Des projets de reconquête dans le Grésivaudan
Les agriculteurs du territoire ont été invités à partager leurs projets dans le cadre de la mise en œuvre du PAEN du Grésivaudan.
Le PAEN du Grésivaudan entre dans sa phase opérationnelle. Il concerne 13 communes (1) et plus de 8 360 ha. À l’initiative de la Chambre d’agriculture, du Département et de la Communauté de communes Le Grésivaudan, les agriculteurs du secteur ont été conviés à deux reprises à faire part de leurs projets qui pourraient émerger dans le cadre du programme d’action associé au périmètre. Celui-ci compte six grands axes : le foncier ; l’agriculture ; le lien social et sociétal ; la forêt ; la ressource en eau ; le patrimoine naturel et paysager.
Plus d’une vingtaine d’agriculteurs ont répondu présent à la première des réunions organisées à Crolles.
Le Périmètre de protection des espaces agricoles, naturels et forestiers a fait l’objet d’une délibération du Conseil départemental le 28 mars dernier, après l’enquête publique qui s’est déroulée à l’automne 2024.
Delphine Stoppiglia, chargée des procédures d’aménagement foncier rural au Département, a indiqué que le programme d’action dispose d’une enveloppe de 500 000 € sur cinq ans pour les projets. Le taux de subvention en fonctionnement est de 80 % avec un plafond de 10 000 € par projet et de 50 % en investissement, avec un plafond de 20 000 €. Le Département subventionne l’animation du programme à hauteur de 20 000 €. La technicienne précise que d’autres subventions — spécifiques à certains programmes — sont mobilisables, de la part de la Région, du Département ou de la Communauté de communes, les subventions du PAEN venant compléter les dispositifs existants. Des idées, des envies, des intentions, ils en ont exprimé à foison. Il faudra peut-être encore un peu de temps avant qu’elles ne se concrétisent en projets, mais le processus est lancé et entre dans sa phase concrète. Entre les balcons et la plaine, le périmètre se caractérise par la diversité des productions agricoles qui s’y déploient… et la diversité des attentes.
Dans les coteaux
« C’est dans les coteaux qu’il y a la plus grande réserve foncière disponible », indiquait Wilfrid Debroize, viticulteur au Touvet, fort de son expérience du PAEN de sa commune. Ces parcelles enfrichées furent jadis travaillées. C’est le lot de tous les contreforts de la Chartreuse. L’agriculteur suggère de mettre à profit ces surfaces pour lancer de nouvelles cultures « pour faire face au changement climatique et trouver de nouvelles ressources agricoles ». Pourquoi pas des grenadiers, de la noix de pécan ou des amandes ?
Cependant, les agriculteurs ont pointé les difficultés pour identifier et remettre en culture certaines parcelles : démarches administratives lourdes ou problèmes pour obtenir les autorisations de défricher. Les participants ont mis en avant l’intérêt d’effectuer un inventaire des friches. Le Département devrait missionner la Safer afin de procéder à une analyse plus fine du foncier dans le périmètre du PAEN.
Des productions à valeur ajoutée
Car dans le Grésivaudan, le coût du foncier est surtout considéré comme frein à l’installation. Il est là aussi question de reconquête des espaces abandonnés dans les balcons de Belledonne et de partage des savoir-faire entre la plaine et la montagne. « Il faut des moyens pour survivre en Belledonne », lance un agriculteur, d’autant que de nombreux exploitants de montagne sont double actifs. Un autre évoque les limites de la course à l’agrandissement souvent synonyme d’éclatement familial. Il cite la Savoie en exemple : « Une autre approche, avec des productions à valeur ajoutée, et pas les mêmes revenus. » Problème : « Dès que quelque chose marche, on fait tous la même chose : des colis de viande, des yaourts, de la glace ; avant c’étaient les noix et bientôt, ce sera le soja », ajoute une participante. La reconstitution de certaines filières, dans le cadre de démarches collectives, ou la diversification des productions sont des pistes avancées en réunion.
Parmi les axes de travail, la sensibilisation des habitants du territoire au consommé local est apparue comme une priorité.
Sensibiliser
Au-delà, la question du lien social a largement été déclinée, révélant un criant besoin d’une signalisation, homogène, si possible. Les agriculteurs décrivent des tensions au moment des noix ou des châtaignes avec de véritables actes de pillage. « Il faudrait faire passer le message aux enfants et aux enseignants de ne pas faire ramasser les noix dans les noyeraies ! », s’exclame un producteur en citant en exemple un enseignant qui voulait trop bien faire. Informer les gens sur les jours de chasse et sur la nécessité de limiter la pression des sangliers ou encore mettre des panneaux dans les zones agricoles qui sont avant tout des zones de travail sont autant de besoins d’une démarche de sensibilisation collective aux réalités agricoles que les professionnels ont fait remonter
Les échanges ont aussi abordé la gestion forestière, la desserte des parcelles inaccessibles et l’entretien des chemins ruraux, parfois inadaptés aux engins modernes. Sur le volet eau, l’exemple du forage du Touvet dans une exploitation maraîchère a montré qu’il est possible de soutenir des projets agricoles tout en respectant les cadres réglementaires.
Les techniciennes en charge de l’animation du PAEN du Grésivaudan ont proposé aux participants de se rapprocher des structures, notamment de la Chambre d’agriculture de l’Isère et d’Élodie Lemière, pour le montage des dossiers agricoles. D’autres réunions, par secteur ou par projets peuvent être envisagées. Un comité de suivi annuel, composé des élus des structures copilotes, se chargera de donner ses orientations au PAEN et de valider ses actions.
Isabelle Doucet
PAEN Grésivaudan