L'actu vue par / Dominique Mansion
Selon Dominique Mansion, spécialiste des trognes, les arbres trognes sont « des arbres d'avenir enracinés dans le temps »

Isabelle Brenguier
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Auteur et illustrateur, créateur de la maison botanique de Boursay, Dominique Mansion a participé aux « Journées nationales trognes, bocage et climat », en tant qu'expert européen des trognes. 

Selon Dominique Mansion, spécialiste des trognes, les arbres trognes sont « des arbres d'avenir enracinés dans le temps »
Crédit photo : Dominique Mansion Auteur et dessinateur, Dominique Mansion est spécialiste des trognes.

D'où tenez vous cette passion pour les arbres trognes ?

Elle me vient de l'enfance. Originaire du Loir-et-Cher, un territoire de bocage dans lequel il y avait beaucoup de trognes, je passais mon temps à grimper dans ces arbres. J'en garde un souvenir magique, comme je garde aussi en mémoire l'image de mon père travaillant à la hache une trogne de chêne. J'ai aussi été marqué par la physionomie de ces arbres qui ont nourri mon vocabulaire d'artiste. 

Lorsque vous vous êtes rendus en Matheysine, quel regard avez-vous porté sur ce paysage marqué par la présence des trognes ?

Ce déplacement a été une incroyable découverte. J'étais comme un petit fou. C'est certainement le territoire qui concentre la plus importante densité de trognes de France. Cela représente un patrimoine fabuleux à faire connaître. Mais je suis aussi convaincu des perspectives de développement que peuvent offrir ces arbres pour ce territoire.

Vous avez indiqué dans votre propos que les trognes étaient « des arbres d'avenir enracinés dans le temps ». Pourquoi ?

Ces arbres sont enracinés dans le temps parce qu'on en a découvert des vestiges datant de 4 500 ans. Les trognes étaient utilisées pour confectionner de la vannerie ou des pièges à poissons. C'était bien avant que l'homme s'en serve comme bois de charpente.

Et ce sont aussi des arbres d'avenir parce qu'ils peuvent tout à fait s'intégrer dans des filières de bois énergie et de bois déchiqueté, servir à chauffer fermes et habitats collectifs, être utilisés comme fourrage ou paillage dans les territoires où le foin et la paille se font rares, ou pour stimuler la vie du sol en favorisant le développement des champignons. Les remettre en production permet autant de maintenir un paysage ancestral que d'apporter des bénéfices et une rémunération complémentaire aux agriculteurs.

Vous avez consacré une partie importante de votre vie aux trognes. Aujourd'hui, il semble que le sujet soit de plus en plus pris en compte. Qu'en pensez-vous ?

C'est vrai que j'ai réalisé des illustrations, des guides, des articles et participé à de nombreux événements et conférences sur ce sujet, et en effet, je constate que les demandes sont croissantes. Il y a un mouvement qui émerge un peu partout. C'est une bonne chose. On se rend compte que les trognes peuvent répondre de façon très pertinente aux problématiques climatiques actuelles. A mon avis, il est urgent de s'en occuper pour renouveler les vieilles trognes de façon à les intégrer à une dynamique de production. Car elles s'apparentent à une centrale de production renouvelable et durable de proximité.

Propos recueillis par Isabelle Brenguier