sociaux », assène Jérôme Crozat. « Ne pas abattre est un choix égoïste car tous nos voisins risquent d’être touchés et c’est toute une économie qui peut s’arrêter. On ne peut pas remettre en cause un protocole sanitaire et entrer dans un complotisme irresponsable ».

Casse-croûte convivial devant la préfecture. C ID TD
L’épineuse question de descente d’alpage pour les bêtes encore bloquées en montagne a été abordée.
La doctrine reste inchangée. Les bêtes en estives en zone réglementées ne peuvent regagner leur siège d’exploitation s’il est situé en zone indemne.
Elles pourront le faire après 45 jours sans aucun nouveau cas survenu dans la zone et à condition que la couverture vaccinale soit suffisante.
Le syndicalisme et la Chambre d’agriculture de l’Isère ont lancé un appel pour trouver des pâturages dans la plaine à ces animaux.
« Tous ne pourront pas être logés dans des bâtiments », explique Aurélien Clavel, le président de la Chambre d’agriculture, mais des solutions de solidarité se dégagent.
Environ 350 bovins sont concernés dans les alpages de l’hiver. « Il faut aussi tenir compte du surcoût de travail de ceux qui accueillent », mentionne le responsable.
Des pertes économiques
C’est sur cette ligne que le syndicalisme majoritaire a interpellé la préfète de l’Isère. Jérôme Crozat estime entre 500 000 euros et un million d’euros les pertes économiques dans la zone réglementée.
Si le dépeuplement des troupeaux fait l’objet d’une prise ne charge de l’Etat pendant 9 mois, en revanche c’est tout un secteur où la viande et surtout les veaux subissent une dérégulation du marché.
Jérôme Crozat s’interroge aussi sur le déplacement du dernier foyer dans le Rhône à 100 km du premier en Savoie. « Des erreurs qui coûtent cher à tout le monde ».
Les syndicats FDSEA et JA demandent donc aussi à l’Etat de faire des contrôles « pour que tout le monde respecte la loi ».

Des moutons à Grenoble parce que toutes le siflières sont concernées par les difficultés de l'agriculture. C ID TD
Les questions du stockage de l’eau et des normes environnementales ont aussi largement été évoquées.
Pour Jérôme Crozat, ce rendez-vous était « un avertissement ». mais il propose de « se réinviter à Grenoble qui est aussi notre préfecture pour faire découvrir aux Grenoblois notre façon de penser et d’agir, montrer que nous sommes ouverts au débat. C’est comme ça que notre pays avancera ».

Catherine Seguin, préfète de l'Isère, s'entretient avec Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'Isère. C ID TD
Signe d’écoute mutuelle, la préfète Catherine Seguin, le DDPP Jean-Luc Delrieux et le DDT François Gorieu ont partagé le casse-croûte avec les agriculteurs devant la préfecture.
Isabelle Doucet