Un vent assassin dans la vallée du Rhône

L'orage survenu lundi soir 1er juillet a causé de gros dégâts dans le Haut-Grésivaudan en couchant quelques centaines d'hectares de maïs et en arrachant bon nombre de noyers. Il a également été très virulent dans les Terres froides ou il est tombé 12 mm d'eau en 10 minutes et dans la vallée du Rhône avec des rafales de vent allant jusqu'à 130 km/h.
A Bizonnes, c'est le toit d'un bâtiment d'élevage qui s'est envolé pour retomber sur le bâtiment voisin. Les 70 veaux de boucherie qui y étaient abrités ont été relogés. L'exploitation a vu aussi ses maïs couchés. A quinze jours de la fleur, l'agriculteur a espoir de les voir repartir. Arbres arrachés, tuiles envolées et électricité coupée : le secteur panse ses plaies lui aussi.
Un peu plus au Sud, vers Charnècles, Réaumont, Moirans, Voiron et jusqu'à Tullins, c'est la double peine pour ceux qui avaient déjà eu à subir les orages du mi-juin. Mais il semble que la grêle a été évitée. C'est surtout les rafales de vent, à plus de 100 km/h, qui ont une fois de plus arraché les noyers.
Serres détruites
« C'est pire que le 15 juin », déclare Marie-Claire Tirard-Gatel de la ferme du Grand chemin, une exploitation en maraîchage et arboriculture à Charnècles. « Toutes les serres sont parties à nouveau, constate-t-elle. Il y a beaucoup de chemins communaux et ruraux fermés et des agriculteurs avec leurs tronçonneuses de partout pour déblayer ! » La productrice, qui avait juste terminé de rattacher 300 pieds de tomates, doit « à nouveau tout recommencer » et se demande « quand tout cela va-t-il s'arrêter ? »
Serre arrachée aussi aux pépinières Damien Vivier à Penol. « Le coup de vent a fait éclater un tunnel, rapporte le producteur. Il n'y a aucun dégât sur les cultures, ce n'est que du matériel, mais il y en a pour au moins 5 000 euros. » Toit de l'exploitation arraché, récolte de noix à terre, verger mutilé, au Gaec des Murailles à Tullins, Jean Chaléat se retrouve face à une situation de désolation, touché à deux reprises en 15 jours.
Fruits abîmés
Le Nord du département, et la vallée du Rhône n'ont pas été épargnés non plus. « Le vent a cassé pas mal de branches et d'arbres et les récoltes ont été mises à terre, indique Guillaume Thévenas, producteur de fruits à Saint-Maurice-l'Exil. Chez nos collègues, beaucoup de petites serres ont été détruites. Les bâches étaient relevées à cause de la chaleur et le vent s'est engouffré. » Le vent d'ouest a surpris les producteurs. « Nous avons enregistré des vitesses de 130 km/h », poursuit Guillaume Thévenas. 30 à 40% des nectarines prêtes à ramasser sont tombées à terres. « A cela s'ajoute l'effet boisage : les fruits sur les branches sont abîmés et seront donc dépréciés. » Idem pour une parcelle d'abricots prêts à cueillir, mais retrouvés au sol. « Seuls les plus petits ont résisté ». Chargées de fruits, les branches des arbres ont d'autant plus cassé. « C'est une perte d'une partie de la récolte pour l'exploitation, mais ce n'est pas la même chose que les nuciculteurs pour qui les arbres à terre représentent une perte de fonds ». Le producteur de fruits relativise car il sait que d'autres exploitations sont beaucoup plus touchées. Pour autant, il s'inquiéte de voir également les dégâts causés par la chaleur et le soleil sur les pommes notamment, qui ont complètement brûlé. « Sous les filets anti-grêle qui font ombrage, il y a moins de dégâts », remarque-t-il.
Abricotiers secoués
A Saint-Prim, à peine plus haut dans la vallée, chez Jérôme Jury, c'est la catastrophe. « Nous avons trois types de dégâts, déclare le producteur dépité. Il y a ceux liés au vent qui a cassé beaucoup d'arbres dans les jeunes vergers. Les abricotiers ont été sectionnés à ras-le-sol au niveau du point de greffe. Nous avons perdu une centaine d'arbres sur une même parcelle. Il y a aussi les dégâts dus à l'excès de vent sur les fruits presque à mâturité qui sont griffés. Enfin, la grêle a anéanti deux hectares d'abricots. Aucun fruit n'est commercialisable. » Après la grêle, le gel et la sècheresse, les épisodes météorologiques s'enchaînent et touchent des exploitations qui ont pourtant largement investi dans la prévention.
Un non-sens
Jérôme Jury regrette que le système assurantiel ne soit pas à la hauteur. « Cela fragilise les exploitations. Nous n'avons pas de soutien de la part du ministère de l'Agriculture qui n'a pas conscience de ce genre de problème. » Il plaide pour la mise en place d'un système d'assurance récolte « qui serait un élément de conditionnalité de la PAC ou bien, que dans le cadre de la PAC, une somme soit allouée à l'assurance récolte. » Ce sont des éléments défendus par la FNSEA. Jérôme Jury déplore le manque de performance de l'outil assurantiel, par défaut de mutualisme notamment. Son assurance récolte, il n'en attend pas grand chose. Il fait le décompte : « Pour la prévention des risques, nous nous sommes équipés de dispositifs antigel. Nous avons chauffé deux nuits à la bougie cet hiver pour un montant de 70 000 euros. Ce qui nous a permis de sauver 60% de notre récolte en avril dernier. Lundi soir, les filets paragrêle ont protégé 80% de ce qui restait. Sur cela, l'assurance applique une franchise de 30% et l'indemnisation est seulement basée sur le coût de production et non pas sur le prix de vente. Et comme je suis assuré, je ne suis pas éligible au dispositif de calamité agricole. Et si je n'avais pas eu de moyen de prévention, l'assurance aurait fonctionné au maximum. C'est un non sens. » Il reste sur l'exploitaiton entre 40 et 45% des fruits à récolter. En production fruitière, les bilans déficitaires s'accumulent.
Isabelle Doucet
Météo / Le reste du département a été touché le 6 juillet.Dégâts dans le Trièves et le Royannais
Un nouvel épisode orageux, survenu samedi 6 juillet vers 23h30, est venu endommager les cultures qui avaient été épargnées jsuqu'ici.C'est le cas à Prébois, dans le Trièves, où la vigne a été touchée en quelques minutes par la grêle. « Il y a beaucoup de grains impactés, de la coulure. Il va falloir traiter de nouveau », constate Samuel Delus, viticulteur. « Ca a été notre tour. J'ai rarement vu de tels grêlons à Prébois ». Les cultures ont aussi été touchées dans la plaine de Mens, épis de blés plumés et maïs couchés, le scenario se répète.
A la limite de l'Isère et de la Drôme, l'orage a de nouveau touché la noyeraie et les cultures de maïs samedi soir, occasionnant une fois de plus de très gros dégâts : noix à terre, arbres arrachés et maïs pelés.