Moirans
Au coeur des agricultures iséroises

Morgane Poulet
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Le 26 septembre, la Maison des agriculteurs de l’Isère a été inaugurée à Moirans. Sa nouvelle identité rurale a été largement mise en avant.

Au coeur des agricultures iséroises
La Maison des agriculteurs de l'Isère a été inaugurée à Moirans. Elle tient désormais lieu et place de siège à la place du bâtiment grenoblois.

Le 26 septembre, la Maison des agriculteurs de l’Isère, située à Moirans, a été inaugurée par ses occupants et par différents acteurs du territoire. Nouveau siège d’organisations agricoles se trouvant auparavant à Grenoble*, le bâtiment en lui-même doit répondre aux objectifs que se sont fixés ses différents occupants, soit faciliter le rapprochement des élus et conseillers avec les agriculteurs, parfaitement s’intégrer dans l’économie du territoire mais aussi répondre aux enjeux environnementaux.
 
Lieu stratégique
 
L’implantation de la Maison des agriculteurs à Moirans doit répondre à une volonté forte de ses occupants de prendre une identité rurale. « Moirans se situe au centre du département et donc de l’agriculture », précise Jean-Claude Darlet, président de la Chambre d’agriculture de l’Isère. Pour autant, des antennes de la Chambre d’agriculture resteront en place dans l’ensemble du département afin de « ne pas le délaisser ».
Pour Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère, Moirans constitue un « lieu central, peut-être plus facile d’accès que Grenoble pour les agriculteurs qui n’ont pas forcément les bons Crit’Air sur leur véhicule ». Et de confirmer qu’il ne s’agit pas d’oublier les agriculteurs installés plus au sud du département : « nous organiserons peut-être une session annuelle ou bi-annuelle dans le Sud Isère pour qu’ils ne soient pas oubliés. Tout doit être défendu en Isère. »
Et entre autres, les dossiers importants que le siège grenoblois souhaitait traiter n’ont pas été laissés à la ville. Si les problèmes liés à la Covid-19 ont été « traités naturellement », il faut désormais sérieusement se pencher sur « la guerre en Ukraine, en lien avec les approvisionnements et la hausse du coût de l’énergie », explique Jérôme Crozat.
Et pour « faire en sorte que demain, chaque Français puisse consommer local », comme l’explique Gilbert Guignand, président de la Chambre régionale d’agriculture Auvergne-Rhône-Alpes et secrétaire-adjoint de la Chambre d’agriculture France (APCA), il faut commencer par puiser dans les ressources de son territoire pour répondre à ses besoins.
 
Économie de territoire
 
C’est pourquoi la construction de la nouvelle Maison des agricultures s’est faite grâce à des investissements locaux. Si le coût des travaux s’est élevé à plus de 6 millions d’euros, « le financement s’est fait par les apports des différentes structures à hauteur de 2,2 millions d’euros », explique Jean-Claude Darlet. Cela s’est en partie réalisé « grâce à la revente des bâtiments de Grenoble et de Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs », laissant la Chambre d’agriculture de l’Isère actionnaire à 75%, Adice à 13% et la FDSEA et Terre Dauphinoise à 12%.
Le Département a aussi participé au financement, à hauteur de 500 000 euros pour « valoriser les essences locales, comme le bois des Alpes, et des matériaux comme le ciment Vicat », notamment. Car « le Département a la volonté d’investir dans ce qui est important pour l’agriculture, explique Jean-Pierre Barbier, président du Département, ce qui explique la naissance du Pôle agroalimentaire en 2018, après les violentes manifestations qui ont eu lieu à La Tour-du-Pin en 2015 pour que soit augmenté le prix du lait ». C’est pourquoi le 30 septembre, plus d’1,3 millions d’euros devraient être accordés pour accompagner différentes mesures devant défendre l’agriculture iséroise et les produits locaux. « Aujourd’hui, nous sommes déjà arrivés à ce qu’il y ait 40 % de produits locaux ou bio dans les cantines iséroises, mais ce n’est qu’un début », ajoute Jean-Pierre Barbier.
« Le pays voironnais nous a vendu une friche, nous n’avons donc pas consommé de terrain agricole, précise Jean-Claude Darlet, et la mairie de Moirans a exonéré une part de la taxe de construction du bâtiment. » « Le terrain utilisé se serait couvert de broussailles s’il n’avait pas été entretenu », ajoute Valérie Zulian, maire de Moirans.
Pour les 3,9 millions d’euros restant, le partenaire de longue date des agriculteurs, le Crédit agricole, a concédé un prêt à taux fixe de 0,79%.
Et pour joindre le geste à la parole, la Maison des agriculteurs a eu recours à des bureaux d’études du département, de même qu’à des entreprises de constructions locales pour faire vivre son économie de territoire.
 
Place à l'agriculture

Par le biais de cette implantation, qui se veut être au plus près des agriculteurs isérois mais qui a également été réalisée en faisant jouer tous les acteurs locaux possibles, « l’agriculture doit faire son retour à Centr’Alp 3 », explique Valérie Zulian.
La ville, qui se trouve « entre les territoires de l’AOC Bois de Chartreuse et de l’AOP Noix de Grenoble », a conscience « qu’il faille préserver le foncier agricole ». C’est pourquoi un nouveau Plan local d’urbanisme (PLU) est à l’étude et « pourrait rendre des terrains aux agriculteurs », explique-t-elle.
Car si l’agriculture ne représente que 2% du PIB, elle occupe tout de même deux tiers du territoire et « répond à l’essentiel de nos besoins », précise Valérie Zulian. Un paradoxe renforcé par le fait que les cent premières aires urbaines de France ne sont autonomes alimentairement parlant qu’à 2%, ajoute Bruno Cattin, président du Pays voironnais, pour qui l’installation du siège de la Maison des agriculteurs à Moirans affirme la nécessité d’arriver à une sécurité alimentaire.

Morgane Poulet

* Chambre d’agriculture de l’Isère, Adice, FDSEA de l’Isère, Terre Dauphinoise, Agri Emploi, Jeunes Agriculteurs de l'Isère, Service de remplacement, MSA Alpes du Nord.

Un bâtiment éco-responsable et accueillant

La nouvelle Maison des agriculteurs a été pensée pour répondre aux enjeux environnementaux. C’est pourquoi des panneaux photovoltaïques 540 m2 ont été installés sur les toits du bâtiment pour produire environ 80 % de sa consommation électrique totale.
Le refroidissement du bâtiment est permis par un système de poutres froides et des espaces vitrés ont été créés pour optimiser la consommation de l'éclairage et donc pour éviter une surconsommation de l’énergie. Le système de climatisation créé permet de refroidir le bâtiment de seulement deux à trois degrés en-dessous des températures extérieures. Des matériaux naturels ont été utilisés, comme le bois de Chartreuse et le béton bas carbone, et les plafonds sont équipés de LED et de très peu de luminaires afin de réduire la consommation électrique. Les stores installés à chaque fenêtre s’adaptent selon la luminosité.
Conçu pour accueillir de nombreux visiteurs, le bâtiment regroupe 2 000 m2 de bureaux pour une surface totale de 2 500 m2. Avec cinq boxes individuels au rez-de-chaussée, la volonté des principales structures porteuses du projet est de pouvoir organiser réunions et rendez-vous avec les agriculteurs isérois, notamment.
Avec la possibilité de réunir un plus grand nombre d’acteurs dans une salle de 120 m2, grâce à des cloisons mobiles permettant de créer trois salles différentes à partir de la même pièce. L’isolation phonique rend également possible la tenue de trois réunions simultanées.
Située à 651 m de la gare de Moirans, la deuxième la plus desservie du département, la Maison des agriculteurs doit devenir un véritable lieu de rencontre et d’accueil pour tous les agriculteurs du département.

MP