Elections legislatives
Ne pas trahir l'agriculture française

Isabelle Doucet
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Les responsables agricoles de l’Isère ont invité les candidats aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet à un échange dans le cadre d’une ferme laitière à Belmont.

Ne pas trahir l'agriculture française
Les candidats aux législatives à la rencontre du monde agricole isérois. Crédit : ID TD

La liste est longue des attentes des agriculteurs vis-à-vis des parlementaires.
Après les manifestations de janvier et la mise sur l’ouvrage de la loi d’orientation agricole, d’aucuns espéraient des avancées, notamment en matière de réglementation.
La dissolution inattendue de l’Assemblée nationale a semé la confusion dans les exploitations doublée d’un sentiment de gâchis pour tout le travail accompli.
Aussi, les responsables agricoles de l’Isère, sous l’égide du Conseil de l’agriculture départementale, ont souhaité rencontrer les candidats aux élections législatives. Un temps d’échanges s’est déroulé jeudi 27 juin au Gaec des sources à Belmont, chez Eric Chavrot et Serge Drevet, une ferme de 70 vaches laitières.

Attente de paiements PAC

Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère, a présenté les 27 propositions nationales de la FNSEA en réclamant du bon sens et en insistant sur les problématiques locales.
Il a remercié les députés isérois Yannick Neuder (7e circonscription/LR) - le seul parlementaire présent - et Élodie Jacquier-Laforge (9e circonscription/Modem), qui se sont investis dans la LOA, puis a brossé les différents enjeux énergétiques.
La région est riche de ses barrages qui permettent de stocker l’eau et de produire de l’électricité, mais ce sont des aménagements qui datent de 60 ans.

Les responsables agricoles ont exposé leurs attentes

Les énergies renouvelables peuvent compter sur l’agriculture, notamment s’il s’agit de méthanisation, mais pas au détriment de terres productives sous prétexte d’agrivoltaïsme.
Il a aussi souligné l’absurdité des compensations écologiques, à l’image de l’emprise du frêt ferroviaire en Nord-Isère, consommateur de 90 ha, pour lesquels il faudra restituer le double.
Jérôme Crozat, évoque égalementla souveraineté alimentaire et prône le respect du libre-échange "pour ne pas trahir l’agriculture française", exportatrice de nombreux fleurons tels que la noix de Grenoble.
Enfin, il a rappelé que les agriculteurs étaient toujours en attente du paiement des aides du deuxième pilier de la PAC, promises depuis le mois de mars.

Le respect des corps intermédiaires

Aurélien Clavel, secrétaire général de la FDSEA, a rappelé quant à lui que le département reste fortement touché par la prédation et les dégâts liés à la faune sauvage et demande la protection "des exploitations de manière globale". Il a aussi demandé aux candidats de travailler "dans le respect des corps intermédiaires" que sont les syndicats. "C’est facile de gouverner sans personne en face, mais cela peut devenir vite le chaos", a-t-il prévenu.
Axel Masset, coprésident de Jeunes agriculteurs Isère, a fait état des problématiques de transmission des fermes alors que le département connaît une bonne dynamique d’installation.

Attractivité de la profession agricole

Yannick Neuder, en introduction, a dénoncé "les partis qui ont des solutions toutes faites pour l’agriculture".
Il a regretté que la dissolution mette la LOA en panne et fait valoir son investissement, notamment sur la notion de droit à l’erreur, pour lequel un amendement a été accepté.
Il estime cependant que "la LOA ne répond pas à la question de l’attractivité de la profession agricole" car elle ne traite pas du pouvoir d’achat des agriculteurs.
Il rappelle aussi que son amendement sur la surtransposition des normes a été approuvé, même si aujourd’hui "je ne sais pas comment le Parlement va s’en saisir", s’est-il inquiété.

Thomas Michaud et Yannick Neuder

Enfin, il reste très mobilisé sur le sujet du loup et invite les agriculteurs à aller voir "qui vote" au niveau européen pour la révision de la convention de Berne. "Prélever plus est la seule solution pour arrêter de dépenser chaque année 60 millions d’euros pour le loup", a encore lancé Yannick Neuder.

Pas de réponse simple

Thomas Michaud, ex-sous-préfet de La Tour-du-Pin revenu dans le secteur privé, est le suppléant de Marjorie Meynier-Millefert, députée de la 10e circonscription depuis 2017 (Renaissance). 
Il a souligné, au regard de la liste des thématiques exposées par Jérôme Crozat, "des défis complexes à relever", qui n’ont "pas de réponse simple".
Il fustige lui aussi "ceux qui ont des réponses simplistes […] les gens savent que c’est un mensonge".
L’ex-sous-préfet préconise "de travailler demain avec un arc républicain, des gens raisonnables et responsables, capables de travailler sur un projet collectif utile et adapté au territoire".

Concurrence loyale

Cendra Mottin, ex-députée de la 6e circonscription de 2017 à 2022 (LERM), a enfoncé le clou en déclarant : "vous n’avez pas beaucoup vu mon successeur".
Elle assure avoir suivi l’actualité agricole et s’intéresser à l’installation des jeunes "et des moins jeunes qui ont une vision bucolique de l’agriculture […] ce qui fait oublier que vous être des chefs d’exploitations et des entrepreneurs".
Quant à la LOA, elle regrette que les mesures d’urgences n’en aient pas été extraites de façon qu’elles soient mises en œuvre au plus tôt et épargnées par la dissolution de l’Assemblée nationale.
Enfin, elle plaide pour une "concurrence loyale" et pour le respect des clauses miroirs établies dans le cadre des accords de libre-échange. Elle demande des sanctions pour "ceux qui achètent les produits" qui ne respectent pas les règles

Dans l'action

Enfin, Fabien Durand, le maire de Saint-Savin, suppléant de la candidate Annie Pourtier dans la 6e circonscription (LR Union de la droite et du centre) a insisté sur son ancrage local et dénoncé les méthodes du député sortant RN venu manifester sous les fenêtres de sa mairie.
Son objectif : "la bienveillance pour que le monde agricole aille mieux" et "transposer ce qui est bien fait à l’échelle locale et départementale au niveau national".
Il ajoute : "notre responsabilité n’est pas dans le paraître, mais dans l’action".
Isabelle Doucet