Innovation
Voyage au cœur d'un silo de maïs

Le Silo'Scan permet une approche plus pointue de l'évolution des silos. Isère conseil élevage a fait l'acquisition de cet outil d'analyse.
Voyage au cœur d'un silo de maïs

Développé par Orne conseil élevage, le Silo'Scan a déjà remporté de nombreux prix, signe de son utilité. Parce qu'il offre une analyse précise de la situation du silo de maïs, il garantit l'élevage d'une bonne conservation de son alimentation. En Rhône-Alpes, plusieurs départements ont investi dans cet appareil de mesure composé de plusieurs sondes, à commencer par Isère conseil élevage. Le Ciel proposait d'ailleurs une démonstration début novembre, au Gaec du Haut-Virieu, un élevage laitier de 110 montbéliardes, qui produit 950 000 litres de lait et dispose d'une SAU de 180 ha (40 ha de maïs, 40 ha de blé, 3 ha d'orge, 12 ha de luzerne, 12 ha de colza et le reste en prairies naturelles). Le Gaec pratique l'ensilage du maïs, de la luzerne et de la prairie. L'exploitation « essaie toujours d'être autonome », comme l'explique un des quatre associés, Philippe Poncet.

Le Silo'Scan est arrivé en Isère.
Le silo de maïs en question a été constitué le 2 septembre dernier. 16 hectares y ont été récoltés. Et d'après Silo'Scan, les choses se passent plutôt bien. « Silo'Scan permet de mesurer les pertes directes et indirectes des stocks fourragers », rappelle Pierre Gonin, conseiller élevage. Un bon ensilage, bien tassé, permet d'éviter la réoxygénation accidentelle du tas et le développement de moisissures ou de levures en périphérie, pouvant provoquer des mycotoxines.

Tassement, fermentation, température

Les prélèvements sur la tranche du silo de maïs s'effectuent à raison de trois points par côté et de dix points au cœur du silo. Sur chaque point sont mesurés : le tassage, la fermentation et la température. Premier conseil : effectuer une pression régulière sur la sonde pour ne pas fausser les résultats. « L'objectif est d'avoir un silo bien tassé, c'est-à-dire au moins 700 kg de matière brute/m3 », insiste le conseiller. Cette densité est estimée avec un compactomètre. Ces résultats permettront d'évaluer les pertes à venir. Un silo perd 5 à 20% de son poids en cours de saison. Pour un élevage avec 20 ha de maïs, la perte est d'environ 3 ha. Anis, il ne devra pas rester plus de 40% d'air dans l'ensilage. Au-delà, le silo est exposé aux bactéries, champignons et autres moisissures. Plusieurs paramètres jouent dans la qualité du tassement : la puissance et le poids du tracteur (lester, gonfler les pneus si possible), le temps moyen passé sur la matière (50 tonnes de matière brute à l'heure, soit un hectare), ne pas dépasser 20 cm de matière avant étalement, ou encore, la longueur de coupe.

 

Le Gaec est équipé de deux grands silos pour le maïs et la luzerne.           Règle de base : un silo tassé et privé d'air.

Caméra infrarouge

La deuxième mesure porte sur le Ph, sachant que le processus de fermentation connaît plusieurs phases. Le premier jour, est la phase aérobie, où la matière a été directement au contact de l'air. Le Ph est encore élevé en raison de la présence d'oxygène ; le silo perd ainsi 1% de son volume dès le premier jour. Puis vient la phase transitoire, sur un à deux jours, où le Ph baisse. Levures et champignons, consommateurs de sucres, se développent. Si la fermentation dure trop longtemps, il y a encore risque de perte de la matière. La dernière phase est celle de l'acidification du silo, c'est-à-dire de sa stabilisation. L'oxygène a disparu « d'où l'intérêt d'avoir un silo étanche », insiste le conseiller. Les bactéries lactiques transforment le sucre en acide lactique, ce qui provoque une baisse du Ph. Il faut compter entre 12 et 14 jours pour arriver à un Ph inférieur à 4. « Si le silo s'acidifie trop vite, cela indique qu'il y a beaucoup d'acide lactique, donc beaucoup de sucre en amont. Un silo trop acide n'aura pas la faculté d'empêcher le développement de champignons », reprend Pierre Gonin. A la caméra infrarouge, cela se traduit par des zones bleues. Un fourrage ainsi dégradé peut provoquer des problèmes d'appétence sur un troupeau laitier, voire pathlogiques. La caméra thermique indique en effet où se situent le front d'attaque et les zones d'échauffement. La température du silo ne doit pas dépasser les 15°. Signalés en rouge, les échauffements traduisent une reprise de la fermentation.
Enfin, le profil de fermentation peut être complété par l'utilisation de la boîte de senteurs Silage box. « Un silo bien conservé sent peu », prévient le conseiller. Sinon, cela peut varier d'une simple odeur de pain chaud (l'acide lactique) à une odeur de vinaigre (acide acétique), à l'éthanol (moisissures et champignons) ou pire, une odeur entêtante d'acide butyrique, qui hésite entre le pourri et la cadavérine.

Fibrosité de la ration

Orne conseil élevage est allé plus loin dans l'analyse des pertes d'amidon sur une ration d'ensilage. L'outil développé s'appelle Amido'Scan et analyse l'amidon sur bouses. Il quantifie ainsi la valorisation de l'amidon by-pass. Les résultats sont exprimés en UFL du maïs et permettent de recalculer les rations. Une étude va être menée en Isère.

 

Pour compléter l'analyse des silos : le tamisage des rations alimentaires.


Enfin, un autre niveau d'analyse est effectué avec des tamis pour contrôler la fibrosité de la ration. Trop de particules grossières ou trop fines entachent l'efficacité alimentaire. Les résultats dépendent bien entendu du hachage, à 14, 16 ou 18 mm. Pour autant, quatre niveaux théoriques de granulométrie et fibrosité sont proposés. La ration de principe est composés de 3 à 4% de matière de plus de 19 mm, 60 à 80% entre 8 et 19 mm (la « bonne fibre consommable »), 20 à 30% entre 1,3 et 8 mm et moins de 5% de poussières de moins de 1,3 mm. « Lorsqu'il y a beaucoup de grains dans une bouse, on suppose qu'il y a beaucoup de pertes d'amidon », rapporte Pierre Gonin.

 

Le tamisage indique le niveau de hachage du silo.

Isabelle Doucet

 

Gaec du Haut-Virieu

A chacun son travail

Au Gaec du Haut-Virieu, les tâches sont bien réparties. Mireille Revol s'occupe de la partie administrative. Son fils Guillaume Revol, est chargé des cultures et de l'alimentation des bêtes. Bernard Revol de la traite, des foins, et aide son fils sur les récoltes. C'est l'associé le plus polyvalent. Philippe Poncet s'occupe quant à lui de l'élevage des veaux, du suivi de la reproduction du troupeau et aussi de la traite. La salle de traite est équipée en 2X10 simple et amortie depuis longtemps.
Au niveau de ses infrastructures, le Gaec a réalisé son hangar et un silo en 2001, ainsi qu'un nouveau silo en 2008. Passé aux TCS, il travaille en GIE avec le Gaec de la Gambille pour les travaux culturaux. « Notre force, c'est que les bâtiments sont finis de payer, nous ne sommes pas assommés par les prêts », explique Philippe Poncet, dont la ferme vient de ses parents. « Notre faiblesse, ce sont les échéances qui arrivent d'ici 5 à 6 ans, avec le renouvellement des associés et la fin du bail du château de Virieu en 2021 », poursuit l'exploitant. En effet, le Gaec exploite 45 hectares du château sur un bail de 25 ans. Pour Philippe Poncet, le Gaec à quatre, c'est l'art du compromis : celui des modes culturaux, des façons de travailler, des objectifs pour l'exploitation. Pour autant, la ferme, qui livre à Danone et aux établissements Bernard, n'est pas en difficulté. L'autonomie alimentaire des bêtes est recherchée et si le troupeau sort de mai à octobre sur 5 ha de pâturages permanents, les économies se mesurent plutôt sur la paille (la stabulation est en aire paillée), que sur l'alimentation.
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