« Nous avons pour mission de préserver l’équilibre des territoires »
Au cœur du Sommet de l’élevage à Cournon-d’Auvergne, le président de la Fédération nationale des Safer, Thierry Bussy, est revenu sur les enjeux des filières d’élevage et les missions de la Safer. Entretien.
Quels sont, selon vous, les enjeux que les filières d’élevage doivent relever demain ?
Thierry Bussy : « En dix ans, la France a perdu 30 % de ses éleveurs et contrairement à ce que l’on veut bien nous dire, la consommation de viande ne baisse que très peu. Face à cette réalité de diminution quand même vertigineuse, l’enjeu primordial, à mon sens et pour l’ensemble des Safer, est le renouvellement des générations. La conjoncture semble aujourd’hui s’améliorer, et j’espère que cette tendance se confirmera pour infléchir cette courbe démographique, et ce malgré les crises sanitaires - comme l’actuelle dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNCB) - qui, malheureusement, se multiplient, accentuées par le changement climatique. L’élevage est primordial pour nos territoires. Il est garant de son aménagement et d’une réelle économie locale. Il ne faut pas l’oublier. »
Comment les Safer, dont vous présidez la Fédération nationale, peuvent-elles s’inscrire dans ce défi aux côtés des éleveurs ?
T. B. : « Nous nous devons d’être proactifs pour anticiper beaucoup plus les cessions d’exploitation. Nous devons davantage échanger en amont. Le capital d’exploitation est également un réel sujet sur lequel nous devons nous pencher avec les organisations professionnelles agricoles (OPA) bien sûr, mais surtout avec l’État. Cependant, l’instabilité politique qui dure depuis plus d’un an complique fortement ce dialogue. Il serait notamment urgent de créer un financement bien spécifique pour la reprise d’une exploitation agricole, mais, là encore, en l’absence d’un gouvernement stable, il est impossible d’échanger. »
La consommation foncière masquée est une réelle problématique soulevée par les Safer il y a quelques années. Comment la lutte s’organise-t-elle ?
T. B. : « Au sein des Safer, nous suivons de très près la question de la consommation foncière masquée, qui progresse souvent sans réelle visibilité ni contrôle. Trop souvent, chacun cherche à tirer profit du foncier selon ses propres intérêts, mais nous, les Safer, nous avons pour mission de préserver l’équilibre des territoires et de servir l’intérêt général. Il est essentiel que chacun prenne ses responsabilités et que l’État fasse respecter les règles. Malheureusement, dans le contexte actuel, cela reste très difficile. »
En cette heure politique compliquée, quel est votre sentiment ?
T. B. : « Politiquement, nous n’avons jamais connu une telle situation et cela suscite de réelles inquiétudes. Ce qui se passe au niveau national fragilise l’intérêt général, notamment sur les plans économique et agricole. L’agriculture, comme les autres secteurs d’activité, repose sur le travail de femmes et d’hommes engagés qui défendent leur territoire. Il ne faut pas réduire l’agriculture à la seule production alimentaire : quand on parle agriculture, on parle également d’aménagement du territoire. Il est urgent que nous retrouvions une stabilité politique dirigée par des personnes connectées aux réalités du terrain. »
Propos recueillis par Marie-Cécile Seigle-Buyat
Le congrès national des Safer 2026 se tiendra à Aix-Les-Bains
En décembre 2026, Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) accueillera le congrès national des Safer. « Ce congrès national a lieu tous les deux ans et il change de région à chaque édition, explique le président de la Safer Aura, Gilles Flandin. Nous alternons entre une assemblée des territoires à Paris et ce congrès. Ainsi, l’année prochaine, nous accueillerons entre 500 et 600 personnes au Centre des congrès d'Aix-les-Bains en Savoie. » Si la sobriété devrait être au cœur de cet événement national, la thématique de ces deux jours reste encore à être déterminée. « Pour le moment, nous sommes dans la logistique », sourit le président régional.