Ovinpiades Rhône-Alpes : un concours très pro

« Celui-là, il est fini. Le 87, il est moyen. Je sens encore l'arête... » Le geste sûr, Matthieu tâte les agneaux comme un pro. Guy Mathevon et Thierry Bonte, techniciens reconvertis en jury « NEC agneau » (note d'état corporel), hochent la tête. « Il se débrouille pas mal... » D'autres candidats ont en effet la main moins heureuse. Car tous n'ont pas le même parcours ni la même pratique. Sur la quarantaine d'élèves venus des quatre coins de la région Rhône-Alpes participer à la finale Rhône-Alpes de la 9ème Ovinpiades des jeunes bergers, on remarque vite ceux qui ont la vocation : beaucoup de fils d'éleveurs, certes, mais pas seulement. « Les niveaux sont très hétérogènes. On voit la différence entre ceux qui savent manipuler et ceux qui ont une formation plus générale, pas spécifiquement ovine », relève Jean-François Didier, éleveur dans la Drôme et jury « NEC brebis ».
Huit lycées en lisse
Agés de 16 à 24 ans, les jeunes - de niveau Capa à BTS - représentent huit établissements de la région : le lycée agricole Edouard Herriot (Ain), le Lap d'Annonay (Ardèche), la MFR de Divajeu (Drôme), le Lap Etienne Gautier, les lycées agricoles de Montbrison Précieux-Saint Genest Malifaux et de Roanne Chervé (Loire) et bien sûr celui de la Côte-Saint-André, qui accueille les épreuves. A en juger par les éclats de rire et l'attitude décontractée des candidats, l'ambiance est plutôt bonne. « C'est sympa, il n'y a pas d'esprit de compétition, témoigne Bénédicte, en BTS production animale au lycée Etienne Gautier. Même si certaines épreuves ne sont pas évidentes...
La jeune candidate fait allusion à l'épreuve de génétique, au cours de laquelle il faut choisir un bélier parmi un lot de races différentes en fonction d'un objectif donné (améliorer la valeur laitière par exemple). Avec l'épreuve sanitaire, qui consiste à citer les principales classes de médicaments, décrire la méthode d'examen d'un mouton malade et savoir poser un diagnostic, l'épreuve de génétique représente l'une des deux spécificités de la finale Rhône-Alpes. « Ce sont deux aspects du métier d'éleveurs qui nous paraissent importants, explique Estelle Ginon, la coordinatrice régionale de l'épreuve. Nous voulions que le concours soit très complet et qu'il passe en revue toutes les facettes du métier. Il faut que les candidats aient de bons réflexes : comment repérer un animal malade, quels sont les premiers gestes avant l'arrivée du vétérinaire, comment conduire un troupeau... »
Organiser la relève
Pour sympathiques qu'elles soient, ces Ovinpiades n'ont en effet rien d'anecdotique. Organisées par Interbev Ovins, avec la complicité de l'enseignement agricole, elles ont avant tout pour vocation de promouvoir le métier et de susciter des vocations chez les jeunes. Car il y a urgence. Il existe en France 21 400 éleveurs ayant des troupeaux de plus de 50 brebis (source : aide ovine nationale août 2013). Près de 60% d'entre eux partiront à la retraite d'ici une dizaine d'années. Il faut donc organiser la relève. On estime à 8 000 le nombre de jeunes éleveurs qui devraient s'installer pour consolider la filière. Mais le métier de berger n'attire guère les jeunes. « Quand on discute avec eux, on voit tout de suite leur motivation et leurs réticences, atteste Thierry Bonte, technicien à la coopérative Provalp. Beaucoup ont une image d'une production à l'ancienne, qui représente beaucoup de boulot mal payé. A nous de leur montrer que les choses ont évolué. Le problème, c'est que les élèves font très peu de travaux pratiques. Ils n'ont pas l'occasion de constater l'évolution de la technique sur le terrain. Or pour avoir un revenu correct, il faut être technique. »
Quand on les voit à l'action, les candidats n'ont pourtant pas l'air manchots. Parage des onglons, tri des brebis au bâton électronique, évaluation de l'état d'engraissement des agneaux, test de reconnaissance des races, les épreuves requièrent une certaine expérience. « On voit tout de suite ceux qui ont de la pratique », note un membre du jury. Et parmi eux, deux sortent du lot : Samuel Marthouret (BTS Production animale au lycée Edouard Herriot de Cibeins) et Laurine Demeure (BTS Production animale au Lap Etienne Gautier de Ressins). Les deux jeunes bergers ont désormais un nouveau défi à relever : défendre les couleurs de la région à la finale nationale qui se déroulera au salon de l'agriculture le 22 février prochain.
Marianne Boilève
Les Ovinpiades en chiffres
700 candidats et 90 établissements dans toutes la France4 épreuves au niveau national (épreuve théorique sous forme de quizz, tri des brebis avec le bâton de lecture électronique, parage et note d'état corporel des brebis) et 3 de plus en Rhône-Alpes (tri d'agneaux de boucherie, épreuve génétique, épreuve sanitaire)
19 sélections régionales
38 candidats sélectionnés pour la finale nationale
40 élèves sélectionnés en Rhône-Alpes pour la finale régionale, dont deux représenteront la région lors de la finale nationale le 22 février à Paris