« On ne sait plus où mettre nos bêtes »
La préfète de l’Isère a réuni les instances lundi 20 octobre pour faire le point sur la DNC et ses incidences en Isère. La FDSEA demande un renforcement des contrôles.
Suite à la découverte d’un nouveau foyer dans l’Ain, le 14 octobre, et aux décisions prises par la ministre de l’Agriculture Annie Genevard de mesures renforcées sur les mouvements de bovins, la préfète de l’Isère, Catherine Seguin, a organisé une réunion de crise, le 20 octobre (1).
Catherine Seguin, préfète de l'Isère. C ID TD
« Le département de l’Isère, qui ne compte aucun foyer, est concerné par trois zones réglementées (ZS1, ZS2 et ZS5) et 179 communes sont en zone de surveillance », indique la préfecture.
Les services de l’État précisent que la levée de la première zone réglementée (ZS1), le 21 octobre, permet à 113 communes de l’Isère (530 élevages 48 000 bovins), depuis 22 octobre, d’être en zone vaccinale, avec de nouvelles règles de mouvement assouplies.
« Des mouvements d’animaux sont à l’origine de l’extension de la maladie », a clairement exprimé la préfète pour expliquer le durcissement des mesures prises à l’échelle nationale face à la dégradation de la situation.
Elle a salué la responsabilité des professionnels isérois qui ont devancé, dès cet été, l’interdiction de rassemblements, par principe de précaution.
Surveillance renforcée
« De toutes ces mesures, une ne nous satisfait pas. C’est celle de l’interdiction des bovins à l’export », a déclaré Jérôme Crozat, le président de la FDSEA de l’Isère.
Il a signalé que les bâtiments sont pleins d’animaux, entre ceux descendus des alpages et la période de vêlage qui bat son plein. « On ne sait plus où mettre nos bêtes, c’est une réalité », a-t-il lancé.
Jérome Crozat, président d ela FDSEA de l'Isère. C JME TD
Il a également fait part des inquiétudes financières des éleveurs et du risque de perte de valeur sur des bêtes d’exception. D’autant que ces mesures d’interdiction de sortie du territoire français sont intervenues alors que la FNB négociait des accords avec l’Espagne et l’Italie.
Il estime que la perte économique liée aux mesures de limitation de mouvement des animaux s’élève en Isère à 1,5 million d’euros. « S’il y avait eu moins de temps perdu en Savoie dans la ZR1 à écouter des personnes qui se sont rassemblées par centaine dans des exploitations qui auraient dû être confinées, nous n’en serions pas là. »
Il ajoute : « L’extension dans le Rhône et le Jura nous pose question » et propose d’affecter « les agents de l’OFB pour donner un coup de pouce » aux services de l’État pour prévenir les actes de malveillance.
La gendarmerie a assuré qu’elle renforçait la surveillance sur le terrain « non pour embêter les éleveurs, mais pour les protéger des exactions faites par une toute petite minorité qui peut faire beaucoup de mal à la majorité du secteur ».
La préfète de l’Isère précise que « les exploitants qui enfreindraient ces règles s’exposent à de lourdes amendes » : 700 € par bovin et jusqu’à 1 500 € par bovin en cas de récidive.
Vaccination totale
De son côté, René Féchoz-Christophe, le président de la MSA Alpes du Nord, a enjoint les services de l’État « à aller voir les agriculteurs qui n’ont pas vacciné leurs bêtes pour les obliger à le faire. Sinon, on ne s’en sortira jamais. Des agriculteurs ont sacrifié leurs troupeaux pour les autres », a-t-il martelé. I
l a annoncé des remises de cotisations jusqu’à 5 000 euros pour les éleveurs concernés, tout en ayant « peur de ne pas trouver les fonds ». Aussi a-t-il demandé que les négociations en cours concernant la convention d’objectif et de gestion (COG) (2) « soient à la hauteur ».
Jérôme Crozat a renchéri en demandant l’état d’avancement du taux de vaccination département par département, ne pouvant se satisfaire d’une couverture incomplète. « S’il reste 2 % d’animaux à vacciner, il faut les finir, plaide-t-il. Sinon, on se retrouve dans un cas comme le dernier foyer de l’Ain ».
Les responsables agricoles ont aussi fait valoir « le mauvais calcul » de ne pas vacciner les broutards, encourant des risques d’impossibilité de les vendre à l’export.
Compteurs remis à 0
Aurélien Clavel, le président de la Chambre d’agriculture de l’Isère, a réclamé « plus de sévérité pour les mouvements d’animaux qui ne respectent pas les règles. Car beaucoup de départements sont à la traîne. »
Aurélien Clavel, président de la Chambre d'agriculture de l'Isère. C JME TD
Il a aussi demandé d’avancer la date de fin d’interdiction de l’export au lundi 3 novembre pour faciliter la reprise des transactions dans la filière bovine.
Le président de la chambre d’agriculture fait aussi valoir « la grosse injustice » qui touche les exploitations concernées par la ZR5 en Isère (18 communes, alors que 24 étaient initialement pressenties, soit 28 élevages et 2 900 bovins).
Leurs compteurs ont été remis à 0 « alors que le département a joué le jeu, que la vaccination dépasse les 95 % dans la zone, mais qui vont être bloquées encore pendant 45 jours. C’est désastreux ».
Deux exploitations ayant accueilli des bêtes descendues d’alpage pour le compte d’éleveurs de départements voisins sont notamment touchées. Aurélien Clavel demande que « le travail fait sur la nouvelle zone soit mieux pris en compte » et surtout que les scenarii de sortie de crise « soient pris en concertation avec les départements ».
Suite à cette réunion, Jérôme Crozat rappelle que les éleveurs qui accueillent en pension des bêtes bloquées en zone DNC peuvent réclamer l’aide financière de 2 € par vache et par jour. Les dépôts de dossier doivent se faire par le preneur en pension auprès des DDT (3).
Isabelle Doucet
(1) Étaient conviés : les parlementaires, les représentants des maires et les présidents d’EPCI, les représentants des services de l’État et la chambre d’agriculture et les représentants du monde agricole.
(2) Convention d’objectifs et de gestion signée entre l’État et la MSA pour la période 2026-2030.
(3) Le dépôt des demandes d’aide se fera via la plateforme Mes démarches simplifiées jusqu’au 10 novembre 2025 à 23 h 59 au lien suivant : https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/ddt38-fondsurgence-dnc-pension
La nouvelle zone vaccinale
Conditions aux mouvements applicables en ZV à partir de mercredi 22 octobre (actuelle ZR1 sauf communes aussi en ZR5) :
- Mouvements au sein de la Zone vaccinale : sans conditions et sans Laissez-Passer.
- Mouvements en élevage pour sortir d’une ZV vers une autre ZV (la ZR 2 devrait devenir ZV début novembre) : Laissez-passer et vaccination requise pour l’unité épidémiologique.
- Mouvements en élevage de la ZV vers la ZI : visite du vétérinaire dans les 48 heures précédant le mouvement, Laissez-Passer, vaccination pour l’unité épidémiologique et animaux présents dans l’exploitation depuis 28 jours.*
* pour les cheptels qui étaient bloqués en descente d’alpage et dont les bovins sont entrés en pension dans un cheptel en ZR, une exception sera faite.
- Mouvements élevage de la ZV vers une ZR ; interdit (sauf cas particulier à voir avec DDPP : même EDE et communes proches, LPS obligatoire)
- Mouvement élevage depuis la ZI vers la ZV : possible avec vaccination à l’arrivée des bovins tant que la vaccination reste obligatoire.
- Mouvements vers abattoir hors ZV (Grenoble, La Mure) : LPS obligatoire sans visite du vétérinaire. Transport sans rupture de charge et abattage dans les 24 heures.
- Mouvements vers abattoir dans la ZV : pas de Laissez-Passer ni de visite vétérinaire.
(source : GDS Isère)