Accès au contenu
Ecnonomie

Pôle agroalimentaire : la troisième voie de la ferme iséroise

Lors de l'assemblée générale de l'association des agriculteurs du Voironnais, deux techniciens du Pôle agroalimentaire isérois sont venus présenter la démarche et les premières avancées du pôle en cours de structuration.
Pôle agroalimentaire : la troisième voie de la ferme iséroise

Pas toujours simple de porter la bonne parole. C'est pourtant bien la mission que s'imposent les acteurs engagés dans la dynamique du Pôle agroalimentaire isérois. En ce 23 janvier, Geoffrey Lafosse, référent pour la chambre d'agriculture, et Karine Berthaud, chargée de mission au Pays voironnais et à Grenoble Alpes Métropole, sont venus expliquer la démarche aux membres de la toute jeune association des agriculteurs du Voironnais, réunis en assemblée générale à Saint-Nicolas-de Macherin. Après avoir débattu foncier, installation et filières, les agriculteurs ont écouté d'une oreille attentive et critique l'exposé des « perspectives d'évolution » offertes par le Pôle agroalimentaire en cours de structuration.

Rééquilibrage entre l'offre et la demande

Filière par filière, Geoffrey Lafosse commence par évoquer les grandes tendances macro-économiques. « L'agriculture iséroise a un revenu qui dépend de ce qui se passe en France bien sûr, mais aussi en Europe et dans le monde », rappelle-t-il. « Pour le lait, après la crise de 2015, la tendance est à la hausse en raison du rééquilibrage de l'offre et de la demande, notamment en matière grasse. Mais le cycle du lait a eu un effet négatif sur le marché de la viande bovine, avec une phase de décapitalisation importante de la part des éleveurs laitiers. La tendance est aujourd'hui meilleure, surtout pour les mâles : on assiste à moins de décapitalisation laitière et à une réouverture des marchés sur le pourtour méditerranéen. » Pour la volaille ou le porc, le contexte international n'est guère enthousiasmant. Des marchés s'ouvrent, la demande est en forte hausse, mais la montée en puissance de certains acteurs, comme l'Ukraine pour la volaille, fait craindre une concurrence accrue à court terme. Côté grandes cultures, le marché mondialisé et les aléas climatiques mettent les producteurs à la peine depuis plusieurs années.

Les agriculteurs du Pays voironnais ont écouté avec attention la présentation qui leur a été faite du Pôle agroalimentaire, troisième voie pour l'agriculture iséroise, selon ses promotteurs.

Quel volant d'action dans un contexte aussi incertain ? Combien de fermes iséroises sont en capacité d'encaisser les variations du marché mondial ? « L'agriculture française est de plus en plus exposée et celle de notre département n'est pas la plus compétitive », souligne Geoffrey Lafosse. Tout n'est pas perdu pour autant. Les exploitations les plus performantes peuvent se faire accompagner pour s'adapter en permanence au marché, et les plus modestes se tourner vers les circuits courts. « Une troisième voie est également en train d'émerger, avec les nouvelles formes de commercialisation collective, indique le technicien. Elles s'adressent aux exploitations qui ne veulent pas s'inscrire dans un circuit court, mais cherchent à différencier leurs produits et à se regrouper pour les commercialiser de façon à pouvoir assurer des volumes. » C'est la raison d'être du Pôle agroalimentaire.

Relocaliser les productions

« Le pôle n'est ni un endroit physique, ni un lieu : c'est un groupe de travail qui cherche à relocaliser un certain nombre de productions qui, aujourd'hui, quittent le territoire », explique Karine Berthaud. Porté par le Département, Grenoble Alpes Métropole, le Pays voironnais et les trois chambres consulaires (agriculture, commerce et métiers), le Pôle s'est fixé quatre missions : créer du réseau, faire émerger des projets de filières (blé, viande, maraîchage...), faire la promotion des productions locales (notamment à travers une marque dédiée) et travailler à une meilleure utilisation des équipements (MIN, légumerie, abattoirs etc.) et des ressources. Sa finalité est de contribuer à « développer les volumes de production iséroise pour les commercialiser en circuits de proximité à valeur ajoutée », notamment aurpès de la restauration hors domicile (RHD) et de la grande distribution. « La marque, ça peut déclencher l'acte d'achat », reconnaît Jean-Pierre Michallat, agriculteur à Moirans.

Acteurs cherchent légumes

Des diagnostics par filières ainsi qu'un gros travail de prospection ont d'ores et déjà été réalisés. Certaines de ces initiatives ont ainsi abouti à des mises en relation effectives. Le speed metting de mars 2017 (86 participants) a cependant mis en évidence une inadéquation entre une offre abondante en viandes et produits laitiers, « alors que les acteurs cherchent des légumes », précise Karine Berthaud. Pierre-Antoine Veyron, maraîcher à Saint-Jean-de-Moirans, qui travaille avec la grande distribution, fait remarquer que la démarche est « très bonne, mais les gros maraîchers de l'agglo ont ou vont arrêter. Il y a une grosse demande, mais si on n'installe pas des jeunes, on n'y arrivera pas. » Reste à trouver qui va planter des salades et des potirons.

Marianne Boilève