Dans le cadre de la14 ème fête de la forêt de montagne organisée à Lans-en-Vercors, l'association des communes forestières de l'Isère organisait un colloque sur la production durable du bois de montagne.
Aller chercher les beaux bois

Le débat a cherché à trouver de nouvelles voies pour l'avenir de la forêt de montagne.

« La forêt de montagne est une ressource inépuisable », rappelle François-Xavier Nicot, directeur « forêt » de l'ONF Rhône-Alpes. Produire durablement, récolter rentablement : tous les acteurs de la forêt de montagne rhônalpins étaient réunis à Lans-en-Vercors pour tenter de mettre en perspectives bonnes pratiques, protection de l'environnement et valorisation de la ressource. Ou plutôt des ressources, car elles sont plurielles recouvrant l'eau, les paysages, la biodiversité, le tourisme, la protection contre les risques naturels et bien entendu, le bois qui est de loin la plus importante. Elle est « une locomotive » pour François-Xavier Nicot, car créatrice de valeurs. Mais c'est aussi une forêt en péril, en raison principalement des difficultés de gestion, car les coûts d'accès sont souvent supérieurs à la valeur des bois. Le directeur adjoint de l'ONF Rhône-Alpes préconise donc deux axes de travail, celui de la valorisation du bois de montagne, à l'image des démarches de certification telles que Bois des Alpes ou l'AOC de Chartreuse, et celui de la diminution des coûts d'accès et de mobilisation. D'où la place de l'innovation, si chère à Guy Charron, président de la Cofor Isère et organisateur de la fête de la forêt de montagne placée sous le signe de l'évolution technologique et des pratiques. Le ballon de débardage captif ou le scanner Lidar en sont les exemples les plus avancés. (Voir l'article sur le ballon de débardage)

Des entreprises réputées

Ces solutions sont explorées par le FCBA, le centre technique de l'industrie de la forêt et du bois, qui dispose d'une antenne grenobloise plus particulièrement centrée sur la forêt de montagne. Paul Magaud, ingénieur en exploitation forestière, décrit la formidable évolution du parc machines depuis 15 ans. Plus performantes, dédiées à la pente, elles présentent cependant des coûts d'investissement importants. Or, c'est bien au niveau des hommes et des entreprises que se concentrent les plus grosses difficultés, par manque de main-d'œuvre et de moyens. Paul Magaud insiste sur la nécessaire « concertation entre les acteurs ». Il propose une sorte de contrat qui garantirait un service de qualité réalisé par des entreprises réputées, où les attentes de chacun seraient identifiées. « Il y a une balance à mettre en œuvre entre les coûts et les gains », rappelle-t-il. Les contrats pluriannuels s'inscrivent dans cette tendance. A Méaudre, ils sont signés pour cinq ans et ont permis de pérenniser les entreprises de travaux forestiers (ETF), mais aussi de mobiliser le bois énergie. Grâce à ces coupes en régie, les forêts sont plus propres car nettoyées du bois déclassé.

 

Lectrice du numéro spécial Fête d l a forêt de montagne de Terre dauphinoise.

Investissements

Dans la première transformation, Stéphane Eymard, président de La Chambre syndicale des marchands de bois et scieurs de l'Isère fait valoir que « le métier de scieur est difficile, il réclame des investissements énormes, voire insurmontables. Les scieries qui s'en sortent sont celles qui investissent, dans des séchoirs, pour optimiser la matière première, dans des centres d'usinage et dans des bureaux d'étude dédiés à la construction. Mais nous avons des difficultés d'approvisionnement ». Michel Castan, le vice-président de la fédération nationale des communes forestières reconnaît que les bois allemands et autrichiens « sont plus normés ». « On ne joue pas dans la même catégorie », ajoute-t-il. C'est pourquoi il plaide lui aussi pour des nouvelles pratiques qui permettent d'aller chercher les beaux bois des forêts de montagne aux propriétés mécaniques indéniables car ils poussent plus lentement. « Cela passe par une relation de confiance, il faut que le milieu évolue », insiste Michel Castan. Michel Cochet, président de Créabois et dirigeant de la scierie Bois du Dauphiné va plus loin : « L'offre de bois s'est largement développée depuis les années 2000. Les entreprises ont fait des efforts d'investissement, mais la construction n'est pas en très bonne santé. Aujourd'hui, les attentes de la première et deuxième transformation portent sur du bois de diamètre moyen de bonne qualité. Et s'il y a une reprise d'activité, nous risquons de manquer de matière première. »

Se regrouper

Aux côtés de Guy Charron, président de la Cofor, la députée Marie-Noëlle Battistel, trésorière de l'Anem, Jean-Yves Bouvet directeur de l’agence iséroise de l’ONF et Michel Castan, vice-président de la fédération nationale des communes forestières.

 

En creux, les acteurs disent aussi souffrir de l'empilement règlementaire et la forêt privée peine à résoudre ses problématiques de morcellement. Une convention vient d'ailleurs d'être signée entre l'association régionale des Cofor et la Safer pour regrouper le petit parcellaire. Quant au volet humain, Jean-Claude Darlet, le président de la chambre d'agriculture de l'Isère, estime que la piste du groupement d'employeurs, qui permet de passer d'un statut de CDD saisonnier à un CDI, mérite une évolution législative pour pouvoir s'appliquer aux métiers de montagne. Pour sa part, la députée Marie-Noëlle Battistel, œuvre pour la généralisation de l'expérimentation du CDII*, qui permettrait de pérenniser des emplois en transformant des activités saisonnières en parcours professionnels stables.

Isabelle Doucet

*Contrat à durée indéterminée intermittent

 

 

Abattage en direct.   Démonstration de débardage avec les ETF et l'ONF.   

 

La fête des premières fois

Créée en 1989 et co-organisée par l'association des communes forestières de l'Isère (Cofor) et l'ONF, la fête de la forêt de montagne a pour vocation de faire découvrir l'univers du bois du massif alpin. Elle a lieu tous les deux ans et visite chaque année un massif différent. Elle s'adresse tant à un public professionnel, que familial ou aux élus de montagne. Cette année, elle était accueillie pour la première fois dans le Vercors, à Lans-en-Vercors. Le volet festif s'était installé sur le stade de neige des monts de Lans, tandis que le colloque inaugurait le tout nouvel Espace culturel et sportif de Lans, tout de Bois des Alpes vêtu. Puisque la manifestation était placée sous le double signe de l'innovation et du développement durable, le « clou » du spectacle devait être la démonstration de débardage par ballon captif, en première mondiale. Mais les conditions météo n'ont pas permis de découvrir le bijou mis au point par EchoForêt, le FCBA et Airstar. Ce n'est que partie remise.