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Démographie

Pourquoi les campagnes se vident, comment elles se remplissent

L'Isère demeure un département dynamique d'un point de vue démographique, même si l'augmentation de sa population doit plus au nombre des naissances qu'à l'attractivité de ses pôles d'activité, avec une situation très contrastée entre les bassins nord et sud.
Pourquoi les campagnes se vident, comment elles se remplissent

Les chiffres de l'Insee sont tombés indiquant une dynamique démographique distincte entre le nord et le sud du département. Pour l'institut national de la statistique, qui délivre les résultats issus des recensements de la population de 2006 et 2011, le Nord-Isère enregistre une croissance soutenue de sa population, bénéficiant de l'attractivité de la métropole lyonnaise. En revanche, l'aire urbaine grenobloise est beaucoup moins dynamique ces dernières années, allant même jusqu'à enregistrer un solde des entrées-sorties négatif. Mais la population iséroise est relativement jeune et les naissances viennent équilibrer le tassement de la dynamique départementale.

30% de population en plus

Au nord du département, c'est donc la frange rhôdanienne et le pôle de Bourgoin-Jallieu qui connaissent les croissances démographiques les plus fortes, non sans poser quelques interrogations d'ordre foncier. Tignieu-Jameyzieu, la plus lyonnaise des iséroises est largement concernée par la prescription de la DTA sur ce que l'on appelle communément la Plaine de Saint-Exupéry, et dont l'objectif est d'accueillir les populations et l'activité économique pour le développement de l'aire métropolitaine lyonnaise. Les agglomérations du Nord-Isère sont à ce titre prioritaires. Ce vaste plan d'aménagement, qui comprendrait la consommation d'un millier d'hectares, n'est d'ailleurs pas sans inquiéter les professionnels agricoles. Pas moins de 30% de population en plus : c'est l'objectif fixé par la DTA aux communes de Tignieu-Jameyzieu, Pont-de-Chéruy et Saint-Romain-de-Jalionas. André Paviet-Salomon, le maire de Tignieu-Jameyzieu avait prévu le coup en révisant son PLU en 2005 pour créer trois zones d'aménagement concertées (Zac). « Elles sont déjà remplies », explique le premier magistrat qui accueille de nouveaux arrivants surtout issus de la région lyonnaise. La commune, qui est passée de 4 000 habitants en 2005 à 6 500 aujourd'hui, s'est rapidement adaptée à son nouveau dimensionnement et a créé en 2010 un centre commercial avec 400 emplois à la clé. Aménagement des routes et des réseaux, création de trois écoles et développement des services, la petite ville, après avoir consommé des friches, se recentre aujourd'hui sur son cœur d'agglomération avec un projet d'écoquartier de 500 logements.

Faire parler les chiffres

Dans le sud du département, c'est une situation bien plus contrastée qu'observent les élus, notamment dans les petites aires alpines. En Chartreuse, dans le Vercors, et sur le plateau matheysin, certains secteurs se vident, le plus souvent en raison d'un vieillissement de la population. Fabrice Marchiol, le maire de La Mure s'interroge sur la notion d'aire urbaine : « 7 100 habitants, je ne vois pas à quoi cela correspond ». Le secteur enregistrerait une légère baisse démographique. Devenu le président d'une communauté de communes de 18 000 habitants, le maire de La Mure (5 343 habitants en 2012 contre 5 334 en 2006) fait parler les chiffres. Oui, la ville ne construit plus de logements sociaux depuis longtemps car son parc en compte 35% ! Il en va du passé minier toujours très présent dans cette commune. « Un cinquième de la ville est une cité minière avec des logements gratuits pour les retraités et les veuves de mineurs. Ce sont des logements sociaux où il n'y a aucune mutation et où la moyenne d'âge est de 80 ans », explique le maire. Les Charbonnages de France compteraient ainsi 600 logements miniers dans le bassin de vie, dont 300 à La Mure. La cité minière a bénéficié d'un programme de rénovation complet et peu à peu, ces logements réintègrent le parc de logements sociaux, tandis que les bailleurs sociaux du secteur démolissent des logements vétustes, faute de demande. « Les choses vont s'autoréguler dans les 10 à 20 ans. Il y a un effet pyramides des âges sur ces parcs locatifs sociaux », poursuit Fabrice Marchiol pour qui le tassement de la population ne trouve « aucune autre interprétation que ce mécanisme très particulier ». Les communes de Susville, La Mure et la Motte-d'Aveillans sont plus particulièrement concernées.

Communes touristiques

Le reste du bassin de vie connaîtrait en revanche une évolution démographique positive, avec ses néo-ruraux et ses mouvements pendulaires avec l'agglomération grenobloise. Pour autant, ce territoire considéré comme rural possède un fort ratio emploi/habitant, qui s'établit à plus de 92%, le plateau ayant su conserver, avec beaucoup de pugnacité, un secteur industriel relativement dynamique. Son point faible est aujourd'hui le développement touristique, notamment sur le segment tourisme de séjour. En améliorant son offre, le territoire pourrait peut-être rejoindre le peloton mené par quelques communes touristiques de montagne iséroises qui ont récemment vu leur population augmenter de façon significative, à raison de +0,6% par an entre 2006 et 2011.

 

Isabelle Doucet
Croissance démographique

La preuve par Beaurepaire

Bénéficiant de la double attraction des couronnes viennoises et rhodanienne et localisée à un quart d'heure de l'échangeur autoroutier de Chonas, l'aire de Beaurepaire a vu sa population fortement augmenter (+1,5%) entre 2006 et 2011. « C'est une tendance qui se confirme, nous sommes situés dans le grand cercle de la vallée du Rhône », souligne le maire de la commune, Philippe Mignot. Plus de population, plus d'activité : les responsables politiques ont cependant fait le choix d'évoluer par paliers « afin que les infrastructures suivent et pour aménager les choses le mieux possible », poursuit-il. Si les nouveaux administrés choisissent Beaurepaire, c'est surtout parce que les conditions d'accession à la propriété y sont plus faciles que dans les centres urbains. Mais le maire reconnaît de réels enjeux fonciers et s'en tient au PLU. « Il y a encore des espaces disponibles et nous avons pour objectif de ramener la population dans le centre bourg car la ville avait tendance à s'étaler à l'extérieur, en particulier dans le secteur nord », explique le maire. Beaurepaire compte 4 770 habitants, son aire urbaine 5 600 et la communauté de communes, 14 000. « Il y a de l'espace pour tout le monde », insiste encore Philippe Mignot, en rappelant les 2 500 emplois locaux, notamment dans les secteurs de la métallurgie et des services, aux côtés d'une traditionnelle activité agricole céréalière.
ID

 

L'Isère en chiffres

Deuxième département de Rhône-Alpes et seizième de France, l'Isère comptait 1 215 000 habitants en 2011, soit 45 700 de plus qu'en 2006 (la population est estimée à 1 227 989 personnes en 2012). Le rythme de croissance annuel de sa population pendant la période a été de +0,8% contre +0,9% entre 1999 et 2006, de sorte que la perspective de 1 343 000 habitants à l'horizon 2020, établie en 2008, devrait être un peu revue à la baisse. Ce département jeune, doit surtout son accroissement de la population à son excédent naturel (les naissances pèsent pour +0,7%) alors que l'attractivité est faible avec seulement +0,1% de population nouvelle.

On comptait 5 011 exploitants agricoles - dont 1 321 femmes - en 2009, contre 6 761 en 1999, passant ainsi de 0,8 à 0,5% de la population de l'Isère. Le secteur employait au total 6 511 personnes en 2009, contre 8 631 en 1999. Avec 7 782 entreprises, l'agriculture, la sylviculture et la pêche représentaient 7,8% des établissements actifs du département en 2010.